monumens ingénieux & savans,dont
leurs tableaux , leurs statues & leur
Mythologie nousont conservé les traces.
Nous finirons tout cet article par une
courte récapitulation de notre travail
sur Bacchus. Nous avons d’abord cherché
à établir, qu’il étoit le soleil , & le
soleil considéré dans ses rapports d’astre
bienfaisant, qui verse la chaleur dans
la matière, & l’esprit de vie dans les
fluides, qui circulent dans les plantes &
dans les arbres , & par lequel se consomme
le grand ouvrage de la végétation.
Nous avons rassemblé toutes les
autorités, qui se réunissent à prouver
que Bacchus est le soleil ; & cela par des
textes formels & suivant une marche
directe. Nous y avons aussi joint les
preuves-indirectes, tirées de son identité
avec d’autres divinités, telles qu’Ofiris ,
que nous avions déjà prouvé être le Soleil,
telles qu’Apollon, qui a étéreconnu
par tout le monde , pour être le dieu
Soleil. Nous l’avons vu, comme ces deux
divinités , présider au choeur des Muses,
quiformentincontestablementle cortège
du dieu soleil Apollon ; celui d’Osiris
& d’Hercule, que nous savions déjà
être le soleil. Nous y avons joint une
foule d’autres preuves de ce genre qui ,
pour être indirectes , n’en sont pas
moins fortes, sur-tout ajoutées auxpre-
mièrés. Cette vérité bien établie , nous
avons tiré cette conséquence necessaire
, que toutes les légendes , tous
les poèmes, qui ont pourobjet Bacchus ,
n'ont que le soleil pour objet. Donc c’est
dans les cieux que nous en avons cherché
& dû chercher l’explication. Nous
avons vu , que toutes leurs discordances
se concilioient, quand on les rapportent
au ciel , & qu’on cherchoit l’origine
lies traits de la fiction dans les figures
dès constellations. Cette vérité a
reçu le plus grand jour dans notre explication
du poëme de Nonnns , qui présente
' un ensemble parfait & un
accord surprenant avec la marche
du soleil & des saisons. D’où il est résulté
cette conséquence , que si nous
avions conclu que ce poëme étoit un
poëme solaire , parce que Bacchus étoit
le soleil , on pouvoit aussi également
conclure, que Bacchus étoit le soleil,
parce que le poëme fait sur Bacchus
s’expliquoit par le soleil , & ne pouvoit
s’expliquer que par lui. C’est une double
maniéré de prouver , que Bacchus
est le soleil, & que le poëme des Dionysiaques
est un poëme sur cet astre. ,
C H A P I T R E S E P T I È M E .
A m M O E O U L E D I E U A U X P O E M E S D E B E L I E R .
D a n s les-chapitres précédens nous
avons analysé les grandes fables solaires
, qui ont formé différens corps
de poëmes , dont les débris plus ou
moins nombreux et plus ou moins mutilés
sont parvenus jusques à nous.
Nous allons maintenant parler des
diverses formes et des diiférentes dénominations
données au même Soleil,
chez différens Peuples, et à différentes
époques, avec un précis des
petites fables, qui y furent-attachées 3
( l j Arnob. Cont. Gent 1. 6. p. îÿ 7.
en sorte que nous considérerons la
Mythologie ici plus encore dans sa
partie théologique , que dans sa partie
poétique, qui est presque nulle dans
les nouvelles dénominations dont nous
allons parler.
La première de ces formes du culte
Solaire est celle d’Amnaon , ou dit
Dieu Soleil, paré des attributs du Bélier
céleste ( 1 ) , lequel pendant bien
des siècles, précédoit immédiatement
le premier des signes, alors le Taureàu
, signe équinoxial de Printemps,
et qu’il remplaça bientôt, lorsque le
Taureau se fut éloigné de l ’équinoxe.
En effet l ’équinoxe rétrogradant
se reporta dans les étoiles du
Bélier, qu’il parcourut en 2, i 5i ans
par un mouvement lent et rétrograde,
jusqu’à ce qu’enfin il eut entammé
les Poissons $. ce qui arriva 3oo ans
environ avant i’Ere Chrétienne, où
le D ie u a g n e a u succéda a u Dieu
taureau.•
Les prêtres de l’Egypte s’étant fait
une religion toute Astrologique , et
dont les formes furent en grande partie
empruntées des Constellations et
des Signes, ou des animaux célestes,
durent faire sur-tout un grand usage
des attributs du bélier et du taureau ,
qui successivement occupèrent l ’équinoxe
de Printemps! Aussi les Dieux
à cornes de bélier et à cornes de
boeuf , Aminon et Osiris, furent chez
eux des Divinités du premier ordre ,
et les formes de ces deux animaux
furent consacrées par leculte d’animaux
vivans, et de statues symboliques à
tête de bélier et de boeuf, qui repré-
sentoient les animaux célestes. Lucien,
dans son traité d’Astrologie (1 ), confirme
cette vérité , lorsqu’il nous d it ,
que le Bélier, consacré dans les temples
d’Ammon , et le boeuf dans ceux
du Dieu de Memphis’’ représentoient
le Bélier et le Taureau céleste, à l’aspect
et à l’influence desquels ces animaux
sacrés étoieut soumis. Quand
Lucien ne nous l’auroit pas dit, le
principe fondamental de leur Iconographie,
qui étoit de peindre ,.commele
ait Jamblique , le Soleil ( 2 ) avec lés
formes des animaux, qui occupent les
signes , qu’il parcourt dans sa révolution
, et de varier les formes et lès
attributs de ses images ( 3 ) avec les
Saisons , suffit pour nous conduire à
(1 Lucian de Astrolog. p. 956.
O) Porphyr. Epis, ad Anneboh Jarobüch de imyft.
*syp. c. jy. I
chercher aux cieux l ’origine et la raison
des formes monstrueuses de leurs
Divinités. Faisons donc l ’application
de ce principe à leur Dieu Ammon,
coëffé des cornes du bélier, et dont les
Grecs , en écartant cette parure , bi-
za#re , firent leur Jupiter tonnant ,
que la Chèvre céleste avoit nourri.
Le nom et la forme du Dieu Am-
mon, suivant Jamblique (4 ) dans
son traité des mystères, exprime la
force intelligente et organisatrice, qui
se développe dans la Nature , lorsque
les formes intellectuelles des corps
deviennent sensibles dans l ’ordre du
Monde, par leur union à la matière ,
laquelle s’opère par la génération des
corps. C’est ce qui arrive tous le«
ans à l’équinoxe du Printemps , lorsque
la force vive . e t intelligente, qui,
cachée sous tin voile éternel, travaille
à la réorganisation des plantes et dès
animaux , produit des milliers d’êtres ,
qu’elle appelle à la lumière , du sein
du néant, ou du cahos, et lorsqu’elle
rend sensibles à nos yeux les dessins
variés , qui différencient entre eux les
innombrables moules , dans lesquels la
matière prend les formes que retiennent
les corps, qui se reproduisent sous
nos yeux et sous nos pas. Le Soleil,
le grand Architecte de tous ces ouvrages
, et le premier des agens visibles
de la Nature , répond alors au»
étoiles du Bélier céleste , dont il est
censéprendre les attributspour appeller
à la génération tous les ctres , et mettre
au jour les ouvrages de la'sagesse éternelle
, réalisés en quelque sorte , par la
génération universelle des corps qui
composent l’ordre visible du Monde. Ün
doit regarder l’explication du nom,
ou plutôt du caractère du Dieu Ammon
donnée par Jamblique , comme
une définition des propriétés et des
opérations de cette Divinité , et
fg) Produs in Tim. p. 33.
(4) Jamblich. Ibid. c. 3ÿ.
N a