
ordinairement, ou plutôt noirs, purpurins, de la
grofleur des grains de grofeilles communes, ou des
baies de fureau, fans pépin, doux au goût, avec
uue légère & agréable acidité;: on les tran{porte
de plufîeurs endroits de 1*Archipel, & entr autres j
de l ’ifthme de Corinthe,'d’où ils ont pris leur,
nom. On les cultivoit autrefois dans tous les !
alentours de Corinthe, & en particulier aux environs
de ce bois de cyprès, où Diogène jouiïïoit '
d’un loifîr philofophique, lorfqü’il prit envie à .
Alexandre de l ’y aller fuprendre; mais aujourd’hui ,
foit par la négligence des habitans de ce pays-là, :
foit par d’autres raifons, la culture en a paffé dans
les îles foumifes aux Vénitiens.
Ce que raconte Wheler, dans fon voyage de ;
Grèce & de Dalmatie , des divers lieux d’où fe i
tirent ces fortes de raifîns, de la manière qu’on les!
y prépare, & de la quantité qu’on en tranfporte'
en Europe, eft affez curieux pour que le ledeur ne
foit pas fâché d’en trouver ici le précis.
Il n’y a pas long-temps, dit ce voyageur anglois, i
qu’on recueillojt encore un peu de raifîn de Corinthe
a Vsfîlica, qui eft l’ancienne Siçÿone ,
éloignée de Corinthe feulement de fîx à fept milles ;
mais comme on n’en trouvoit pas le débit chez
les turcs , on les a négliges. .
Depuis que les chrétiens ont été dépoffédés de .
.la Grèce, & que le fultan a bâti deux châteaux
aux bouches du golfe de Lépante, il ne permet
pas aux grands vaiffeaux d’entrer dans ce golfe,
de peur de quelque Turprife, fous prétexte d’aller
chercher des rainns^de Corinthe.
On cultive néanmoins ces raifîns fur la côte du
golfe, & à Vobilfa, & on les porte à Patras,
où il en croît aufli; ces trois lieux en peuvent
fournir la charge d’un vaiffeau médiocre.
Vis-a-vis de Patras, dans le pays des anciens
Etoliens , il y a un village nommé Anatolico , bâti
comme Venife 5 dans un marais, & peuplé d’environ
200 feux. Ses habitans y cultivent dans la terre
ferme du voifînage , le raifîn de Corinthe, qui y
réuflit merveilleufement. Il eft beau & bon, &
deux fois plus gros que celui de Zante. Ils en
peuvent charger avec ceux du village de Meffan-
Jongi, un grand vaiffeau.
L e raifîn de Corinthe croît encore dans (File de
Céphalonie, & fur-tout dans celle de Zante.
Boterus n’a pas eu tort d’appeller cette dernière
lié , File d'ory à caufe de fa fertilité & de fa
beauté ; mais elle mérite encore mieux ce nom
depuis que les Vénitiens ont trouvé le moyen d’en
tirer tous les ans du profit par le trafic en général1, ;
& en particulier par celui de Tes raifîns. Cette
île de la mer Ionienne , au couchant de la Morée,
dont elle eft éloignée d’environ 15 lieues, & au
midi de Çephalonie, gouvernée par un proyéditeur
Vénitien , eft le principal endroit ou on les
.cultive.
Ils ne viennent point fur des buiffons comme
des groferlles rouges & blanches, quoiqu’on le
croye ordinairement t mais fur des vignes comme
l'autre raifîn , excepté que les feuilles font un pèu
plus épaiffes, & que la grappe eft un peu plus
petite. Ils n’ont aucun pépin , & ils font à Zante
.tout, ronges , ou plutôt noirs.
Ils croiffent dans une belle. plaine de douze
milles de long, & de quatre ou cinq de large, à
l ’abri, des montagnes qui bordent les rivages de
File ; de forte que le foleil raffemblant ces rayons
daus.Ce fond,- y fait parfaitement mûrir les raifîns
de Corinthe, le raifîn mufçat, & le raifîn ordinaire
, dont l ’on fait du vin très-fort; Cette plaine
eft féparée en deux vignobles , où il. y a quantité
d’olivîers, de cyprès, & quelques- maifons
de campagne , qui avec la fortereffe, & la croupe
du mont di Scopo , préfentent un afpeét charmant.
On vendange ces raifîns dans: le mois d’août, on
en fait des couches fur terre, jufqu’ à ce qu’ils foient
fies.
Après qu’on les a raflemblés on les nétoie , & on
les apporte dans la ville pour les* mettre dans des
m'agafîns qu’on appelle Séraglio : on les y jette
par un trou jufqu’à ce que le magafîn foie plein.
Ils s’entaiïcnt tellement par leur poids , qu’il faut
les fouir avec des inftrumens' de fer. Quand on les
met en barils pour les envoyer quelque pari:, des
hommes Ce graifFent les jambes & les preflènt avec
les pieds nus , afin qu’ils fe confèrvent mieux, &
qu’i ’s ne tiennent.pas tant de place.
Le millier pefant revient à l’acquéreur à environ
24 écus", quoique le premier achat ne foit: que de
12 écus ; mais on paie autant de douane à l’ état de
Venife que pour l’achat même.
On fa’t quelquefois par curiofîté du vin de ce
raifîn ; mais il eft fî violent qu’il pourroit paffer
pour de l’eau de-vie.
1 L’ifie de Zante fournit tous les ans afTez de raifîns
de Corinthe pour en charger cinq ou fîx vaif-
feaux; Céphalonie pour en charger trois ou quatre;
Naçhaligo ou Anatolico, Meflalongi & Patras pour
en charger un : on en tranfporte aufli quelque peu
du golfe d.e Lésante.
Les anglois ont un comptoir à Zante qpi eft conduit
par un conful & cinq où fîx-marchands pour
ce commerce. Les hollandois y ont un conful & un
ou deux marchands, & lé? françois n’y ont qu’un
commis qui eft le conful & le marchand tout enfein-
ble. Les. anglois achètent prefqùe tout le raifîn de
Corinthe,
Les zantins n’ont pas beaucoup de connoifTance
de l’ufage qu’on en fait en Europe ils font pçrïuadéç
qu’on ne s’ en fert que pour teindre Jes draps , & us
n’ont- pu imaginer la confommation- prodigieuse
qu’en font les anglois dans leurs mets , leurs pâtés
de noel, leurs gâteaux, rieurs tardes, leurs
puddings, &c.
Les apothicaires font ceux qui en débitent la
moindre partie.
Ces raifîns viennent .ordinairement en France
par la voie de Marseille, dans des balles du poids
de deux à trois cents livres , où ils font extrêmement
preffés & entaffés. Les hollandois & les anglois
, en temps de p aix , en apportent auffi quantité
à Bordeaux ; à la Rochede , à Nantes & a .
Rouen.
Les raifîns de Corinthe, doivent, fe choifîr nou*-
Veaux, petits , en .grqlTps [maries, point frottés
de miel, ni mangés de mites. Quand ils font
bien emballés, ils peuvent fe garder deux ou trois
ans, en ne les remuant point & 11e leur donnant
aucun air.
Dans les pays leptentrionaux on fe fert des raifîns,,
fecs pour faire un, v n artificiel, vigoureux;, & qui
, n’eft pas délàgréable. En pilant ces raifîns dans de
l ’eau bouillante & les laiflant macérer & fermenter
on .retire de ce vin de l ’eau de-vie & un efprit-de-
Mm|
Fruits fecs.
On appelle fruits fecs les fruits à noy au & à pépins
que I on fait fécher au four ou au foieil, comme
prunes, cerifes, pêches, abricots, poires, pommes,
figues.
Toutes fôr,es de prunes peuvent être féchées. On
les cueille dans leur entière maturité , on les range
fur des claies, on les met au four lorfque le pain
en eft tiré : on les tourne, on les change de place,
& on les ferre après qu’elles font refroidies : c’eft
la même méthode pat rapport aux cerifes.
Pour lécher les pèches , on les cueille d’ordinaire
à l ’arbre, on les porte au four pour les amortir
, enfuite on les fend promptement avec un couteau.
On en ôte le noyau , on les applatit fur une
table, on les reporte au four ; &,lorf]u’on juge
qu elles font allez féchées , on les retire, on les
applatit encore, & on les conlérve dané un lien
fec.
Pour les abricots, on les cueille lorfqu ils font
bien mûrs ; & au lieu de les ouvrir comme les pêches
pour en ôter le noyau, on fe contente de re-
poufler le noyau par l’endroit de la queue qui lui
fert de fortie. Les abricots reliant ainfî entiers, on
les applatit feulement fans les ouvrir, & on les
feche comme les pêches.
Pour fechér les poires , on les coupe en quartiers,
on les pele & on les porte au four ; ou bien fans
qu’il foit befoin de les couper, on les pele entier&s,
obfervant d’y laiffer les queues ; enfuite on les fait
bouiilir dans quelque vaiffeau avec de l’eau : alors
on le fert de leur peau pour les tremper dans leur
jus : cela fait , on les tire de leur jus , puis on les
mètàu four fürdes claies de la même manière qu’on
fe conduit pôur lés prunes. '
Les pommes, à la différence des poires , fe Te-;
client fans'être pelées * en les coupant par la moitié
après leur avoir ôté- le trognon : on les fait 1 bouillir afin d’en tirer le jus, & y tremper celles
qu’on .deftine pour fécher.
Pour faire fécher les figues on les cueille dans
leur maturité ; on lès arrange fur des claies, &
on les met au four lorfqu’il eft encore chaud, après
la cuiffon du pain* On tourne ces figues, on les
change de place, enfin on les ferre après qu’elles
font refroidies ; c’eft la .même méthode que pour
les prunes.
On a dit ci-deÏÏùs que la meilleure façon de
faire les raifîns fecs, ou raifîns de paffe, eft de
cueillir le . raifîn lorfqu’i l eft bien mûr, de le
plonger dans une lefïive de èéndre, plus ou moins
chargée de ce Tel, félon la maturité du raifîn, & de
le mettre enfuite fécher au foleil. L ’objet de cette,
lefïive chaude & alkaline eft d’ablorber l ’acide du
raifîn, afin que la partie fucrée du moût puiflè fe
cryftalifer & attire moins l’humidité de l ’air.
Nota. Le foleil n’eft pas affez chaud à Paris, pendant
l’automne, pour fécher le raifîn; il faut le faire
. fécher au four. On fait, par cette méthode, d’excellent
raifîn fec , aufli beau que celui de Provence &
d’Italie, en y employant le raifîn d’Alexandrie qui
devient très-gros i c i , mais mûrit mal ; & pour fel
| alkali on peut employer la foude du_eommerce*