tière turbulente , à laquelle elle est par
sa nature étrangère. Le lieu, d’où elle
tire son origine , est le Ciel. C’est, dit
Macrobe , une opinion constante parmi
tous les Philosophes ; et l'ouvrage de sa
sagesse, tant qu elle est unie au corps,
est de porter ses regards vers sa source,
et de s’efforcer de retourner au lieu d’où
elle est partie. Nous avons dans cc-s deux
mots le secret de' tous les mystères , et
de toutes les initiations ,dontle butest de
rappeler à l ’homme son origine divine ,
et de lui indiquer les moyens de retourner
vers son principe. La religion des Chrétiens
elle-même n’a point un autre
objet. La philosophie n’avoitpoint non
plus d’autre but, comme on peut s’en
assurer, par les ouvrages des Pythagoriciens,
des platoniciens et des autres Philosophes
, dont les Chrétiens ontemprunté
les dogmes et la morale (y) , et sur-tout
par IVjarcrobe, lequel pous marque,
dans ce même ouvrage , la véritable lin
que se proposoit la philosophie, qui
seule pouvoit assurer à l’homme là
félicité. La grande science , que
l ’on acquérait dans les mystères , étoit
pour l’homme la connoissance de soi-
même , de la noblesse- de son origine ,
de la grandeur de ses destinées, et de sa
supériorité sur les animaux , qui ne
pouvoient arriver à cette science , et
auxquels 1 homme ressembloit , dès
qu’il ne réfléchissoit pas sur son existence
, et n’approfondissoit pas sa nature.
C’é toit là Cette grande leçon,qu’avoit
donnée l’oracle de Delphes à celui qui
le consultoit sur les moyens d’être heureux
(i) , apprends à te connoître toiM
meme ; sentence sublime , que l’on disoit
descendue du Ciel, et qui étoit gravée
sur lefrontispice du Temple. Lame,
existant de toute éternité au Ciel, a
abandonné le lieu de son origine (f) , par
ignorance réelle ou feinte, pu plutôt par
une trahison ouverte. Celieuest là partie
(i) Som. Scip. lib. i ; c. 9, p. 3,9.
(?.) Ibid. c, 1 ç , p.. 40,
(3) Ibid. p-41. 1
étoilée du monde , où elle liabitoit,
dit Macrobe, avant de se laisser séduire
par le désir d’animer un corps, et d’où
elle est descendue, pour venir s’y
loger (3). L ’aine, précipitée ici-bas, n'a
d’autre ressource que de se recon-
noître , et de tourner ses regards vers
sqn origine , et son berceau primitif ;
c’est en elle-même qu’elle doit se chercher
( 4 )- Llle doit tout souffrir , tout
faire pour remonter vers sa source. Telle
est la conclusion, que l’on tiroit de ce
premier dogme, sur l’origine de l’ame.
Mais avant de parier de son retour ,
suivons-la dans sa descente.
La Sphère aplane (5) , ou le Ciel des
fixes, étoit cette terre sainte, ces champs
Elysées, qui étoient le domicile naturel
des aines, le lieu où elles remontoient,
lorsqu’elles avoient recouvré leur pureté
et leur simplicité primitive. C’est
de ce champ lumineux,que partoit Pairie,
lorsqu’elle étoit envoyée dans le corps,
où eile n’arrivoit , qu’après avoir subi,
trois dégradations, désignées sous le
nom de mort, et 'après avoir franchi
les'Splières et les démens. Les aines,
restoient en possession du (.ici (6) , et
de la félicité, tant qu’elles étoient assez
sages , pour éviter la contagion du
corps, et se tenir libres de tout contact
avec la matière. Mais celles qui de
cette demeure élevée, où elles sont environnées
d’une lumière éternelle, ont
jeté un regard en bas vers les corps ,
et vers ce qu’on appelle ici-bas la vie,
qui ,pour l’ame ,est une vraie mort., et
qui ont conçu pour elle un secret désir ;
ces âmes , victimes de leur concupiscence
, sontentraînées peu - à - peu vers
les régions inférieures du monde , par
le seul poids d’une pareille pensée et
d’un désir tout terrestre. Cette chute
toutefois n’est pas subite , mais graduée.
L ’ame,parfaitement incorporelle, ne se
revêt pas tout de suite du limon gros-
(4) Ibid. p. 39.
(5) Ibid. c. 11 ,.p. 46,
(6) Ibid. p. 47.
R E L I G I O N U
sier du corps ; mais peu-à-peu , par des
altérations successives et insensibles ,
et à mesure qu’elle s’éloigne de plus
en plus de la substance simple et parfaite
qu’elle liabitoit, pour s’entourer
d’un certain corps sidéral , ou de la
substance des astres, dont elle se grossit.
Car , dans chacune des Sphères placées
au-dessous du Ciel des fixes, elle 6e revêt
de plusieurs couches de matière éthérée,
qui insensiblement forment le lien intermédiaire
, par lequel elle s’unit au
corps terrestre; en sorte qu’elle éprouve
autant de dégradations on de morts,
qu’elle traverse de Sphères. Voici quel
est l ’ordre de sa marche (1). La voie
lactée , dit Macrobe, embrasse tellement
le Zodiaque , dans la route oblique
qu’elle a dans les d eu x , qu’elle le coupe
en deux points opposés, au Cancer et
au Capricorne , où sont les deux termes
de la route du Soleil, appelés Tropiques ,
etque les Physiciensont appelé les portes
du Soleil. Il est certain, que du tems de
Macrobe les deux Tropiques , qni autrefois’
répond oient aux étoiles du Cari -
cer fît I du Capricorne , cotiser voient’,
connrle aujourd’hui, ces noms ,,quoique
les Tropiefues correspondissent alors
aux constellations des Gémeaux et du
Sagittaire;, par l’extrémité desquelles la
■ voie de lait coupe le Zodiaque. Ainsi
©U pouvoit dire , qu’elles passoient par
■ les signes du Cancer et du Capricorne ,
màis non pas par les constellations;
vë qu’il ne fairtpasconfondre, à-eausedu
déplacement -produit par la précession
des Equinoxes.
G*est par ces portes , comme nous
l’avoué „déjà vu ,plus haut, ope les âmes
étoient censées descendre vers la terre,
,et„ rentorçter de la terre aux Ciéux. C’est
pourquoi, con tinue Macrobe jg l j on appelle
l’ùne , la porte des Hommes , et
l’autre , lit,portp des Qiepx (z). Le,Cancer
étoit, .celle. des hommes , parce que
(i) tbîà. c. a3j p.:47. 47
(?) ilia.
N I V E R S E L L E . a i5
les âmes étoient censées descendre par-
là vers la terre ; le Capricorne, celle des
Dieux , parce que c’e'toit par le Capricorne
, qu’elles remontoient vers le siège
de leur propre immortalité , et qu’elles
alloient se placer au nombre des Dieux ;
et c’est ’ ce qu’Homère a Voulu figurer
, dan* la description de l’antre cl’L-
thaque. C’est pourquoi Pythagore ( 3 )
pense , que c’est de la voie lactée , que
partla descente vers l’empire de Pluton,
parce que les âmes , en tombant de là ,
paraissent déjà déchues et rabaissées
au-dessous de leur habitation supérieure.
C’est de là voie lactée, qu’elles reçoivent
la première impulsion , qui les pousse
vers les- corps terrestres. Voilà ce qui
fait que Scipion l’ancien dit au jeune
Scipion, au sujet des âmes des bienheureux
, en lui montrant la voie de lait :
« Ces aines sont parties d’ic i, et c’est
» ici qu’elles retournent (a) ».
Ainsi les arhes , qui doivent descendre
, tant qu’elles sont an Cancer ,
Comme, elles n’ont point encore quitte
la voie de lait , Sont toujours censées
être au norribre des Dieux. Mais lorsqu’elles
sont descendues jûsqti’âüLion ,
là elles commencent l'apprentissage
dé leur condition future. Par la raison
contraire , lorsqu’elles sont dans le Verseau,
qui est le signé opposé au Lion,
elles sont dans Pétât’ de là plus grande
opposition à là viè humaine (4). Aussi
est-ce .sous ce signe’ , et dans le mois
'ouiè âol'eii lé parcourtque l’on fait
des sacrifices aux mânes. Ainsi l’ame,
descendant des limites célestes , où le
Zodiaque, ët la voie lactée sè toüchënt,
quitte aussitôt .sa formé sphérique / qui
ËSt celle de la Nature divine, pour s’a-
lônger ’ êt s’évaser ëii cône. C’est ainsi
que ‘ du, point naît là ligne , qui dTrii
point individuel s’étend en longueur ;
et sortant deV la sphéricité dè .son
point, qui esVsa monade , elle se na;--
(3) Ibid. c. 12, p. 48.
!-0 Ibid. .. ..