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Rh u b a r b e , c a s s e , ja l a p , n e r p r u n , s c am m o n é e ,
SÉNÉ, TAMARINS.
( Art de récolter 8c de préparer ces plantes médicinales. }
N o v s ra/TèmWons j dans un meme article , ces
plantes, médicinales , qui ont beaucoup de rapport
entre elles par leurs qualités & par leur vertu
cathartique ; & qui font fi utiles à connoître,
tant pour l’ufage du commerce que pour fart de
guérir. Nous laiflbns d’ailleurs aux rédacteurs de
l'agriculture , de la médecine , de la pharmacie, &e.
le foin de préfcrire dans d’autres divifions de
cette Encyclopédie , les meilleures méthodes Ibit
pour la culture, foit pour la préparation ou pour
remploi de ces végétaux falutaires.
R H U B A R B E .. V
L a vraie rhubarbe ou celle de la Chine eft une
racine que l’on nous apporte en morceaux aflez
gros, légers , inégaux, de la longueur de quatre,
cinq ou. fix pouces:, & de la grofteur de trois- à
quatre.
Elle eft jaune ou un peu brune-en dehorsyde
couleur de fafran en dedans, jafpée comme la
noix mufcade , un peu fongueufe , d?un gôût tirant
fur 1’ âcre amer & un peu aftrîhgent-, d2une odeur
aromatique & foiblement défagréable.
. La rhubarbe croît à, la Chine. Il faut choifir
foi gneufement celle qui eft nouvelle* qui n’eft
point cariée, pourrie, ni noire; qui donne la
couleur - de fafran à l ’eau , & qui laide- quelque
chofe de yifq.ueux & de gluant fur la langue..; . i ..
, Il eft fort étrange, parmi le grand nombre
d’européens qui, depuis plus d’un fiècle vont tous les
ans en Chine , que perfonne n’ait râclié ou ne
foit parvenu à connoître exactement une plante fi
préçieufe, dont on ufe tous les jours & qui eft
d’un fi grand revenu. En attendant voici la def-
cription donnée par le P. Parefinih, qui paroît avoir-
copie celle que le P.. Michel Boynù,, en avoit
publiée dans-fa fiara. fm en fis ,imprimée, à Vienne,
en Autriche y en 16$6,.
Selon la rélation dé ces deux pères Jéfuîtes
le thai-koam ou ia rhubarbe croît en plufieurs
endroits de la Chine. La meilleure eft celle de
Tic-Chouen. Celle qui vient dans la province de
Xanfi & dans le royaume de Thibet, lui eft fort
inférieure. Il en croît aufli ailleurs, mais dont
çn ne fait ici nul ufage*
La tige de la plante eft fembïable aux petits
bambous , elle eft vuide & tiès-caftante : là
hauteur eftde trois ou quatre pieds ,& fa couleur
d’un, violet obfcur.
Dans la fécondé lune, c’eft-à-dîre, au mois
de mars, elle pouffe des feuilles longues, épaifles,,
quatre à quatre fur une même queue, & pofées
en fe regardant. Ses fleurs font de couleur, jaune*
& quelquefois violette.
A la cinquième lune, elles, prodüifeiit une petite
fèmence noire de la groffeur d’ùn grain de millet..
A la huitième lune on- arrache la plante dont la-
racine eft groffe & longue. Celle qui eft la plus
pefante, & la; plus marbrée en dedans, eft la>.
meilleure..
| Cette racine eft d’une, nature qpi la rend" très--
difficile a fécher..
Les chinoisaprès l’avoir arrachée & nétoyée^.
la coupent en morceaux d’un ou de deux pouces Si
& la font fécher fur de grandes-tablés de-pierre,,
fous lefquelles ils allument du feu..Ils tournent &:
rétournent: ces tronçons jufqu’à ce qu’ils foienfc.
bien, fecs..
Comme cette opération ne fuflït pas pour en-
chaffer toute l’humidité, ils font un trou à chaque,
morceau de racine,puis ils enfilent tous ces morceaux
en forme de chapelet pour les fufpendre à
la plus forte ardeur dù foleil, jufqu’à ce-' qu?ils
foient en état d’être confervés fans danger de fé*
corrompre..
L ’hiver eft le meilleur temps pour tirer. la
rhubarbe de la terre, avant que les feuilles vertes;
obmmencént à pouffer, parce qu’alors le lue & la>
vertu font concentrées dans la racine»
Si on la tire1 dé la terre pendant l ’été', ou dans',
le temps qu’elle pouffe des feuilles vertes,. non-feu~.
lement elle n’eft pas encore, mûre, & n’a point
de fuc jaune, ni de-veines rouges, mais elle eft
très-légère, & parconféquent n’approche point de-
la perfe&ion, de celle que l ’on retire en hiver»
On apportait autrefois la rhubarbe dé' la Chine
par la Tartarie à Olmuz & à Alep , de là à
Alexandrie, & enfin à Venife. Les portugais
rapportaient fur leurs vaiffeaux de la ville de
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Canton, qui eft un port célèbre où fe tientu n
marché de la Chine. Les égyptiens rapportaient
'aufli à Alexandrie par la Tartarie; préfentement
on nous l’apporte de Mofcovie, car elle croît
abondamment dans cette partie de la Chine, qui
eft voifine de la Tartarie.
Les petites variétés de couleur, qu’on trouve
dans la rhubarbe qui vient directement de Mofcovie|
d’avec la rhubarbe qui nous arrive par le commerce
des indes orientales, ne procèdent que de ce que
celle de Mofcovie eft plus nouvelle ; car elle prend
en la gardant la même couleur, la même confîftance
Sc le même goût que celle quaon reçoit par mer.
On a envoyé de Mofcovie en France une plante
nommée par M. de Juflieu rhubarbarum folio
oblongo, crifpo undulato, fabellis fparfis. Cette
même plante avoit déjà été envoyée du même pays
en Angleterre, pour être la vraie rkubarbe de la
Chine ; & M. Raud la tlomma lapathum bardame
folio undulato, glabro.
La manière dont cette plante fructifie fait juger
que c’eft une véritable efpèce de rhubarbe de la
Chine : car non-feulement elle a été envoyée pour
telle; mais encore les graines de cette plante * fem-
blables à celles de la vraie rhubarbe j que M, Van-
dermonde , dodeur en médecine, avoit envoyée de
la Chine ne .permettent pas d’en douter. Ajoutez
que la figure des racines de ces deux plantes, la
couleur , Fodeur fortifient cette opinion. On a
élevé la plante dans le jardin du roi à Paris où
elle réuflit, fleurit & fupporte les hyvers les plus
froids.
C ’eft une grofle racine vivace, arrondie, d’environ
une coudée fc plus dè longueur, partagée eu plufieurs
grofles branches qui donnent naiflance à d’autres
plus petites , de couleur d’un roux noirâtre en
rldéhors.
Lorfqu’on enlève quelques morceaux de l’écorce
on trouve la ftrbftance pulpetxfe de la racine, panachée
de points de couleur jaune fafranéje, à peu-près
comme dans la noix mufcade , dont le centre eft
d’une couleur de fafran plus v iv e , & d’une odeur
fort approchante de celle de la rkubarbe de la
Chine , que l’on apperçoit fur-tout vers Ton colet.
Lorfqu’on mâche celle qui eft nouvellement tirée
de la terre, elle a un goût vifqueux, mêlé de quelque
amertume qui affede la langue & le palais ; & Tur
la fin il eft gommeux & un peu aftringent.
Du,.fommet de la racine naîffent plufieurs feuilles
couchées fur là terre, difpofées en rond les unes
fur les autres. Elles font très-grandes, entières
yertes, taillées en forme de coeur, & preique en
fer de flèches, garnies de deux oreillettes à leur bafê
& portées fur de longues queues charnues,convexes
eudefidus. Elles fe partagent vers la bafe des feùiiles
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en cinq côtes charnues, Taillantes en deftous &
anguleufes. La côte du milieu s’étend dans toute
la longueur de la feuille ; les côtes latérales fe
répandent obliquement, fe partagent en plufieurs
nervures, & s’étendent de tous cotés jufqu’au bord
de la feuille, qui eft ondée & fetrt plifTée. L ’extrémité
de la feuille eft obtufe , & légèrement
échancrée; du milieu des feuilles s’élève une tige
anguleufe , comprimée, cannelée , haute d’environ
Une-coudée, garnie un peu au-deflus de fon' milieu
de quelques envelopes particulières qui l’entourent
par leurs bàfes , & qui font placées à des diftances
inégales , jufqu’à fon extrémité.
Les fleurs, en fortant de ces envelopes, forment
des petites grappes; chaque'fleur eft portée
fur un petit pédicule particulier , blanc & menu ;
elles font femblables à celles de notre rhapontique,
mais une fois plus pietites; elles n’ont point de
calice, & font d’une, feule pièce en forme de
cloche, étroites par la bafe, découpées en fix
quartiers obtus, & alternativement inégaux.
Des parois de cette fleur s’élèvent neuf filets
déliés aufli longs que la fleur, & chargés de fom-
mets oblongs , obtus & à deux bourfes. Le piftil
qui en coupe le centre, eft un petit embryon
triangulaire, couronné de trois ftigmates recourbés
& aigretés ; cet embryon devient une graine
pointue , triangulaire, dont les angles font bordés
d’un feuillet membraneux. Elle ppufle dans lé
printemps , fleurit au mois de juin , & les graines
muriflent au mois de juillet & d^août.
Telle eft l ’idée que l ’ancienne Encyclopédie ,
& les meilleurs botaniftes, oht donné jufqu’à ce
jour de l’arbre qui produit la rhubarbe de la Chine ;
mais de nouvelles recherches lèmblent avoir appris
que la vraie rkubarbe eft en effet le rheum pal-
matum Æ foliis palmatis aeuminaîis. L tnn. On prétend
même que cette dernière plante eft cultivée
avec fuccès depuis 176# dans le Palatinat-
Au refte, la racine de cette plante qui forme
la rhubarbe, eft fuffifamment connue dans le corn--
merce. Elle eft, comme Ton fait, d’un grand
ufàge dans la médecine & dans la pharmacie. Elle
doit être choifîe fraîche. Il faut fur-tout fe méfier
de celle qui eft attaquée: par les vers, à quoi elle
eft fujette comme les autres racines”en vielliflant.
Lorfqu^elîe eft altérée par les. piqûres des ver-
mifleaux, il y a des gens qui, pour rendre la rhubarbe
commerçable, ont la patience de bouchée
tous les trous les uns après les autres , en appuyant
fur les bords avec la pointe d’un couteau. Ils la
roulent enfuite dans' des poudres faunes en la
fecouant fortement, afin que la furface des morceaux
de rhubarbe puifle s’ufer, & en préfenter
urie nouvelle qui paroiffe n’avoir pas encore reçu
d’altération de. l’air ; mais , dit M. Baume le»
connoifîeurs. n’en font jamais les dupes ; en caffant