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T O M E S E C O N D .
(a) VJuAND on a peint le Soleil avec les formes
d’un beau jeune homme, à tête rayonnante, qui
tient l’arc et les traits ; et Diane avec celles d'une
jeune Chasseuse, qui a sur sa tête un Croissant,
on n’a gu ères été trompé, et on a reconnu ces Divinités
sous ces costumes, sou* ces noms. Pourquoi
donc l*a-t-on été, sous ceux de Bacchus, d’Her-
cule, de Thésée , de Jason , de Christ, etc. ?
Est-ce parce que les Légendes et les formes
mystérieuses ne sont pas lés mêmes; et qu’une
tête ornée de rayons ou d’un Croissant est un
attribut moins savant, que les cornes du Taureau
Equinoxial, ou la peau du Lion, signe
Solstitial ?
(b) Strabon, I. 15 , p. 687, dit que la pîûpart
des Historiens ont regardé les aventures d’Hercule
et de Bacchus, cornai® des fables. Les Macédoniens
cherchèrent inutilement dans l’Inde les colonnes
, qui marquoiént le terme des expéditions
d’Hercule et de Bacchus , ( 1 ) . On leur montra
quelques endroits, qu’ils prirent pour le lieu, oh
avoient été ces colonnes, par les liaisons qu’ils
. crûrent y appercevoir avec les traits de la vie
de ces Héros. Àrrien, dans le récit de l’expédition
d’Alexandre, parle de la guerre que Bacchus
fit aux Indiens. Mais on ne sait, dit Eusthate ( 2) ,
dans son commentaire sur Denis d’Alexandrie ,
qnel 'est ce Bacchus. Car il «e paroit pas facile
d’attribuer cela à Bacchus le Thébain., fils de
Sémélé, fille de Cadmus , ni au Bacchus Athénien,
fils de Jupiter et de Proserpine, honoré dans
les mystères; ni à aucun autre Bacchus, qui se
soit-rëvêtu des armes de Mars.-
(c) C’est ainsi qu’on a rajeuni les mystères de
Mithra, en Judée, et qu’on a fait croire aux
premiers Juifs , initiés à ces mystères, que Christ
étoit né chez eux. Ces traits d’imposture sont familiers
aux Peuples, et s'accréditent facilement,
sous le voile du mystère, et sous la sauve-garde
de l’ignorance et de la crédulité.
(i> Strabo, ibrd. I. 3 , c. 17t.
(a) Eusth. ad Oionys. v._n6y..
i(à4)) PSolufitn. . Qpu. æ4s1t.. Rom. p. vjnï
(;) Horace, 1. a, od, 16> y. 24—30,
(d) Il est à remarquerque la Thèbes ( 3 )
Grèce se vahtoit d’avoir donné naissance à Bac-
chus et à Hercule , c’est-à-dire , aux mêmes Divinités,
qui étoient- adorées- à Thèbes en Egypte.
Bacchus étoit le Soleil équinoxial du Printemps,
peint avec les attributs du signe du Taureau *
comme Hercule étoit le Soleil du Solstice d Eté ,
peint avec ceux du Lion célest®. Aussi Bacchus
' et Hercule, chez les Romains, étoient pensés des
Divinités de même nature, et il falloit etre en
plein air, et en quelque sorte sous les rayons du
Soleil, pour jurer par l ’un ou par l’aiitre (4 )*
J’ajouterai, qu’il prenoit aussi, comme Hercule,^les
formes du Lion Solstitial , domicile du Soleil. C est
ainsi qu’Horace (5) le peint, dans son triomphe su*
les Géans. Comme Hercule, il brava Cerbère.
(e) Les Romains ont une fable à-peu-près semblable
sur leur Romulus , fils de la vestale Rhea,
princesse du sang des rois d’Albe, et du Dieu
Mars; laquelle devenue grosse, crut , dit-on,
cacher sa faute, en rejétant sur un Dieu î outrage
fait à sa Virginité. La fable de Christ et de Marie
suppose aussi l’intervention de la Divinité, au
25 du mois consacré à Mars.
t (ƒ) Pausanias (6) observe, que Bacchus étoit
singulièrement honoré chez fes Eleens, peuples
qui prétendoient tirer leur nom d’un fils du Soleil
(7 ) . C’éfoit là qu’il fâisoit dés miracles,, et
sur-tout celui du vin , qui tout-a-coup venoît
remplir des coupes hermétiquement fermées (S).
A Pellène, en Achâïe,’ on célébroit des fêtes
nocturnes, en honneur de Bacchus , a la lueur
des flambeaux, que l ’on pôrtoit à son temple , et
on plaçoit des coupes de vin dans toute la ville
( 0 ) . Pellène tiroit son origine de Pallas, un des
Titans ; d’autres disent de Pellène, fils de Phorbas >
ou du Serpentaire,-qui tient le fameux Serpent ,
dans lequel en Automne s’entortille Bacchus ou
le Soleil, lorsqu’il descend aux régions inférieures
du monde.
(6) Pausan. Heliac. a , pi 204*
(7) Ibid. p. 148.
(8) Ibid. p. 204.
(9) Pausan, Ach, p. 23$.
T
(g) Ôgygia me Bacchum vocat,
Osirini Ægyptics putat.
Mysi Phanaean nominant.
JDionysumIndi existirnant.-
Romaria sacra Liberum.
Arabica gens Adoneuni.
Lucanicus Pa/ithcurn.
(h) A AEgine ( 1 ) , on trouvoit trois Temples
près l’un de l’autre. Un étoit consacré à la Lune
ou à Diane; lès deux autres au Soleil, sous les
deux noms d'Apollon et de Bacchus. La, statue
d’Apollon étoit nue, celle de Bacchus couverte,
et il avoit de la barbe; et tout près étoit le
temple et la statue d’Esculape, où. du Dieu-
Soleil d’Automne , qui, sous les noms d’Esculape,
de Sarapis, et de Bacchus , prend les
formes du Serpent. -Comme on voit Bacchus
barbu , on voit aussi Bacchus enfant ( 2 ) , en Elide
et chez les Lacédémoniens ; il étoit porté par le
Dieu Mercure, qui préside au signe de la Vierge
ou à cette fameuse Cérès, dont on fait quelquefois
Bacchus fils, et à laquelle on l’unit presque
toujours dans les mystères. On trouve aussi des
Bacchus sans barbe ( 3 ) , et sous les traits de
la jeunesse. Comme Janus Quadrifrons avoit douze
autels représentant les douze mois, on voit aussi
douze autels élevés à Bacchus et à sa mère, par
ses tantes Ino, Autonoë et Àgavê (4.).
(h) C’est dans ce sens, qu’il faut entendre le passage
d’Hérodote (5)» lorsqu’il nous dit, que les
Egyptiens pensèrent que Bacchus et Céiès pré-
sidoient aux enfers, ou aux régions inférieures du
monde. Cette idée physique fut ensuite transportée
dans les mystères, ou dans la théorie mys-
tagogique sur les âmes.
(i) Dans la fable d’Esculape, elles sont mères
du Serpentaire; car Coronis, une des Hyàdes ,
est censée mère d’Esculape ; chacun à son tour.
C’est ainsi que dans les mystères de Bacchus, on
enseignoit, que le Serpentaire ou son Serpent: étoit
fils du Taureau , et réciproquement que le Taureau
étoit fils du Serpent. En effet, si le Taureau
et les Hyades font lever le Serpentaire par leur
coucher, le Serpentaire réciproquement Jes fait
lever aussi par son coucher. Ils sont donc pères
et enfans les uns des autres , puisqu’ils se donnent
réciproquement naissance. Bacchus passoit, comme
.Esculape,'pour un. Médecin ( 6 ), et. Ië Dragon
ou Serpent lui étoit consacré, comme à celui-ci.
Esculape et Bacchus sont souvent Unis, et on
(1) Pausan. Corinth. p. 72.
(2) Ibid. Lacon. p. 93. Heliac. 1, p. 164, ,
(3) Ibid. Ach’. p: i jo'. *
, (4) Thepcr, Idyll. 26,., tv., 5.
Hferdà:' 1. '2,'c.' 23.' u>
(6) Plut. Syhip. 1, 2, p. 647—653,
voit ensemble leurs statues (7 ) . L’un et l ’autre;
sont le Soleil, comme on le verra à notre article-
Esculape. Le Serpentaire étant Cadmus, on voyoit
en Béotie la statue de Cadmus et celle de Bac-’
chus, surnommé Cadrnécn ( 8 ). D'est ainsi que ,
dans la citadelle de Carthage, appelée Cadmca,
on trouvoit le temple du Serpentaire, Esculape»
En Phocide, à Ophitée ( 9 ) , ville qui prend son
nom d’Gphis, ou du Serpent, on célébroit les
Orgies de Bacchus. Il étoit réputé tout-à-la-fois
devin et médecin, comme Esculape , et U don-
noit des avis sur la santé , par la voie des songes ;
ce qui étoit pareillement usité dans les temples
d’Esculape et de Sérapis ou du Serpentaire. On
faisoit aussi sur cette ville un conte , dans lequel
le Loup et le Serpent, qui sont dans les
Cieux avec le Serpentaire , jouoient un grand rôle»
On sait pareillement, que les Thyades, dans la
célébration des fêtes de Bacchus, entrelaçoietit
leurs cheveux de Serpens, en hurlant ce mot,
Eva, qui signifie Serpent ( 1 0 ) , et qui est le
nom du Serpent du Serpentaire, que les Perses
appellent Serpent d'Eve. Ils invoquoient, dit Clément
d’Alexandrie, cette Eve, qui a introduit le
mal dans le monde. Nous ferons usage de ce
Serpent, dans la fable d’Adam et d’Eve; ainsi Clément
a dit vrai:, sans s’en douter. Il remarque ,
avec raison, qu’Heva est le nom du Serpent femelle,
en Hébreu. Le Rhéteur Aristide commence
l’éloge de Bacchus par une invocation , dan9
laquelle il unjt Apollon et Esculape à ce Dieu
( 11) , tous trois étant Dieux' de la Médecine,
et tous trois unis au Serpent. Car Apollon tue
le Serpent Python, le môme qui est au P ô le ,
et qui sa lève avec celui d’Esculape.
On observera, que l’union du Soleil au Serpentaire,
soit Çarnobuta, soit Triopas, placé aux
Cieux par Çérès, avoit lieu en Automne, à l ’époque
du labourage .et des semailles, au lever des
Pleïades. Gôrmanicus César fixe, au huit des Ides
d’Ôctobre , le lever de la Brillante de la Couronne,
placée, sur le Serpent du Serpentaire, et au trois
le lever du soir des Pleïades. Or les Pléiades se
lèvent le soir, suivantThéon (p. 135), lorsque
le Soleil est/au Scorpion ; conséquemment ^ à
l’époque du labourage, suivant l’observation du
même Theon.
Les Chinois ont leur Dieu Chin-nong, qui fut
conçu par un miracle II naquit ayant le corps
d,un homme et- une tête de boeuf (12 ). D’autres
livres lui donnent des yeux de Dragon. Il fit une
charrue, comme Osiris et Bacchus, efeommença à
labourer là terre. Il semoit après la pluie, et
(7)- Pausan. Mess. p. 144.
(8.) Ibid. Bæot. p. 291.
(9) Ibid. Phoc. p. 352.
(i©) Cléfoi. Adm. ad Genf» p. 9.: ,
(U) Arist. Rhet. t. 1. Orat. 4.
(12) Mém. sur les Chin, par les IWiss.’cle Pékin, t. 1, p. »03,