O R I G I N E t«4 C E T O U S L E S C U L T E S ,
tien« *t les Phéniciens ont, plus qu’aucun
peuple , dû communiquer avec
les Africains, par la navigation. Le
culte de leurs Talismans aura passé des
côtes de l’Afrique, dans l’intérieur des
terres, par le désir qu’a l’homme de
connoître l’avenir, ou d’avoir un médecin
et unGénie bien faisant, sousla protection
duquel il puisse se mettre. Tel
-était le serpent Agathodémou , adoré
en Phénicie et en Egypte.
Comme le serpent d’Esculape, le serpent
d’airain, que Moïse fit élever dans
le désert (i), avoit la vertu de guérirceux
qui étaient blessés. Il suffisoit pour celà
de regarder ce signe; car c’estle nom que
Moyse lui donne. Les enseignes des
G, ecs et des Romains (2) portoient souvent
l ’emblème du serpent, en mémoire
du fameux serpent Python , que tua le
Soleil, ou Apollon. Les serpens étaient
adorés sous le titre de génies tutélaires,
jusque« dans les glaces du Nord , de
même que dans les sables brûlans de
l'Afrique-. C’est l’idée qu’avoient d’eux
les peuples de Norvège, chez qui ce
culte étoit établi (3) ; car ces peuples
«voient aussi le serpent pour Fétiche.
On a deteiré dans la Lusitanie dé semblables
Talismans en bronze. Il n’est pas
étonnant de trouver jusques dans le
Nord le culte du serpent, puisque nous
y avons trouvé celui du boeuf Apis, sous
ic nom de Thor. Nous avons trouvé le
nom de ce même boeuf au Japon. Les
Japonois, ainsi que les Chinois, ont
aussi des idoles, ou images de serpens
ailés, à qui ils rendent un culte. On sent,
que le culte du boeuf et du serpent, consacrés
par les Orgies de Bacchus enGrèce,
où ces deux animaux s’engendrent, a
dû se trouver uni chez les.différens peuple
« où l’on retrouve le culte du boeuf.
Ci) Liv. des nombres c. 21. v. 8 Scc.
(2) Ifîdor. J. 17. c. 3.
£3) Oiaiîs magn. Epift. I. 3, p. 30.
(4) L’abbé Chape, voyage en Sibérie, p. 28,
(5 ) Erasm Steil. b 1. de antiq. Boruff.
{6) Sigifmond coram. aer. Mofeov.
On rencontre chez les Tartares Tun.
gnts des-idoles de divinités , entortil.
lees de serpens (4),
Les anciens habitans de la Prusse
adoroient aussi des serpens (S).
Les habitans de la Moscovie révé-
roient comme dieu le serpent (6).
Les peuples de Lithuanie (7) regar-
doient^ aussi les serpens comme autant
de Divinités;ils leur rendoient un culte
distingué, et chaque citoyen ne man-
quoit pas d’en nourrir dans sa maison
persuadé, qu’il y avoit dans cet animai
un genie tutéTaire. On leur immnloit
des coqs ; c’est-à-dire qu’on leur offroit
le sacrifice, que Socrate fit à Esculape,
On regardoit comme un grand malheur
pour une famille de n’avoir point
chez soi un pareil défenseur, et de lui
manquer de respect.
On ieurdressoit des tables, comme en
Egypte (8), et on les invitoit à s’y présenter.
lisse rendoient .à l’invitation,
montoientsurlatableet ils en redescen-
doient, pour se cacher dans leur retraite.
Les dévots s’empressoient de
manger les mets auxquels le serpent
avoit touché, èt concevoient les plus
heureuses espérances de cette faveur du
Dieu. Si le. serpent au contraire avoit
refusé d’y toucher , ©’est alors qu’on
redoutent les plus grands malheurs , et
le refus etoit regarde comme un présage
sinistre. C est ainsi que .nous vçyons
dans Virgile Enée , qui saerifie aux
mânes de son père , et un serpent, qui
sort du fond du tombeau (9) , vient
goûter les mets , et rentre ensuite dans
la tombe d’Anchise. Cet heureux présage
encourage Enée, qui fait aussi-tôt
le sacrifice des Suove-taurilies que
l ’on faisoit à Esculape dans la ville de
Titané (10).
(T) Idem de Samogit. Jul, Scalig. jdv. Card. exer.
183- Seét. 2. Alex. Guagi in Sarmat.
(8) Boxhor. io utii. hill, de lith, & Samogit.
(9) Virg. AEneid. I. g. y. 9;.
0 ° ) faufan. Coriath. p. gj.
' Let
t) U R Ê I, I G ï O N t ï
Les Turcs ont encore de là vénération
pour les serpetis(i), et on a même
cru , qu’ils leur àccordoiênttine place
distinguée dans la procession de la
caravaune devant le dais, qui doit Cour
i r le tombeau du prophète.
Le serpent adoré chez les Phéniciens
et destiné à représenter l’ame universelle
du monde, dont lé foyer d’activité
est dans le Soleil, étoit souvent représenté
avec Une tête d épervier. L-éper-
vier lui-même étoit consacré à Apollon
ou au Soleil. Il est dans les deux placé
sur la tête du Serpentaire ou de l’homme
qui porte le serpent , et qu’on appelle
Esculape , Cneph, ie Demioiirge, qui
organise toutes choses, ou Sërapis, dont
la tête est aux cieux et les pieds dans:
les abymes de la terre, comme nous
l’avons vu plus haut, dans les vers de
l’oracle rapportés par Macrobe.
- «Sanchoniaton(-2), rendantraison des
motifs qui firent déifier le serpent parles
Phéniciens et les Egyptiens , reconnoît
que ie-principe igné et spiritueux ,
c’est-à-dire le principe même, quicarac-'
térise le spiritus universel, lequel réside-
dans le feu Ether, fut un des motifs qui
fit ' choisir -ce symbole de la divinité.
Ils observèrent, qu’il se mouvoit par lui-
même ; sans pieds ni mains , et sans aucun
des autres organes',' qui font mon-
voirles autres animaux. Il présente par
le jeu. de ses anneaux plusieurs formes
diffé renies ., et , dans sa marche tortueuse
, il sait s’élancer avec toute la
force et la vitesse qu’il veut ; il vit
d’ail!- eurs fort long-temps , non-seulement
parce qu’il peut se dépouiller de sa
vieillesse et se rajeunir , mais encore
parce qu’il reçoit avec le temps de nouveaux
accroissemens de force et de
vigueur. C’est alors qu’enfin , après un
certain période de temps , il se résoud
en lui-même de nouveau, comme Thaut
l-assure clans ses écrits sacrés. C ’est pourquoi
cèt animal est ordinairement emfi)
De Taw recher, sur les Egyptiens & les Chi-
ûois 1,1. p. n£.
Relig, Uni?. Tome II.
N Ï V Î E l l S E h L È . i65
ployé, comme symbole religieux, dans
les sacrifices et les mystères.
Il a un caractère d’immortalité, puisqu’il
se résout en 1 ui-m ê meet qu ’il ne périt
point de mort naturelle, mais seulement,
lorsqu'il a reçu quelque blessure violente.
Les Phéniciens l’ont appellé Agatho-
Démon ou bon Génie , et les Egyptiens
le DieU Cneph. Ils lui adaptent une tête
d’épervier, à cause de la qualité active
de cet oiseau.
Je n’entrerai pas dans l ’examen des
principes physiques bons ou mauvais,
mis en avant dans cette explication de
l’origine du culte des serpens, consacrés
dans les mystères. Il est possible , que
certaines qualités, qu’on remarque en
eux, les aient fait- choisir, comme symboles
de quelqueopérationdela nature,
du mouvement des astres et de la marche
oblique du Soleil dans le ciel, ouducours
tortueux duNil sur la terre, et qu’ils aient
été placés ensuite au rang des constellations,
souslesquelles tel ou tel phénomène
arrivoit. Au moins il est certain, par ce
que nous avons dit jusqu’ici, que le ser-
penrétoit déjà placé aux cieux, comme
symbole astrologique , lorsqu’on l’unit
aux statues du Soleil dans telle ou telle
saison , et qu’on transporta son image,
soit animée, soit inanimée , dans les
temples , que les anciens adorateurs du
Soleil élevèrent à cet astre. L’unioh de
l’épervier au serpent d’Ophiucus ou le
symbole , composé de l’union des deux
constellations,avec lesquelles leSoleilest
en conjonction dans le s’gne d’automne,
telle"que le mouvement de la Sphère la
ramenoit tous les anS, suffit pour prouver,
que c’est cet aspect céleste des deux
Paranatellons simultanés, qu’on a consacré.
On peut jetter un coup-d’oeil sur
notre Planisphère , destiné à expliquer
les voyages d’Osiris , pour juger que
c’est ccl% qu’on a voulu peindre. -Notre-
Planisphère des Argonautes, et sur-tout
celui de l’Apocalypse , prouvent com-
(2) Eufets priep. ev. I. i.e. 10.
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