
 
		Bacchus  clans  l’Inde  ,  comme  on  célèbre  
 ceilesd’Osiris 6c de Sesostris. Alexan-  
 dre-le-Graiid ,  dans  sa conquête de l ’Inde  
 (  i  )  ,  annonce  qu’il  marche sur  les  
 traces de Bacclius, & il cherché  à  imiter  
 cet  ancien vainqueur des Indes dans son  
 triomphe  tout-à fait  bacchique  (2).  Les  
 villes principales  de l lnde conservoient  
 encore  des  traditions sacrées,  qui  leur  
 rappelloient  la  naissance  6c les exploits  
 de  ce héros,  devenu  célèbre  en  Orient  
 par ses  bienfaits  (3).  La  Grèce  le  fai-  
 soit naître de  Sémelé  ,  fille de Cadmus ;  
 & le-siècle de Cadmus  qui, dit-on, porta  
 les lettr.esen Grèce, est une époque chronologique. 
   Bacchus fut  rival de Persée;  
 il  épousa  Ariadne ,  -fille  de  Minos  &  
 amante de  Thésée. Or Persée  , Minos &  
 Thésée ont été  regardés  comme de véritables  
 hommes  ,  qui occupent une place  
 dans  l ’histoire,  & qui fixent des époques  
 chronologiques. 
 Il  est  vrai néanmoins , que  plusieurs  
 auteurs  ont  révoqué  en  doute  la  plupart  
 des  circonstances  de cette  histoire  
 merveilleuse  d’un  conquérant  qui,  le  
 Thyrse , &  la  bouteille à  la main  ,  accompagné  
 de  danseuses. ,  fait  la  conquête  
 de l’Asie. Strabonprétend (4), que  
 les voyages dTIercule 6c de Bacchus dans  
 les Indes , ne sont que des fables récemment  
 inventées.  Il  y  a une partie  vraie  
 dans  cette  opinion  ;  c’est  que  ce  sont  
 des  fables  ;  mais; ce ne  sont pas  des  fables  
 récentes  -,  au  contraire  elles  font  
 partie  de  fictions, qui  remontent  à  la  
 plus  haute  antiquité. Le même  Strabon  
 dit  ailleurs, (5 )  qu’il  n’y  avoit  guères  
 que  Megasthène  &  un  petit  nombre  
 d’auteurs,  qui  crus.-ent aux expéditions  
 de  Bacchus  6c  d Hercule  ;  que  le plus  
 grand  nombre  ,  6c  entr’autres  Eratos-  
 thène  les  mettoient  au  rang des  autres,  
 fables  que  débitoit  là  Grèce. 
 L ’Abbé Mignot  ( 6 ) ,   dans  l’examen 
 (\)  Arrian.  I.  .6*  p.  I 43** 
 (a )   Quintcurt.  I.  9-  c.  25— 35.  8.  c.  33. 
 (3 ) Arrian de reb. indic.  p.  172.— id.  de exped. Alex. 1.  5 p. ïo l  Philosfr.  vit*  Apollon  1- 2.c.  5, 
 (4)  Strabo.  L  11.  p.  105. 
 qu’il  fait  des divers  systèmes d’explica-  
 tions  ,  que  l ’on  donnoit de  la vied’Osi-  
 ris,  le  même  dieu  que  le  Bacchus  des  
 Grecs  ,  nous  dit  que  les  prétendus  exploits  
 de  ce  héros  dans  l’Inde  ne  peuvent  
 se concilier  avec aucun  de  ces  systèmes  
 ,  6c  qu’il faut  réduire  toutes  ces  
 aventures  à une pure Mythologie,  dans  
 laquelle  les  prêtres  Egyptiens  auront  
 caché,sous  le voile del’allégorie,  quelque  
 vérité  phyfique  6c  Astronomique.  
 Cette  vérité  phyfique  ôe Astronomique,  
 nous venons  de  la  développer ,  de manière  
 à ne plus laissér  ce doute sur cette  
 allégorie,  qui  rentre dans la  nature  de  
 toutes  les  autres.  L ’abbé  Mignot  fait  
 voir,  qu’il règne  la plus grande  incertitude  
 (7  )  sur  le  temps  ou  a  vécu  Bac-  
 chuSjSur  sa patrie 6c sur tous les événe-  
 mens  de  sa vie.  Cette  incertitude même  
 devoit inspirer de la  défiance à ceux  qui  
 étoient  tentés  d’en faire  un  héros 6c  un  
 prince ; ôc à  voir dans ses aventures  une  
 histoire réelle. M. de-Paw (8) a très-bien  
 apperçu, qu’on  ne devoit y voir  qu’une 
 fable Cosmique ,  lorsqu’il dit  : --- l ’expedition  
 d'Osiris , qu’on sait  être  le même  
 que  Bacchus  , n’a rapport  qu’au  cours  
 du soleil 6c  aux différens  effets  produits  
 par la chaleur  de  cet  astre.  Cette  proposition  
 est  vraie  ;  mais  elle  avoit  besoin  
 d’être  prouvée  par  l’explication  
 même  de  cette  aventure ,  par l ’inspection  
 de  la  marche  du  soleil  dans  les  
 deux.  La  difficulté  étoit  là  ;  6c  nous  
 croyons être le premier, qui ayons donne  
 la  solution  du  problème. 
 Le  savant Freret  ,  dans  sa défense de  
 la chronologie ,  a bien reconnu  qu’Hercule  
 6c  Bacchus  étoient  des  divinités  
 Demiourgiques,  6c des dieux du premier  
 ordre ( 9 ), qui  étoient  tels  par leur  nature  
 , & qui tenoient âTessence de l’ame  
 du monde.  Ce  savant prétend que  l’hits 
 (g)  Strabo.  I.  15. p. 8 7 -7 12 . 
 (6)  Acad. Inscrip.  t.  1  ,p.  156. 
 (7 ) Ibid.  p.  164.. 
 fS ) Réch e relues sur les Egyp. et les Chia. t . 1  p* 380. 
 (9)  Défense  de  la  cronolegie.  p.  317* 
 toire 
 toire du  Bacclius Egyptien  & Phénicien  d'étoiles ,  auxquels  correspondent ( 2  )  
 ne fut  jamais  celle  ni d’un homme ,  ni  dans  l ’air  des  phénomènes  météorolo-  
 d’un  héros  apôthéosé.  (  1  ).  Il  avance  giques , &sur  la  terre  divers  états de  la  
 même & avec  beaucoup  de  raison,  que  végétation, ôc  des opérations  variées de  
 le Bacchus Grec n etoit pas non  plus  un  l ’agriculture ,  a  pu  être  embelli  par  la  
 personnage  historique  ni  un  héros.  Il  broderie poétique ,  au  point de  devenir  
 ajoute  que ( 2) la  description , que tous  un  poëine  de  longue  haleine ,  plein,  
 les  anciens,  poëtes  font  de  l’armée  de  d'images, de descriptions,  &c.  de mou-  
 Bacchus ,  composée  de  Ménades ,  de  vements  intéressants.  Tout j   prend la  
 Bacchantes  échevelées , de Pans, d'Fgy-  vie ,  le  sentiment ôc  les  passions douces  
 pans ,  <Sc  de Satyres armés  de  Tiiyrses,  ou  fortes , de il n'est pas  j usqu aux êtres  
 n'offre  que  le  tableau des-fêtes  qui  se  moraux, qui ne figurent  sur  cette  scène  
 célcbroient en honneur de ce dieu. Mal-  epico-dramatique.  Lés  derniers  chants  
 gré cette  assertion ,  dont la vérité m’est  du  poëtne  ,  qui  comprennent^ la  qua-  
 connue ,  Fréret n'ayant  point  explique  ttieme saison ,  forment une  suite  àsse^z  
 les  fictions  sur  Bacclius,  ce  prétendu  frappante, pour ne pas permettre demé-  
 héros  est  toujours  resté  eivpossession  connoître  cette  fécondité  clu  génie  des  
 de son existence historique  , Ôc la même-  poëtes sacrés,qui nous ontlaisseces mo-  
 Académie(3),quiimprimoitlesmémoires  numens de  la haute antiquité.  La seule  
 de Fréret  sur Bacchus , imprimoit aussi  aventure d Aura  ou du  Zéphyr  printa-  
 ceux de Bannier , qui fait de Bacchus un  nier  ,  dont  Bacchus devientamoureux  ,  
 personnage  historique  ( 4 )•  Fréret lui-  ôc qui  termine sa  course par  son retour  
 même,quine croit pas à l'existence d’Her-  au point  équinoxial,  en  est  une  preuve,  
 cule ,  comme homme  ou héros ,  croit à  C est  ainsi  que  le  genie  créateur  des  
 celle de Clairon, qui lui donne l'hospita-  poëtes.,  aved de tres-petits  elemens  , or-  
 lité.  Les anciennes  chroniques  fixoient  ganise  unpoëmc  immense dans ses  dé-  
 l ’âge où  il  avoit  vécu.  (5)  On montroit  tails. A  ces  -reflexions  sur  la fécondité  
 en Laconie unlieuappelléles Jardins.de  du genie poétique des anciens^, nous en  
 Bacchus ( 6 ),  ôc on disoit que'c'étoit là  ajouterons  une  sur  la  coïncidence  de  
 qu’Ino  satante  l ’avoitnourri.  Toutprès  tous les poëmes, avec une meme époque  
 étûitle temple d’Esculape ou de Cadmus.  de temps ou ils  furent  faits.  On  voit en.  
 On montroit aussi  l’antre  où  fut nourri  effet encore ici,  que le Taureau  étoit  le.  
 Mithra ôc la crèche de Bethléem; car l'his  point de  départ & de retour ,  ou le cora-  
 toire  religieuse de  chaque peuple  a  ses  mencement & la fin de la révolution  du  
 monumens.  Mais  si  l'histoire des hom-  soleil,  dans son mouvement  d un  equi-  
 mes perd un"de ses  héros dans Bacchus,  noxe de  printemps  au  même  equinoxe  
 l’antiquité Poétique gagne de son côté,&  de l'année suivante. Donc le Lion occu-  
 recouvreun des plus beaux monu mens de~:  poit le Solstice d été, comineTl est censé  
 son génie.  Ce  nouveau  poëine  nous ap-  l ’occuperdanslepoëmesurHercule &sur  
 prend  à  juger  de  son caractère  origi-  -  ses  douze  travaux; Donc  ces deux  poë-  
 nal, «Sc  nous donne la mesure de  l’éten-  mes  remontent  à  la même antiquité  &  
 due des élans de la poésie.  On voit com-  conséquemment  concourent  à  établir  
 ment ùn  cannevas aussi simple, que l'est  1 existence  d un  ^siecle  de  lumières,  
 un  calendrier  rustique  ,  tel  que  celui  dans 1 Europe et 1 Asie, ou les prêti es de  
 de Coluinelle,  dans  lequel les mois sont  toutes  les  nations  peignoient  ôc  clian-  
 marqués  par  des  levers  ôc  des couchers  toient  la  nature  ,  ôc  consacroient  ces 
 (ï)  P.  318.  ^4)  Explic.  des fab.  t.  3 p.  66. 
 (2) P-  321.  '  (5)  Clém.  Aiex.  Strom*  J.  j , pi 322. 
 Gp  Acadétn»  Inscript,  t.  23  p»  243.  i   ■ ’*  ^au^‘  ^,aeo^1, P*  10^   , T 
 lte/igr.  Ifniv.  Tome  ÏI* ■  ^