mérité des hommes, trouvoient un retour facile
vers les Dieux ( i j. De là l ’origine de l’apo-
. théose de César et d’Auguste, q u i, comme le
dit Horace , assis à la table des Dieux : purpureo
bibit ore nectar. Ainsi autrefois Castor et Pollux,
etc. méritèrent l’apothéose. '
( t ) Cette opinion, sur le sort de l’arae vertueuse
après la mort, accoutumoit l’homme à en
braver la crainte: « quitus adeb à metu pradicti
inieritus cogitatio viventis erecta est3 ut ad mo-
riendi desideriurn ultrb animaretur majestate promisses
bcatudinis et coelestis habitaculi » . ( 2 ) .
Nous avons v u , comment les Législateurs du nord
de l’Europe, tirèrent parti de ce dogme , pour
former une race de guerriers intrépides. ( V , ci-
dessus, p. 14.6, ) lies Mystiques de l ’Orient profitèrent
du même ressort, pour former des Solitaires
et des Moines; le Chef de la secte des Chrétiens,
pour former ses fanatiques ou martyrs.
(u) Macrobe observe, que le but de l’ouvrage
de Ciccron, intitulé Songe de $cipion, est d’apprendre
à ceux quj sont chargés du gouvernement
des hommes (3), que les âmes de ceux, rqui ont
bien mérité des sociétés, retournent au Ciel pour
y, jouir d’une félicité éternelle. Ce but étoit aussi
celui des mystères, puisque Cicéron, dans un autre
ouvrage, en parlant dev Castor et Pollux, Hercule
, etc. dit que ce sont des hommes, qui, par
leurs services rendus à l’humanité, ont mérité
l’Apothéose, et il appuie son assertion de ce
qu’on enseignoit à cet égard dans les mystères
( Tuscul. 1. 1 , c. 13 j).
(x) La vertu seule rend l’homme heureux,
nous dit Macrobe ; mais on distingue les vertus
en plusieurs clas:es. Les vertus politiques ( 4 ) ,
celles qui appartiennent à Phomme social, sont
les premières. Ce sont celles-là , que les anciennes
Initiations se proposoient d’encourager. Ce sont
celles-là qui font les bons Citoyens, les bons Magistrats,
les bons fils, les bons pères, les bons
amis , et d’elles naissent toutes les . véritables vertus,
suivant ce savant. Il place ensuite les vertus,
qu’il appelle épuratoires, ou celles de l’homme qui
cherche à s’unir à la divinité. Secundo. , quas pur-
gatorias vocant, hominis sunt qui Divini c.ipax est ;
solumque animum ejus expediunt, qui decrevit se
à eorporis contagione purgarc, et quidam humano-s
rum fugâ solis se inserere divinis. Hoc sunt otio-
sorum, qui à rerutn publicarum actibus se séquestrant.
Ce sont les vertus des Philosophes, qui dans la
suite sont devenues celles des hommes mystiques et
des contefnplâtifs (5). Ce sont celles-là qui ont commencé
à tout gâter. Les deux autres classes , que
nomme ensuite Macrobe, et qui ne sont que des
degrés de raffinement dans la mysticité, ont achevé
de tout perdre. Mais, s’il appartient aux vertus
(0 Macrob. Som. Scip. 1. 1, c. 9, p. 40.
(2) Ibid. 1, a , c. 8, p. 3<5.
(3) Ibid. I. 1, c. 4 , p, 12.*
(4) Msçrçb, fed, ç, p. 36 et 37,
de procurer à l ’ame cette éternelle félicité, dit
Macrobe, c’est incontestablement aux vertus politiques
( 6 ).
^yjDans Démosthène , Oratio inNaeram , on
voit le serment de la Prêtresse de Bacchus; elle
proteste qu’elle est pure , sans souillures, et qu’elle
s’est abstenue du commerce avec son époux,
g! Voyez le calcul des assassinats , commis par
esprit de religion , dont M. de Voltaire a , fait
l’évaluation en nombre effrayant. [Voltaire, pièces
détachées . t. 1 , c. 42 , de Jésus et des meurtres commis
sous son nom ]. Le total de ces assassinats se
trouve, calculé au plus bas, monter à près d’un
million de personnes égorgées , noyées , brûlées ,
rouées ou pendues, pour l’atnour de*Dieu et de
Christ. Quelle religion d’Anthropop hages î .Ajoutez
à ce calcul les massacres du Midi, dans .1«
commencement de notre révolution, et les milliers
de cadavres, qui jonchent les départemens de
l ’Ouest ; et après cela , Peuplé , regrètes les
Prêtres !
( î ) Q je d® f° rfaits n*a Pas enfantés cette fiu
«este espérance d’ un bqn Peccavi, qui 'doit terminer
une vie souillée de crimes, et lui assurer
l ’éternité bienheureuse ! L’idée de la clémence de
Dieu a .presque toujours contre-balancé la crainte
de sa justice dans l’esprit d’un coupable , et la
mort est le terme où il fixe son retour à la vertu ;
c ’est-à-dire , qu’il renonce au crime,, au moment
où il va être pour jamais dans l’impuissance d’en
commettre, dë nouveaux, et ou l’absolution d’un
Prêtre va , dans son opinion , le délivrer des châti-
mens dus a ses anciens forfaits.
Evandre , général de Persée , ne put pas
être purifié par le Koés, et les Roriiains..»représentèrent,
qu’il souilleroit, par sa présence ,1e sanctuaire
de Sàmothrace (7).
( a ) C ’est ce que Pythagore appelle homogénéité
de substance dans les différens -‘animaux,
qui ne diffèrent entre eux , que pair l ’organisation
de la matière terrestre. ( Porphyr. vit. Pyth.
ü ■ 3>• " .1 '
(b ) Macrobe ( Somn. Scip. L. 1 , C, 1 ) donne
un grand développement à cette idée, en parlant
delà justice, sauf laquelle non-seulement un grand
é ta t, mais la plus petite f am i l le n e peut subsister.
C ’est , dit-il, cette persuasion qui a obligé
Platon de terminer son grand ouvrage de la Ré-'
publique, par un tïaité sur l’immortalité de l’ame ,
et sur les peines et les récompensés à venir. Il
ajoute,, que Cicéron a suivi la même marche.
Après avoir , dans tous ses ouvrages , donné la
palme à la justice, il a terminé ses travaux
par un ouvrage, sur le destin de Lame, dans lequel
il montre le lieu , que doivent occupèr un
jour les âmes de ceux, qui auront administré ayec
(5) Ibid. p. 38.
(6) Ibid, p 3p.
(7) Tit. Liv. 1. 4 5, c. 5.
Côttragé et justice. Toute la Théologie ancienne,
sur la descente des âmes ici bas, et sur leur retour
au C ie l, est, suivant Macrobe, fondée sur le
besoin qu’on eut d’inculquer aux horhmes l’amour
de la justice, base indispensable de toute institution
sociale.
Il paroît par Pausanias ( 1 ),-que le dogme de
l’immortalité de l ’ame étoit établi chez les Chal-
déens et les Indiens , long-temps avant qu’il
passât chez les Grecs,1 et que Platon l’enseignât
dans ses ouvrages philosophiques, ou il développe
la Théorie de l’Elysée et du Tartare. La Théorie
des mystères , bien antérieurement à Platon , la
supposoït ; mais celui-ci en fit un système philosophique.
( c ) Macrobe ( Somn. Scip. 1. 1 , c. 9 , p. 40 )
est dans la même opinion, ou au moins ilsuppose ,
qu’Hésiode pensa ainsi.-
J^d) Les Grecs, qui empruntèrent des Crétois
le culte de Jupiter, conservèrent, dans leurs fictions
mystagogiques, le nom symbolique de Crète,
pour désigner le monde intellectuel. ( Proclus
in Tim. 1. 3 , p. 36 ).
/ ) Pythagore , dit Porphyre, enseigna d’abord
l’immortalité de l’amé ; en second lieu , que l’ame
passe successivement dans le corps de différens animaux
J’de plus, qu’âprès certaines périodes révolues,
ce qui avoit eu lieu se reproduisoit encore ; cpi’il
n’y avoit rien de nouveau dans la nature; et
que tous les Etres animés avoient une parfaite
homogénéité. Ce Philosophe passe pour être le premier,
qui ait apporté ces dogmes en Grèce.
( ƒ ) - Ce cercle, dont l’initié demande à être délivré
, ne peut être que ce cercle dont parloit Pythagore;
lequel rameïiôit l’homme à plusieurs métamorphoses,
en faisant passer son ame dans le
corps de différens animaux y jusqu’à ce qu’elle fut
assez - purifiée , pour .être admise au lieu du repos
éternel. Il est le premier, suivant Diogène Laërce,
( p. 576 vit. Pyth. ) qui' ait appris que l’ame,
entraînée dans le cercle de la nécessité, se revêt
successivement des formes de différens animaux.
Pythagore faisoit entrer Mercure dans sa Théorie
(Ibid. p. 5 86 ) , et il le faisoit le dépositaire et
le tonducteur de ces âmes. O r , on sait que Mercure
figuroit aussi dans les mystères d’Eleusis, et
ce ne pouvoit ~ être que comme ministre des
Dieux, pour exécuter leurs arrêts vis-à-vis des
âmes.
(g) Elle dérivoit de l’id é e , qu’on avoit de la
pureté de cette substance ei de sa légèreté spécifique
, qui avoit besoin d’être débarrassée du poids
et des souillures d’une matière étrangère, pour
pouvoir remonter à son originè, et se mêler de
netiyeali à la substance de l’Ether;
(1) Paus. Messes. p.,ï4î.
(a) Varro in Tuber.
(3) Pau«. Lacori. pv >7»
(4) Germ. Cæs. ç. 2e.
( h ) Macrob. Som. Scip. L. 1 , C. 8 , p. 39:
Originem animarum mànare de ccelo inter rectè philosophantes
indubitato constat esse sententio > et
anima, dum corpore uthur, hoc est pzrfecta sa-
pi&ntia ( le but de la. Télète ) . ut unie orta sit±
de quo fonte venerit, recognoscat.
( i ) Proclus, dans son Commentaire sur Timée
dit que l’oeuf d’Orphée est la même chose, que
ce que Platon appelle Y Etre, ou ce qui est ( 2 ).
Varron fait voir les rapports de comparaison,
qu’il y a entre l’oeuf et le monde. Cctlum est testay
item vitellum, terra : inter ilia duo humor, quasi
Ilcinus ( in sinum ) clusus a'èri, in quo calor.
( 1 ) L ’oeuf'étoit consacré" à Lacédémone, et
suspefidu dans le temple d’Hilarie et de Phébé.
Les Dioscures, ou Dieux de Samothrace, étoient
censés sortir de l’oeuf; ce qui fait jûge r, qu’il
étoit un des symboles consacrés dans leurs mys^.
tères ( 3 ). Hilarie et Phébé étoient deux Pléiades.
L’oeuf, qui fut trouvé sur les bords de l’Euphrate par
les Poissons célestes, et d’eù naquit la Vénus
Syrienne , tenoit à une fable religieuse sur le Printemps
(4 ) .
( l ) La terre portoit le nom de Grande, qu’exprime
le mot oriental Cabar, à Phlye, dans i’A t-
tique ( 5 }. Oh y trouvoit, dans un autre temple,
,1e» autels de Cérès et de- Proserpine : la première
s’appeloit Onèsidorc, la seconde Primogenita ( Pro-
togèries ) .
{m) Théodoret ( prétend , que c’étoit le Cteis,
que l’on-exposoit à Eleusis, et le Phallus, dans
les Phallogogies., eh honneur de Bacchus. If paro
ît, que l’on^ exposoit l’un et l’autre à Eleusis j
puisque, d’un côté, TertulKen parle du Phallus
et Théodoret du Cteis, comme faisant partie
des symboles consacrés à Eleusis.
Théodoret. Thérap. 1. 7 , Serin, 12; etSerm.7.4.,
p. 5 8 ) .
(n) A.Gyllène , en Elide , sur le bord de la
mer, Esculape avoit son temple | 6 J: On y vdyoit
aussi Mercure, avec son majestueux symbole de
génération. Il étoit chez eux singulièrement respecté.
C ’étoit, sans doute, le vieux Mercure dés Pé-
lasges, qu’on honoroit dans les mystères, comme
auteur de la génération , lorsqu’il unit les âmes
aux corps*
( 0 ) Dans les' mystères de la mère des Dieux ,
en Phrygie, on contoit l’àvènture de Jupiter,
q u i, répandant Sur la terre sa semence, donna
naissance à Agdestis, qui avoit les deux sexes.
Les Dieux , effrayés de cette production ( 7 ) monstrueuse
, lui retranchèrent la partie v i r i l e e t ne
lui laissèrent que le sexe féminin.
(5) PauSi Attic. p. am . •
0 ) Paus. Eliac. 2 , p. 204;
(7) Paus. Achaic. p. 223C