i8o O R I 6 I N É' D I TO' US L E S C Ü L t E S,
elqu onli aitjamais manqué de gens,qui
attestassent des miracles; car rien de si
attesté que ceux de Sérapis, et cependant
rien de si faux : jugez, des autres»
Je laisse au lecteur à suivre Aristide
dans son récit exagéré des miracles de
Sérapis 5 (r) récit, dit-il, où l ’on n’a point
à craindre qu’il en impose. Le croira qui
voudra ; mais une réflexion, qui ne doit
échapper à personne, c’est l'impudence
avec laquelle on supposoit des miracles
dans les premiers siècles du Christianisme
, et la disposition incroyable qu’on
à voit à y ajouter foi. Revenons’à Sérapis,
à la grande divinité des Alexandrins,
• Outre ces caractères généraux dé bienfaisance
, qui méritèrent à Sérapis la re-
connoissance de tous les peuples, ce dieu
avoit acquis en Egypte une plus haute
considération que par-tout ailleurs, par
une suite des rapports qu’il avoit avec le
N il, et qui étoient particuliers au sol
Egyptien. C’étoiten automne , au moment
où le soleil s’ùnissoit au Serpentaire,
que le Nil débordé rentroit dans
Son lit, et qu’il laissoit dans les champs ce
limon précieux qui les fécondoit. Alors,
se faisoient les semailles,au lever du soir
des Pléiades (2)» La moisson se faisoit
aussi au moment où ■ soleil atteignoît
ces mêmes Plé'iades, au lever du soir de
l’Esculape céleste , en opposition avec
le Taureau , dans lequel la lune des
moissons se trouvoit pleine., C’étoit autrefois
celle de l’équinoxe de printemps,
epoque à laquelle le Nilrecèvoit le premier
ferment d’intumescence (3) qui, au
Sosltice, au lever du grand Chien,ou du
Cerbère de Sérapis, poussoir le fleuve
hors de son l i t , et l’épanchoit dans les
champs, jusqu’à ce que le Soleil d’automne,
entortillé du serpent de Sérapis
ou du Serpentaire, l’y fit rentrer. Voilà
donc comment le Serpentaire se lioit au
C*) Théon. p. 135-.
Ci) Eufeb.. præp. év. I. 3. c, K . Jablonski, I. 3.
v tt t,' T-.
(àl Hem. t. 4. c, 3..
mouvement périodique dés eaux du Nil,
On voit par-là, que Sérapis, ou la figure
céleste, qui donne au Soleil d’automne
et à la pleine lune de printemps les at-
tributs du Serpent, dut se lier à l ’agriculture
des Egyptiens, et au culte qu’ils,
rendoient aux eaux du Nil. Aussi Ja-
blotisky (4) a-t-il cru devoir, dans un
traité «éparé, examiner Sérapis sous ce-
nouveau rapport ; quoiqu’il n’ait pas
saisi l'origine de cette liaison, qui effectivement
existoit. Nous la trouvons
nous dans la constellation même, qui se
trouve en opposition avec le Soleil au
printemps, et qui en ouvre la première
nuit, Æt en conjonction avec le même
dieu soleil en automne, et qui ouvre le
premier jour des Signes inférieurs, ou
des jours d’automne et d’hyver. C’est,,
sans doute,cette liaison de la fameuse
constellation du Serpentaire avec le prin-
temps èt l’automne, et avec lés eaux dii
N il, lesquelles depuis le printemps jusqu’à
l’automne , montent et se retirent,
qui a fait dire au rhéteur Aristide (5f,’que
c’étoit Sérapis qui , dans l’é té , faisoit
monter le Nil, et quile faisoit baisser dans
l’hyver» En effet, la marche progressive
du Nil étoit à peu près correspondante
à celle du jour et du Soleil ; il atteignoit
son maximum au Solstice d’été et-le mois,
suivant, et son minimum en hyver. Ce
qui fit dire,, qu’il étoit l’émule du ciel.
Cette opinion, que lès anciens Egyptiens,
avoient de Sérapis et de l ’action qu’il
exerçoit sur le Nil , dont fl faisoit dé-
border les eaux dans leurs-champs pour
les féconder , est confirmée par Ruffîn
et par l’historien Socrate (6j. Aussi trouvons
nous des médailles d’Alexandrie-
avec la 1 figuré du N i l , représenté couché
sous l’imagé d’un vieillard, avec
cette inscription : Au St., Dieu Nil. Et
sur le revers, la tête de Sérapis, avec
cette inscription Au St. Dièu Sérapis.
(p4)'Arift. orat. & p. ioo;
(5) Ruffin. Hjfl. JEccl. 1. 2. c. 23. Sacrât. Hift.l. tc.
H
O U R E L I G I O N
C’est sans doute par une suite de cette
même raison, que la t®ise sacrée , destinée
à mesurer les divers degrés de crue
du Nfl , étoit déposée dans le temple du
dieu Sérapis , ; suivant le témoignage des
auteurs cités ci • dessus. Quelques-uns
pensent, que c’est cette espèce de règle
ou bâton , qu’011 voit entre les mains de
Sérapis , et que le boisseau, qui est sur sa
tête, sont les attributscaractéristiques du
dieu des semailles et des moissons. J’ignore
si c’est le vrai sens de ces symboles;
mais il est certain, que Sérapis se lioit
au débordement du N il, et sur-tout à
la retraite de ses eaux, ainsi qu’aux semailles,
chez les Egyptiens, et même
chez les autres peuples , qui ensemen-
eoient la terre en automne, au lever du
soir des Pléiades. La mémoire de cette
liaison, qu’avoit Sérapis, ou le Serpentaire
avec le labourage, nous- a été conservée,
dans une ancienne tradition sur
cette constellation, rapportée par Hy-
gin (iÿ| On disoit, qu’il étoit un roi de
Thessaiie, appelle Triopas , que Gérés
avoit placé aux cieux. D’autres , qu’il
étoit un ancien roi- des Gètes, appelle
Carno-Büta , qui monta sur le trône, au
moment où fut découvert l ’art d’ensemencer
la terre; qu’il avoit donné l ’hospitalité
au fameux Triptolème, à qui
Cérès avoit communiqué sa précieuse
découverte , dont il fit part aux autres
mortels. On ajoute , que Carna-buta ,
après sa mort , fut placé aux cieux par
Cérès. Toutes ces fictions ont leur origine
dans la liaison,qui existoit entre
cette constellation , qui préridoit à
l’automne- , et les êemailles qui s’y
faisoient» Ce sont les- mêmes motifs
qui ont fait présider Pluton et Proserpine
aux semailles , comme nous le; dirons-
bientôt»
Quant aux rapports,qu’il avoit avec la
retraite des eaux, ils sont consignés dans
ïe fameux passage d’Anthénagore ( % )
(1) F-îygin 1.1.
G ) Amena, leg. p. 1-8.'
0 ) Ci-defl’. t, 1.1. 3. c. 1. p. r»
fV Gi-defl'. t. 1. ï- 3. c- a. g»
Ü N I V E R S U L E r!5t
sur les dogmes d’Orphée, relativement
aux premiers principes Cosmogoniques.
Comme nous en avons parlé, dans notre
premier chapitre,(3) nous y renvoyons le
lecteur, et nous nous bornons à lui rap-
peller , que c’étoit cette même constellation
du Serpentaire, sous le nom
d’Hereule (o&), qui naissoit au moment
de la retraite des eaux. Nous rappellerons
également au lecteur que , dans la-
fable d’Osiris, nous avons vu le Nil se
déborder au lever de Sirius, (4) et Hercule
venir ensuite le faire rentrer
dans son lit ; événement qui a lieu tous
les ans, au moment où le Soleil s’unit an
Serpentaire, qui porte aussi le nom
d’Hercule. Ainsi lé Soleil, entortillé du
Serpent, soit Hercule, soit Sérapis, est
censé- lié au mouvement des eaux du
N il, et sur - tout à leur retraite.
Cette figure du dieu Soleil, entortillé
du Serpent, et devenu Demiourgos dans
la Théologie d’Orphée, nous amène naturellement
à l ’examen du dieu Cneph
des Egyptiens , peint avec les mêmes
formes ,. que celui dont parle Athéna-
gore.
En effet le dieu Cneph,,adore- à T bébés
,, étoit peint sous les traits d’un
homme, qui de- sa bouche vomïssoitt
l’oeuf symbolique, destiné à représenter
le monde (5). Tel Athenagore représente
son Hercule, ou le temps (6),, donnant,
naissance à mi oeuf immense (yJÉf), qu’il
échauffe, et qu’il brise ensuite en deux
parties, de manière à ce que la partie!
supérieure devienne le c i e l e t la-partie;
inférieure, la terre. La statue de ce dieu,
Cneph, étoit de couleur noirâtre ; telle
que celle de Sérapis, ou de la couleur*
dont étoient, en Egypte, les statues du»
Soleil, destinées-à représenter cet astre,
durant tout le temps qu’il occupe le*;
signes inférieurs ,. comme nous l’avons;
vu plus haut , et comme nous l’a die
Macrobe (7)- Scrapis,, suivant Plut:®--
Eufeb. præp i. 3. c. i l p. ri
Athenag. p» 18. Eufeb. ibid-
(l% Madrob» Sat- 1. 1 - c.