clins veut, que ce soit la princesse Ein sa
fille , qui se charge du soin de ces deux
enfans , dont l ’un meurt & l’autre est
sauvé & croît bientôt sous le nom du
jeune Bacchus. On voit ici une allusion
marquée à la révolution finissante &
à la révolution renaissante. Des serpens
entourent leur berceau & une Panthère
les allaite. Il s’agit ici des constellations,
qui annoncent le soir par leur lever
la fin de l’ancienne révolution, & le
commencement de la nouvelle. Ces constellations
sont le Serpent d’Ophiucus, le
Dragon des Hespérides , &la constellation
du Loup placée plus au midi , &
qui monte en même temps qu’eux sur
l ’horison. Cette constellation s’appelle
tantôt le Loup , tantôt la Panthère (1), .
suivant la différence des animaux qu’on
y a figurés. Son nom générique est la
bête féroce, que perce le Centaure. Ici
c ’est une panthère. Dans la fable d'Ofi-
r is , c’est un loup; comme nous l’avons
vu plus haut,à l’article d’Isis. C’est sous
la forme de cet animal, qu’Osiris ou
Bacchus revient des,enfers ; pour combattre
avec Orus ou Apollon. C’est par la
même raison, qu’ici où l ’on ne parle pas
de résurrection de Bacchus , mais bien
de naissance d’un nou veauBacchus, c’est
le même animal, qui vient pour l ’allaiter
y comme Romulus & Remus le furent
parunelouve. Du reste l’idée mystagogi-
que, qui fait ressusciter Osiris sous iafor-
me de cet animal, & celle qui fait naître
un nouveau Bacchus, que ce même animal
allaite, sont absolument la même '
chose. Nous avons donc projeté la constellation
du Loup au mêmeendroitdeno-
tre planisphère, tant dans celui qui contient
le ta bleaudes courses d’Isis,que dans
celui quicontient celles deBacchuS;iBccetfe
place estpiès du Taureau, aux limites mêmes
de l ’équinoxe de printemps. Ilnousa
servi aussidansle pîaïiisphèred’Osiris : il
y donne ses formes à Macédon, un des fils
d’Osi ris. Nousl’avons placé ici vers l’autre
équinoxe , pour éviter la confusion.
Nous avons aussi projeté dans notre
planisphère le fleuve Eridan, qui achevé
de se coucher en ce moment, & qui
nous donne le mot de l’énigme d'Aura,
laquelle se jette dans un flèuve , et qui est
ensuite métamorphosée en fontaine. L’apothéose
de Bacchus est une suite naturelle
de l ’achèvement de la révo-
ution solaire , & se trouve amenée
par le retour d’un nouvel ordre de choses
& d’un nouveau soleil de printemps ,
désigné sous le nom d’un nouveau Bacchus,
confié à Minerve , mere d’Erichto-
nius ou du Cocher placé sur le Taureau ,
& quiparson levèr ouvre la nouvellepé-
riode. C’est ainsi, que l ’apothéose d’Hercule
arrive au moment où il a fourni la
carrière des douze travaux, (ta) et où il
a été brûlé par la robè teinte du sang
du Centaure. Alors il épouse Hébé& acquiert
dans les cieux une nouvelle jeunesse
, avec une nouvelle révolution.
Alors aussi le vieux Bacchus monte
aux ciettx, & se trouve remplacé par le
fils du Zéphyr ou d’ dura, qui devient
un troisième Bacchus et qui en porte le
nom.
Bacchus va siéger à la table des dieux,
à çôté de Mercure fils d’une des étoiles
placées sur le Taureau , ou d’une
des Pléiades, astres qui annonçaient
alorsle printemps &la nouvelle révolution.
Il est placé sur le même trône
qu’Apollon , ou que le Dieu Soleil, puisqu’il
est effectivement le soleil , mais
considéré sous un certain rapport ,
comme nous l’avons fait voir au commencement
de ce chapitre.
On voit donc que N on nu s , en finissant
son poëme , ramène son héros au
même point du ciel d’où il l ’a fait par
tir; c’est-à-dire au Taureau céleste , qui
renferme Thyonésa mere, & les Hyades
ses nourrices, à ce Taureau , qui joue un
si grand rôle dans l ’aventure de Cad-
mus; dont le récit fait une partie considérable
des premiers chants du poëme.
On voit aussi, que le Taureau étant le
Oj Riccioii. p. 126. Martian Cape!!. 1. 8. (1) Joannes Diacon. Scholiast. Hefiodi p. 165.
si nue équinoxialdeprintemps, àl’époque
; ou fut créée cette fiction, le Solstice ëtoit
occupé parle Lion, & que ce poëme, dans
[son origine , remonte au mêrnesiècle où
l’on chantoit les travaux du même dieu-
Isoleil, sous le nom d’Hercule. L ’Héra-
cleide & les Dionysiaques ont donc le
même héros pour objet, & supposent la
même position des cieux ; c’est-à-dire ,
[que Ces poëmes donnent l’état du ciel ,
■ tel’ qu’il étoit plus de deux mille cinq
[cens ans avant l ’Ere chrétienne. Donc
[ce voyage de Bacchus ressemble ' aux
[courses d’Hercule, les combats de l ’un
[aux travaux de l’autre, Sc l ’explica-
[tion Astronomique,que nous ayons don-
[née de lTIéracleide & des Dionysiaques
lest également complette. Dans l’un de
[ces poëmes, nous avons vn les effets de
[la force du Soleil ; dans l ’autre ceux
[de sa bienfaisance ; dans l’un, la génération
du temps ; dans l’autre, celle des
[productions de la terre , & l ’action de
[cette force solaire,qui se développe dans
[les fruits, & qu’on appelloit, souscerap-
[port Bacchus, nous ditEusébe(i). Aussi
Iles hymnes adressés â Bacchus sousjdiffé-
irens noms, dans les vers d’Orphée, leur
[ont bien conservé tous ces caractères.
| Il y est peint, (2) tantôt habitant dans
[l’obscur Tartare , & tantôt remontant
[vers l’Olympe, pour y mûrir les fruits ,
[qu’il y a fait éclore du sein de la terre.
[Né des amours de Proserpine, ce dieu
[prend toutes les formes, alimente tout,
[voit tour à tour s’alluiner&s’éteindreson
[flambeau dans le cercle périodique des
[saisons. Il fait croître la verdure. On lui
[donne l’épithète du Génie très bon &
[tres-bienfaisant ; ce qui est nn attribut
Icaractéristique du bon principe. Dans
un autre hymne, on l ’appelle le bon
astre , le Génie de bon conseil, fils de
J Jupiter & de Proserpine (3 ). On lui
[dit, qu’il aune face de Taureau & le
[front armé de cornes. On l’invite à être
L <i) Eufeb. præp. !, 3. ch. 11,
[ (2) Poct Gr.vc. p. çij,
| 13) Ibid- p. 508-
i f ) Ibid- p. j n .,
95
propice, lui & ses nourrices. Dans un.
autre hymne, on invoque aveçses nourrices
ou aveclesHy adéS Io o 11 Ifis sa mere.(4)
Dans un autre, il est peint sous lés formes
d’un- taureau qui souffle le feu(5), ôc on
l’appelle le dieu aux mille noms. Ailleurs
ou lui dit, que c’est lui qui fait croître
les Fruits(6). On lui donne en.conséquence
l’épitliète de fructifier. Tous ces
traits, épars dans les hymnes attribués à
Orphée , conviennent admirablement
au dieu soleil, tel que nous l ’avons considéré
dans ses rapports , soit avec les
foi mes Astronomiques , soit avec l'a végétation
&avec les effets produits ici bas
par sa chaleur.
Voilà donc encore un héros fameux
dans toute l ’antiquité par ses voyages
& ses conquêtes dans ' l’Orient ,
qui se trouve n’avoir jamais existé ,
comme homme, quoiqu’en dise Cicéron
(7), & qui n’est que le Dieu-soleil
personnifié & peint sous les traits d’un
conquérant, dont l’Orient, où il semblé
naître , a ressenti les bienfaits & la
puissance. Voilà toute son histoire réduite
à un poëme allégorique sur le soleil
, & sur ses rapports avec la marche
de la nature & de la. végétation annuelle
, à partir du point où elle commence
à se développer; c'est-à-dire , de
l ’équinoxe de printemps, autrefois occupé
par la constellation du Taureau.
Voilà donc encore nos érudits anciens &
modernes en défaut & une grande erreur
reconnue danslafoulede celles, qui souil-
loient les annales du monde , sur-tout
dans la partie religieuse , presque toujours
mensongère. Qu’on ne dise pas,
que Bacchus n’a pas eu jusqu’à ce jour
une existence historique dans l’opinion
des siècles , & que l’âge où il a vécu
ne fixe pas une de nos importantes époques.
Il suffit de lire les anciens historiens,
(8) pour trouver une foule de passages,
où l’on célèbre les conquêtes de
{5') Ibid, p. 512.
(6) Ibid- p- 513.
OzJ Cicero. Tuscuf. I.1. c. 13 de Nat. Deox, 1. 3 ç. ia
\ Jui ûrm, de prçf. err. p. 17.