même que l’Isis Egyptienne (1) ; que le
Bacclius Grec étoit aussi l’Osiris Egyptien
(2) ; d’où il résulte évidemment,
que les mystères de Cérès et de Bac-
chus1, célébrés parles Grecs,sont ceux
dlsis èl d'Osiris , établis en Egypte dès
la plus haute antiquité, puisque Cérès
est Isis, et Bacclius est (Dsiris. Les
aventures de ces Divinités^conduisent
au même résultat, et les courses d’Isis
(3) ressemblent en beaucoup de points
à celles qu’on attribua ensuite à Cérès ,
suivant l’observation du sage Plutarque ,
et de Diodore (4)1
Nous allons rapporter ici une partie
de la fable d’Isis , que nous avons racontée
et expliquée dans notre chapitre
troisième du troisième livre 5 elle nous
servira ici de terme de comparaison (5).
Isis, après la mort malheureuse d’Osi-
ris, dont le corps enfermé dans un coffre
par Typhon ,principe des ténèbres, avoit
été jetedansleNil, se met à la recherche
de son époux infortuné. Incertaine de la
toute qu’elle doit tenir, inquiète, agitée,
le coeur déchiré de douleur , en habit
de deuil , elle porte çà et là se3 pas
égarés. Elle interroge tous ceux qu’elle
rencontre , même de jeunes enfans, de
qui elle apprend que le coffre avoit été
porté à la mer par les eaux, et de-là
jusqu’à Byblos , où il s’étoit arrêté , reposant
mollement sur une plante (6)
appelée Erica , qui poussa tout-à-coup
une ^superbe tige, dont il fut tellement
enveloppé, qu’il sembloit ne faire qu’un
avec elle. Le Roi du pays , étonné de la
beauté de l’arbuste , le fit couper, et en
fit une colonne pour son palais , sans
s’appercevoir du coffre , qui s.’étoit uni
et incorporé avec le . tronc. Isis instruite
par la Renommée, et comme par
un instinct divin, de ce qui se passoit',
arrive bientôt à Byblos-, et baignée de
larmes, elle vint s’asseoir près d’une fontaine
, où elle resta dans un état d’accablement,
sans parler à personne, jus.
qu’à ce qu’elle vît arriver les femmes,
qui servoient la Reine Astartd, quelle
salua honnêtement , et dont elle retroussa
la cheVelurei, de manière à y répandre
, ainsi que .’ .ir tout leur corps ,
rôdeur d’un parfum exquis. La Reine,
ayant appris de ses femmes ce qui ve-
noit de se passer , et sentant rôdeur
admirable d’ambroisie, qui s’exhaloitcle
leurs cheveux et de tout leur corps,
voulut connoître cette étrangère. Elle
invite donc Isis à venir dans son palais,
et à s’attacher à sa personne. Elle en
fait la nourrice de son fils. Le Roi
s’appeloit Malcander, et la Reine As-
tarté , ou suivant d’autres Saosis , et
Nenumoun. , ou Mhien ienne. Isis mit
dans la bouche de cet enfant le doigt,
au lieu du bout de la mamelle , etbrûla
pendant la nuit toiités les parties, mortelles
de son corps. En même temps
"elle se métamorphose elle-même én hirondelle
; voltige autour de la colonne
d’Efica , en faisant retentir l’air de ses
cris plaintifs , jusqu’à ce que la Reine,
qui l’avoit observée , vint à pousser un
cri en voyant brûler SOn fils. Ce cri
rompit le charme , qui devoit donner à
l’enfarif l ’iiùmortalité. La Déesse alors
se fit connoître , et demanda que la précieuse
colonne lui fût donnée. Elle en
retira facilement le corps de son époux,
en dégageant le coffre du bois qui le
recouvroit, et qu’elle voila d’un léger
tissu et parfuma d’essence. Elle
remit au Roi et à la Reine cette enveloppe
de bois étranger, qui fut déposée
à Byblos dans le temple d’Isis , où on
le voyoit encore du temps de Plutarque.
Isis s’approche ensuite du' coffre, le
baigne de seslarmes, et pousse un cri si
aigu, que le plus jeune des fils du Roi
en mourut de frayeur (7). Elle emmepa
« Plut, de Tsid. p. 36s— 364— 36).
(a) Herod. !.. t . «. 4 2 , 551, «. J44.
(3) Be Iside, p. 360. 1-4) Diod. L j , §. 6%.
{5) De Iside, p. 3661
4® h5“!. P- 357-
(7) iwd. M m
l’aîné avec elle , et emportant le coffre
chéri , elle s’embarqua ; mais un vent
un peu violent s’étant élevé sur le fleuve
Phaedrus , vers le matin, elle le fit tarir
tout-à-coup de colère. S’étant ensuite
retirée à l’écart, se croyant absolument
seule , elle ouvrit le coffre , et collant sa
bouche sur celle de son époux, elle le
baise , elle l’arrose de ses larmes ; mais
le jeune Prince, qu’elle avoit emmené,
s’étant avancé par derrière à petit bruit,
épioit sa conduite et les expressions de
sa douleur. La Déesse s’en apperçoit, se
retourne brusquement, lance sur lui un
regard si terrible , qu’il en meurt d’effroi.
La Déesse se rembarque et retourne
en Egypte auprès d’PIorus son fils, qu’ûn
élevoit à Butos , et elle dépose le coffre
dans un lieu retiré,hors dé la vue des hommes.
Typhon,étantallépendantlanuità
la chasse , trouve le coffre , rèconnoît le
cadavre , et le coupe en quatorze m0rr
ceaux (1), qu’il jette çà et là. La Déesse
•l’ayant su vient aussitôt rassembler ces
lambeaux épars. C’est pour cela, dit-on ,
que l’on trouve en Egypte tant de.tombeaux
d’Osiris , parce qu’Isis enterra
chacun des membres de son époux dans
le lieu où elle les trouva. D’autres disent,
qu’elle fit différentes images de son
époux, et qu’elle les donna à differentes
villes ,.,à qui elle fit croire, que
c’étoit le corps même de son époux ,
afin de multiplier par-là les objets de
leur culte, et les monumens religieux
d’Osiris , et de tromper dans ses recherches
Typhon', s’il s’avisoit encore de
poursuivre les restes de son époux. -,
De. tous les membres d’Osiris (2).,
-les parties génitales furent les seules
qu’Isis ne put retrouver , parce que
Typhon.les ayant jetées dans le fleuve,
qui.fécondoit l’Egypte , le Phagre , espèce,
de poisson a tête élffée , et armée
d’une . sorte de d,ard , les avoit dévorées.
A la place , Isis substitua un. mem-
: !(>t) Ibid. v. ;357- , , yj . j,-: 1; .'
(a) Ibid. v. 358.
(3) Diod. 1, 1,
bre viril factice , pu le Phallus , q_u elle
consacra , et dont la représentation, a
encore lieu dans les mystères de 1 E-
gypte. Diodore de Sicile donne la même
origine à la consécration du Phallus (3)
dans les Temples de 1 Egypte, e t , par
une suite de l’imitation, dans ceux des
Grecs , qui avoient emprunté des Egyptiens
le culte d’Osiris (4) , sons le nom
de Bacchuss , et la consécration du
Phallus mystique, des Pammylies Egyptiennes
(5). :
Plutarque convient ( 6 ) , que c’étoit
pour retracer ces événemens réels ou
fictifs, qu’Isis avoit établi les Mystères
qui les représentaient par des images ,
des sy mboles et un cérémonial religieux,
qui en étoientune imitation; qu’on recé-,
voit dans ces mêmes Mystères des leçons
de piété , et des consolations dans
les malheurs, qui nous affligent ici-bas.
C’est là précisément l’idée que nous
devons nous en faire. Ceux qui instituèrent
ces Mystères eurent pour but
de fortifier la religion et de consoler
l’homme, dans ses malheurs, par les
hautes espérances qu’il puisoit dans l i
religion , dont les principes lui étoient
présentés, sous les dehors d’un cérémonial
pompeux , et sous le voile sacré dé
l’allégorie. Car onauroit tort de prendre
pour de l’histoire le récit que nous vêlions
de rapporter. Il n’a aucun des caractères
de l’histoire , même altérée ; il
a au contraire tons les caractères du roman
et d’une fable sacrée, qui cache un
sens tout différent de celui qu’elle présente
sous cette forme bizarre , comme
nous l’ayons fait voir dans notre chapitre
sur Isis. Nous n’avons rapporté cette
fiction , ou plutôt ces. débris d’une ancienne
fiction mutilée sur Isis et ses
courses., qu’afin de la comparer avec
la fiction Grecque sur Cérès.
Cérès , après la perte de sa fille, que
le Dieu des ténèbres , Pluton, lui ayoit
(4) Herod. 1. a , c. 49.
(5) Plut, de Iside', p. 555*
, (£) De Iside , p. 361.
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