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en décomposant presque toutes ses
propriétés. Nous avons vu dans Hercule
le dieu fort, qui meut la nature &qui
engendre le temps; dans Osirisq &
BaccliUs, le’ dieu fécond qui préside, à
la végétation par sa chaleur; dans Apollon
le père de la lumière. Ici c’est la
force, bienfaisante du.Soleil, qui, suivant
Proclus (1), règle la température
he ureuse de l ’air, qui entretient la vie
& la santé. Cette remarque étoit aussi
celle de Porphyre. Fsculape , dit ce
philosophe (2) , est l’expression de la
faculté, qu’a le Soleil'de conserver ou
de régénérer les corps. Voilà donc un
nouveau rapport, sous lequel les anciens
ont consideié le soleil; & une qualité
particulière de cet astre , qu’ils ont reconnue
& célébrée, sous les noms d’Apollon
& d’Esculape. Ils l’ont invoqué
sur-tout en automne , contre les maladies
qui se manifestent à cette époque;
c’est-à-dire, lorsque le Soleil passe sous
le Serpent. Son secours leur parut alors
plus que jamais nécessaire. Aussi est-
ce sous ce rapport de.dieu de la santé,
que le Soleil fut principalement honoré,
sous le nom & la forme d’Esculape ,
ou de dieu nni au Serpent. Esculape
n’est même guèi es connu autrement, que
comme dieu de la médecine (3), qui
avoit la puissance de guérir toutes les
maladies , & même de ressusciter les
morts. Témoin cette femme , qu’il ressuscita
après qu’elle fut décolée, & à
qui il remit la tête, (4) Témoin aussi la
résurrection d’Hippolyte où du Cocher ,
(5) sous le nom de Virbius (u5) , &
celle d’Orion ; car il les ressuscita aussi.
Il ressuscita également plusieurs des
guerriers morts devant Thèbes. Il rap-
peila à la Yie le cadavre de Tyndare;
il rendit la vue aux fils de Phinée; il
guérit de leur folié les fil les.de Praetus. Jamais
le dieu soleil ne fit plusde miracles
(1^ Proclus in Timæ p. 49.
(2) Porph. spudEuf. pracp. évang. ï. 3. c. il-p . 213.
( 3 ) Diodore I. 4. c. 71. p. 315.
(4) AEiian. I- 9. c. 33.
(5) Cvid. fab. 46 LylioGirald.p. 240 Se*t. empir.
sous le nom de Christ, qu’il en avoit fait
sous celui d'Esculape & de Sérapis. On
voy oi tgravés, sur les colonnes defon temple
(6) a Epidaure, les noms des hommes
&des femmes , qu’il avoit guéris, avec
une désignation de la maladie, et avecle
récit de la manière dont ils avoient été
guéris.Ony distinguoit entre autrescho-
sesune vieille colonne, qui rappelloit le
miracle de la résurrection d’Hippolyte;
on ne manquoit pas sans doute d’y trouver
des ex voto , qui rappelloient les
cures merveilleuses du Dieu de la médecine.
Pauvres mortels ! vousêtes toujours
& par-tout les mêmes !
Strabon parle (y ) d’un magnifique
temple, qu’avoit E culapedaus une ville
h abi tée par les Ion ien s &les Carien s, temple
toujours rempli d’une foule de malades,
qui venoient solliciter leur guérison.'
On y voynit sur les murailles quantité
de tableanx oùétoient peints les malades,
la cure de leurs maladies, & l ’on
y avoit inscrit les noms de ceux qui se
croyoient guéris. Il en étoit de même
dans J’1,1e de Cos, & à Trica.
Les Romains, affligés de la peste dès
les premiers temps de leur républi-
qne(8), .avoient étéchercher les secours
d’Esculape à Epidaure, & en avoient
rapporté le Dieu médecin , métamorphose
en serpent; auquel ils élevèrent
un temple dans l’isle.du Tibre, (q)|Cette
métamorphose , est décrite dans Ovi-
de( io ), avec toute la cérémonie de la
translation du dieu d’Epidauré. Que vous
•a-t on apporté, d Epidaure, dit Arnobe
aux Payens , autre chose qu’un volumineux
serpent ? Voilà donc ce dieu si
Vanté, ce dieu si grand, ce dieu saint,
ce médecin souverain de toutes vos maladies
, circonscrit dans les formes d’un
serpent & rampant sur la terre?.Le reproche
qu’Arnobe fait aux anciens,d’avoir
adoré un dieu-serpent, pourroit
C6) Pauf. Corinth. p. 69*
( 7 ) Strabon. !. 8.
(8) Tice Liv. dec. 2. ï. n .
(9) Arnob contra gent. I. $. p, 48. 0 °> OviJ. métam.b J5-fab. 13-14-15.
l’être à tous ceux qui ont adoré, la divinité
du soleil, sous les formes d’animaux
quelconques ; Iious.avons vu j’qri'-
gine de çe .dulte & le -rapport établi
onire ces animaux symboliques &les animaux
célestes. C’étoit le résultat .d'une
ancienne science, qu’Arnobe ne pouvoit
entendre. Car les Chrétiens n’ëtpient
pas savait,s ; aus^i s'qst-il borné^. unp
îonpue déclamatipn^contre ce symbole^,
comme fai-soient tous les pères & le^
apologistes du Christianisme.
Les .Carthaginois^ avaient élevé au
Dieu dé la santéj à Esculape , un tpagni-
fîque temple au. .milieu de leur ville, (1)
& sur le sommet de la montagne où
étoit placée leur citadelle, connue sous
le nom de Byrsa 6c de Cadmeia- H n’est
pas étonnant,, que ,1e le me 11 s Cadmus
des Phéniciens , le .fils le Syduc ,
Esculape..célébré dans la Cosmosgonie
deS inclioniaton, commefrère des Dieux
Cabires, eut des tomplçscbe/. un.peuple,
qui étoit uqe colonie de. Phéniciens,
& qui alloit tous jes ans à Tyr honorer
Hercule, nom que porte également le
Serpentaire,
Le culte de, ce Dieu étoit établi dans
le Cyrenaique , le long de la côte de
Libye, où l’on tron.ve aussi la ville d’Ar-
sinoë, Lp faux Hermes (2) suppose, qu’Es-
culape,inventeur dp la médecine, ayoit
aussi un temple «ur le mont de Libye,,
près du rivage des Crocodiles. Il en
avoit un à Alexandrie, dans lequel on
nourrissoit un serpent (3) , qui lui étoit
consacré.
La ville de Memphis étoit sur tout fameuse
par Recuite d’Esculape, qui l.Iiopo-
roit durpe,manière,foute particulière de
sa présence (4).,La jplus ai)cienue,Çhro-
.ïiologie des rois,,de Memphis .compte
Escufape pour spn ' qei sps.rois. II. y est
désigné sous 4p .nomvje Tpsothpus. (5).
Le cjilte d’Esqulape ,jpù du dieu.ap.pnyé
sur un bâton entortillé d’un serpent,
( ï ) Strab. I. 17.
O ) He rmès in Asclep* • r
( 3) A El ian de animal, 6.1 0.39» '. 0 ) Ammien-Marcellin. i-^22. p- 245.'
Rélig. Univ. Tome II.
ou enveloppé quelquefois des r.eplis du
serpent, ou aiême métamorphosé ep
serpent, établi én Phénicie , en Egypte,
en Afrique,passa bien-tôt dans la Giecé;
et les villes maritimes furent les premières
aie recevoir par cela mêmp , qu’il
y fut apporté par des navigateurs, pour
qui la constellation du Serpentaires étoit
une grande divinité , sous lé nom d,e
Phorbas, ami d’Àppllpn, Aussi les jRh'o-
diens, adorateurs du soleil, ne s’.é.loi-
gnoient jamais du rivage, sans avoir invoqué
..Phorbas (6) ouïe Serpentaire,
le Cadmus Phénicien, lé frère des Ca-
hires, divinités tutélaire.« de la navigation
( x 5 )i'. '
La ville d’Epidaure , placée sur la côte
la .plus orientale du l ’élpppnèse, dans
le Golfe Sarqnïqùe,paroît avoir sur-tout
accueilli ce nouveau dieu et lui avoir
donné en Grèce jg plus grande .célébrité
; de manière que les noms d’Esculape
ou de dieu u’Epidaure étoieat
souvent synonimes.
On le faisait naître à ’ Epidaure, et
toute,cette terre passoit pour Un être
. corrsàcréç yrVEllç prenoit même, dit-on,
S,on nom d’,Epidaure, (y5) un des fils
d’Apollon tel étoit aussi Esculape. Les
mêmes.loix de police, relatives aux femmes,
qui s’pbservoient à Délos, s’obser-
voieut aussi à Epidaure ; ce qui coq-
firme les rapjports ç£ablj.s entre le culte
d’Apqllpn .et pelui d’Esculape.
La èstâtue du dieu .étoit la moitié
moins grande,que pelle du Jupiter Olympien
d’Athènes. L’or et l ’ivpire entroient
dans sa composition. Il parqissoit as-
sis sur un trp n e, le cou de sur un bâton, ap-
puyantjson autre main sur la tête d’un
serpent, et il avoitun chien à ses côtés (o).
Tel .étoit aussi la statue de Sérapis et
de Pluton , dont nous parlerions bientôt,
lesquels ne sont qu’Esculape , ou le
soleil d’,automne , sous d’autres nom«.
C’est dans ce ternplè', que se trou voient les
fS) Syncelle- p- 56.
Ç6) Hygin- I. a.
(7) Paufan. Corinth.p. 68,69.«
(8) Ibid. p. 69.