
S A B L E S E T T A N G U E .
( Art, nature, & ufage des différentes efpèces de )
JL e s fables font des matières pierreufes quelconques,
réduites en menues parties.
■ 11 peut y avoir par cbnféquent autant d’efpèces
de fables qu’il y a d^éfpèces de pierres ; & il y
en a une beaucoup plus grande quantité qui
réfuite du- mélange des fragmens des différentes
efpèces de pierres.
Cependant comme les pierres tendres, dont les
parties font défunies, fe réduifent naturellement
en particules fî petites que leur amas refîemble
plutôt à. de la poufîière où à'de la terre, qu’à du
fable ; & qu’au contraire les parties des pierres
dures fe confervent en molécules ou grains, d’une
groffeur fenfîble : i l s’enfuit que la plupart des
matières , connues fous le nom de fable, font ou
doivent être de la nature des pierres vitrifiables.
Le principal ufage du fable en chymie, c’eft
d’encrer dans la compofition des poteries & des
verres. •
Il y a des fables plus ou moins fulîbles , & dont
les grains font plus ou moins menus. Le fable le
plus fin fe nomme fablon ; c’eft celui dont on fe
fert le plus dans les vitrifications & autres opérations
de chymie, à caufe qu’il eft naturellement
déjà fort divifé.
On l ’emploie aufîi très-fréquemment en forme
de bain, & au lieu d’eau, dans des càpfiiles bu
vafès, pour tranfmetrre la chaleur aux vailfeaux
dans lefquels on opère ; il forme alors ce qu’on I
nomme le bain de fable.
Sous le nom de fable de pierres on comprend le
gravier, qui eft le gros fable dont on fe fert pour '
affermir les grands chemins, les chauffées : il eft
composé de différentes pierres ou fragmens pierreux.
Il y a du fable blanc, du rouge & du noir ; celui-
ci fe tire des caves. Il a de gros grains comme de
petits cailloux , & fait du bruit quand on le
manie : c’eft le meilleur de tous les fables. On en
connoît la bonté en le mettant fur des étoffes : fi
ce fable les falit, & qu’il y demeure attaché, il
ne vaut rien.
On appelle fable mâle celui qui, dans un même
l i t , eft d’une couleur plus forte, qu’un autre qu’on
nomme fable femelle.
Il y a le gros fable de rivière, 8c le fable fin Cf \
délié, que l’on^paffe à la claie ferrée pour fabler
les aires battues des allées des jardins.
Sous le nom de fable vitreux , ou propre à faire
• du verre, on renferme celui qui eft compofé de
fragmens , de fîlex ou de quarts. On s’en fert dans
la compofition de la terre à fayence, de certaines
porcelaines ou de leur couvertes, dans la fufion
des glaces & cryftaux. Le fable 8e Nevers & celui
d’Etampes, font- de cette efpèce.
Ce fable varie pour la fineffe, la blancheur, &
la pureté".
Il fert encore pour nettoyer le verre, pour
dégroffir les métaux, pour polir les pierres communes.
On en met dans les caves pour tenir le vin au
frais ; c’eft ce même fable qui eft le plus propre
à filtrer les eaux fouterreines. '
Mêlé avec les terres végétales, il les rend plus
meubles & plus fertiles.
Les inégalités ou les vuides, qui fe trouvent
entre ces grains pierreux entaffés fans ordre,
facilitent la filtration des liqueurs.
Ce fable a encore la propriété de donner.de
la dureté aux cimens, à la brique.
Le fablon -qui eft , comme on vient de le dire ,
l e fable en pouflière ou le fable le plus fin , fert
pour nettoyer les vaiffèaux de métal, fur-tout ceux
de cuivre , de fer blanc, d’étain. On choîfit le
fablon qui eft d’un grain égal, pour donner, par
le frottement, le premier fini au marbre & à
l’albâtre.
Des potiers fe fervent d’une efpèce de fablon
blanc , qu’ils réduifent en poudre impalpable, pour
donner un fond blanc à leur poterie à deffein
d’imiter la fayence.
Le fable ftérile ou mobile, qui a un grain égal,
peu farineux & dur , s’emploie pour faire des
horloges horaires ou clepfydres, fi utiles dans les
voyages de mer pour mefurer le tems & marquer
le fillage.
Le fable volant, dont la ténuité eft fi extrême ,
que le vent l’emporte, fe trouve en Scanie dans des
abîmes où des voyageurs ont été éïifevelis pour
toujours.
Il y a aufîi de ce fable fur les bords des mers
'de Provence & de Languedoc ; fouvent on y met
chauffer, à l’ardeur dufoleil, des tas de ce fable^
pour faire des efpèces de bains, dans lefquels on
plonge les perfonnes attaquées de rhumatifmes.
L’efficacité de .ces bains eft due à :1a chaleur, a
la falure & à la volatilité des principes que l’eau
de la mer a communiqués au fable.
Sous le nom impropre de fables calcaires ou i
coquilliers 3 on comprend la terre appelle dans la
Tou rame , falun , & dans le Vexin-Normand cran y
laque'le n’eft qu’un tritus de coquilles marines ou ;
de madrépores, dont on fé fert pour Fertilif’erles
terres. -
On trouve fur les parages de l’île de î ’Afcen-
fîon & en d’autres endroits maritimes de l’Inde,
un fable calcaire qui refîèmble à de petites perles,
lequel n’eft compofé que* de débris de coquillages
arrondis par le ballotément des eaiyc.
Le fpath calcaire réduit en pouffière grenelée,
donne aufîiun fable calcaire.
Sous le nom de fable avgilleux, on renferme le
fable dont fe fervent les fondeurs en métaux.
Tel eft celui de’Fontenai-aux-rofes près-de Paris,
lequel eft t'ès-pfopre pour faire des mou'es qui
n’occafîonnenr (ur les pièces fondues ni des inégalités
ni des gerçures.
On regarde encore les paillettes de mica Cf de
talc , & autres parties pierreufes grénelées ou en
petites lames , mais grades ou favonneules, comme
du genre dés faibles argil’eux : il y en a de différent
es cotrlcu's. On s’en fert pour mettre fur Ké-
crture : on en Je pare auparavant les parties ter-
ïeufes par le lavage.
A l'égard du fable de Powçtol, on s’en fert pour
cimenter les matériaux pierreux des édifices qu’on
conftruit dans l ’eau. Voyez PouTgrôlane.
Sous, le nom de fables métallifères, on comprend
ces. am*Ts de parties métalliques de différentes
natures & formes, qui font plu* ou moins
riches & qu’on trouve répandues fur les havres ou
grèves de la mer.
Ces fables contiennent d’autant plus de métal,
que lés endro'ts doù ils ont été" détachés & charriés
par les eaux font plus éloignés du lieu même
de la mine.- -
Quelquefois on rencontre ces fables métalliques
par couches dans les cavit's de la te;re ; alors
il donnent nai lance aux mines de tranfport.
Si ces fables ne, font pas réellement métalliques
mais fimplement colorés, dans ces cas., quand on
les expofera au feu , leur couleur difparoîtra pour
la plus grande partie.
On trouve du fable portant étain fur la grève du
port de l’Orient \ du fable de. fe r , fur celle de
Saint-Qùay , près de Pontrieux & Portrieux à
trois lieues de Saint-Brieux en Baffe-Bretagne. Ii
eft très-attirable à l’aimant.
Le fable qui eft au pied de la montagne de
l ’îie d’Ëibe , eft prefqu’auffi magnétique.
Enfin on trouve du fable portant cuivre fur les
grèves de Saint-Domingue j & du fable portant or
dans plusieurs rivières.
L e fable noir des Indes qui eft attirable par l’aima
n dont parle Mufchenbrock, eft un fable'mêlé
de parties ferrugineufes. En joignant à ce fable' mis
dans un creüfér des matières grades , ce fia va ne
Phyficien a réduit les parties ferrugineufes en me-'
?al de fer.
Enfin, les fables étant, comme on vient de le
dire, les débris de pler.es & de fiubftances fiolides
de différente nature , ils doivent varier à 1 infini,
& il eft très - difficile & - même impofîible
d’affigiaer des limites précifies à la nature des
fables.
On diftingue encore le fable par le lieu où on le
trouve , en fable de terre , ou de montagne qui eft
ordinairement coloré en jaune, en fable de rivière
qui eft de la nature des pierres qu’elie ch a rie ,
& en fable de mer\ qui eft aufîi de la nature des
’ rochers qui bordent fies parages , & où l ’on trouve
allez fouvent des fragmens de coquilles qui lut
font faire en partie eff rvefcence avec les acides.
Lés bancs de fable de mer qui font à l ’embouchure
ou au confluent des tivères , y font apportés
par le courant des -fleuves & arrêtés par les
eaux de la mer. Ce font des plages dangereufos
pour le fillage des vailfeaux & où les ancres labourent
trop facilement.
Le fable des dunes eft accumulé par les vagues"
de la mer & par la vio’ence des vents : il paroîc
que les fables mouvans de l'Afrique- feptentrio-
nale & des bords de la Syrie , voifîne de l’Egypte ,
ne font autre'chofe que les fables de la met. 8c dis
fleuves, qui font demeurés amoncelés quand la mer
s’eft peu-à-peu retirée, On a trouvé des caravanes
entières enfevelies fous ces fables mouvans &
brûlons.
On peut en dire autant des contrées toutes fa*
bloneufes qui font vers la mer Baltique. Ces fa-
bl ères font quelquefois très-profondes.
Quant aux fables mouvans qu’on trouve fur les
grèves de quelques mers, ce font des paffages
fouvent dangereux gour les gens à cheval ou à
pied.
Il n’eft pas rare qu’un coup de vent enlève par-
tourbillons ce fable, qui retombant enveloppe le
voyageur en lui ôtant la vue dés terres : d’autres
fois, ce fable mouvant, après que la mer s’eft