ravie, comme Isis, à'qui te même Génie,
Soub le nom de Typnbft, avoït enlevé
son époitk, se met à la recherche de
cette fille infortunée. Elle' allume un
liambenm pour éclairer ses pas , et, après
avoir parcouru différens pays , elle arrive
à Eleusis clans l’Attique. De même
qu’Isis , arrivée à Byblos , vint s’asseoir
près d’une fontaine ; Cérès vient aussi
s’asseoir près du puits dè Galiichorè (1) ,
sans avoir voulu encore ni boire ni
manger. Elle se repose sur une pierre ,
qui , devenue im monument de sa douleur
, prit depuis le nota de Triste ou
d ’Ageslate. Ce fut là que les filles de
Celée ,, qui condùisoient deux chèvres
<( 2 ) , la reneontrèrent , comme les
femmes d’Astarté rencontrent Isis , près
d’une fontaine. Ces filles , de même que
lesfèmmes de la PrinceSse , furentinfor-
mer la Reine Métanire (3) de la rencontre
qu’ëlles avoiént faite. Gérés est appelée
au palais, où Jambê, vieille servante,
cherche à là faire rire par de grosses
plaisanteries. Celée avoit un Hls de sa
femme Métanire , comme Malcander
èn avoit un de sa femme Astarté. Çérès,
Chargée de le nourrir (a) , le mettoit
dans le feu pendant la nuit, afin de
Consumer ce qu’il avoit de mortel. C’est
mot pour mot la fable d’Isis , nourrice
du fils ü’Astarté "L qu’elle met au feu,
pour consumer également Ge qu’il avoit
de mortel. La suite offre, à peu de choses
prés., la.même ressemblance. L ’enfant
VappeioitDémophon, suivant quelques-
uns P ét Triptoième , suivant d’autres
; (6). La mère du jeune Prince surprend
Cérès dans cette dangereuse opération ,
dont elle ignore le but ; elle pousse un
cri , le charme est rompu ; l’enfant pér
it , et la Déesse se fait connoître.
Alors elle donne à Triptoième, l ’aîné
des fils de Métanire , le char attelé de
dragons , et l’art cte cultiver le blé,
qu’il va enseigner à toute la terre ,
qu’il parcourt en traversant les airs sur
son char allé. Cependant Jupiter pr-
( i ) Cailiai. Hyrna. inCêr. y. 15 , »S, 17 ,ete.
(a) Ovid. East. 4, v. J06.
donne à Pluton de rendre Proserpine,
L’Auteur de l’hymne, faussement attribué
à Homère (4)-, ajoute au récit d’A-
pollodore quelques détails , tels que des
reproches, que fait Gérés à la Pleine d’a-
Voir , par son imprudence , fait perdre
à son fils l'immortalité ; ce qui rapproche
encore ce récit de celui que fait
Plutarque de l’aventure du fils d’A-s-
tarté. Nous ne suivrons pas plus loin
tes diverses aventures de Gérés, et nous
ne parleron s pas des différences, qui se
trouvent entre 'les divers Auteurs, qui
ont omis certaines circonstances et en
ont rapporté d’autres. Nous nous bornons
au réoit le plus conforme aux traditions
Egyptiennes , dont nous nous
proposons de faire le rapprochement
avec les traditions Grecques. D’après ce
que nous venons de rapporter des aventures
d’Isis et de celtes de Cérès , et des
circonstances, qui ont accompagné la
recherche, que l’une fait de son époux
et l’autre de sa fille , il est impossible de
méconnoître l’identité parfaite des deux
fables, et la filiation de la fable Grecque,
copiée sur la fable Egyptienne. Les
Divinités étant donc reconnues les
mêmes , il s’ensuit que les Mystères,
établis en l’honneur de l’une et de l’autre,
sont aussi les mêmes;qu’ils ont une même
origine et un même but 5 et que les céré-
monies,qui retraçoient las courses d’Isis,
retracèrent aussi celles de Gérés , à quelque
différence près. Donc , si nous saisissons
bien le but des Mystères d’Isis,
nous aurons trouvé celui des Mystères
de Gérés ; et les lumières, qui s’échapperont
des deux sanctuaires , doivent être
recueillies précieusement, en ce qu’elles
partent d’un même foyer, et qu’elles peur
vent concourir à éclairer nos pas dans ce
labyrinthe obscur. Nous tirerons donc
des inductions des uns et des autres,
qui nous conduiront au même résultat,
et tes uns souvent suppléeront au défaut
de lumière que fourniront les autres.
C’est ainsi, que le but bien connu des
(3) Apollod. 1. r.
(4) Far lu!. Homer. Rec. nuper edit.
Mystères d’Isis , qui étoit, suivant Plutarque
(1) , de fortifier la piété , et de
donner à l’homme des consolations ,
fixera indubitablement notre opinion
sur les Mystères de Gérés et sur leur
objet, et détruira le faux préjugé, dans
lequel ont été plusieurs , que .ces Mystères
avoienit pour objet l’agriculture ,
et contenoient une cérémonie commémorative
de l’invention du blé. Ils
avoient le même but que ceux d’Isis ,
puisque Cérès étoit la même Divinité
qu’Isis', et que les aventures, représentées
dans lestleux sanctuaires , étaient absolument
les mêmes, à peu de chose près.
Ils dévoient donc avoir pour but de fortifier
pareillement la piété , et de consoler
l’homme ici-bas. Or , c’est précisément
ce qu’attestent les anciens , qui
ont parlé avec le plus de connaissance
des Mystères de Cérèstcéiébrés à Eleusis.
« Les Grecs , dès la plus haute anti-
» quité, ditPausanias (;2), quiétoit initie,
» ont regardé les Mystères d’Eleusis ,
» comme ce qu’il y avoit de plus pro-
» pre à porter ies hommes à la piété. »
Ils étoient, suivant Aristote (3), la plus
précieuse de toutes les institutions religieuses
; aussi, tes appeloit-on les Mystères
par excellence ; et le Temple d’Eleusis
étoit regardé , en quelque sorte ,
comme 1e sanctuaire commun de toute
la terre (4) , celui où la religion réunis-
soit tout ce qu’elle avoit de plus imposant
Isocrate. Non - seulement, dit l’Orateur
philosophe, nous y avons reçu des leçons
et de plus auguste. Ils avoient donc
pour but , comme ceux d’Isis , d’inspirer
aux hommes la piété. Ils avoient
également pour objet de leur donner
des consolations dans tes misères de la.
Vie. Quelles étoient ces consolations ?
l’espoir d’un avenir plus heureux, et de
passer, après la mort, à la félicité éternelle.
C’est ce qu’attestent Cicéron (5) et
(t) De Isi.l. ibid. p. 361.
(1) Pausanias i» Phocicis.
(3) Arist. Rhet. 1. 2 , c. 24. Meursius, c. 1 ,
Eleusin.
(4.) Arist. in Eleusin. Euripid. initio Hippolyt.
G) Cic. de Leg. I. ». lsocr. Paneg.
, qui rendent la vie plus agréable ,
mais encore nous en tirons des espérances
heureuses pour le moment de la
mort. Ceux-là , dit Isocrate , qui ont
le bonheur d’y être admis, emportent
en mourant des espérances flatteuses
pour l’éternité. Les Mystères , dit Aristide
(6) , en parlant de ceux d’Eleusis ,
nous procurent non-seulemeht des consolations
dans la vie présente , des
moyens de nous délivrer du poids de
nos maux , mais encore le précieux
avantage de passer après la mort à su
état plus heureux. Voilà donc les Mystères
de Cérès qui, comme ceux d’Isis,
fortifient la piété de l’homme , et lui
fournissent des consolations dans les
maux qui l’affligent ici-bas. C’est donc
sous ce point de vue, que nous devons
envisager les uns et les autres. Nousnede-
vons pointmettre de différence en tre deux
initiations, instituées en l’honneur de la
même Déesse, dans deux pays différens ,
et où il n’y a de différence dans le culte ,
que. celui du nom et quelques pratiques
du cérémonial. Joignons à cela, que les
Athéniens, chez qui se trouvent établis
les Mystères de Cérès, célébrés à Eleusis,
étoient une colonie d’Egyptiens , partis
autrefois de Sais , où le culte d’Isis étoit
établi. Isis étoit la Déesse de Saïs (7) ,
que Plutarque dit être Minerve, Divinité
tutélaire d’Athènes, et qu’Hérodote dit
être Cérès., adorée également à Athènes
(8) , sous 1e nom de Déesse d’Eleusis.
C’étoit en son honneur, que se
célébroit la fameuse fête des lumières
(a) , qui ressemble si fort à notre Chandeleur
, en honneur de la Vierge, mère
de Christ, comme la Minerve de Saïs
l’e'toit du Soleil (10) , et Cérès du jeune
Jacchus , Cérès honorée pareillement
(6) Arist. in Eleusin.
(7) Plut, de bide, p. 35.4.
(8) Herod. 1. 2 , c. 59.
(9) Herod. ibid. c. 6.
(10) Procl. in Tim.