
X X X III.
Second & troi
iïérne interrogatoire.
1 7 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t iq u e .
Le peuple femoquoit d’eux & leur donnoit des iouf-,
flets. Il y en eut un qui dit à Sabine : Ne pouvois-tu
mourir en ton pais? Elle répondit: Quel eft mon pais ?
je fuis foeur de Pionius. Terence qui avoir foin des combats
des betes, dit a Aiclepiade: Je te demanderai comme
condamné pour fervir dans les combat*,.des gladiateurs.
Aiclepiade repondit: T u ne m’épouventeras pas
pour cela. Ils arrivèrent ainfi à la prifon. En y entrant,
un des gardes donna à Pionius un grand coup fur la tête
& le blefîâ : Pionius le fouffrit patiemment; mais le garde
eut auffi-tôt la main & le côté fi enflez & fi enflammez,
qu’à peine pouvoit-il refpirer. Etant entrez, ils
loüoient Dieu de la force qu’il leur avoitdonné,particulièrement
contre le perfide Eudemon.
Peu de jours après le proconful Quintilien revint à
Smyrne ielon la coutume, & étant affis iùr ion tribunal
, il fit amener Pionius, & lui demanda fon nom.Il
répondit: Pionius. Le proconfuldit: Sacrifie. Il répondit
: Non. Le proconfuldit: De quelle fefte es tu? Pionius
repondit de la catholique. De quelle catholique,
dit le proconful ? Pionius répondit : De l’églife catholique.
Le proconful dit : T u étois leur doéleur ? Je les
inilruifois, dit-il. T u leur enfeignois la folie: N o n ; la
pieté. Quelle pieté?!Celle qui regarde Dieu, qui a fait
le ciel, la terre & la mer. Sacrifiedonc, dit le proconful.
J ’ai appris, répondit Pionius, à adorer le Dieu vivant. Le
proconful dit : Nous adorons tous les dieux, & le ciel Sc
ceux qui y font : Pourquoi regarde-tu l’air ? Sacrifie. Il
répondit: Ce n’eft pas l’air que je regarde, mais Dieu
qui a fait l’air. Le proconful dit ; Qui l’a fait ? Pionius
répondit; il n’efl pas à propos de le dire. Le proconful
dit: Il faut que tudifè quec’efl: Jupiter, qui eft dans
le ciel, avec qui font les dieux & toutes les déelfes. Sa-
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crifie-lui donc à ce roi du ciel & de tous les dieux. Comme
Pionius iè teut, le proconful le fit prendre pour lui
donner la queftion; & lorfque l’on eut commencé à le
tourmenter, le proconful dit : Sacrifie. Il répondit : Point
du tout. Le proconful dit: Plufieurs ont fàcrifié&ont
évité les tourmens. Il répondit: Je ne facrifie point. Le
proconful dit: Sacrifie. Pionius d it :N o n . Le proconful
: Point du tout? Pionius dit: Non. Le proconful :
Quelle préfomption & quelle perfuafion te fait courir à
la mort! fais ce que l’on t’ordonne. Pionius dit: Je ne
fuis point préiomptueux ; mais je crains le Dieu éternel.
Le proconful : Que dis-tu ? Sacrifie. Pionius : Vous avez
oüi que je crains le Dieu vivant. Le proconful : Sacrifie
aux dieux. Pionius: Je ne puis.
Le proconful le voyant ainfi ferme, délibéra long-
tems avec fon ccnfeil, puis s’adreflant encore à Pionius,
il lui dit : Perfifte-tu dans ta refolution ? Ne veux-tu pas
te repentir tôt ou tard? Il répondit : Non. Le proconful
lui dit encore : Tu as la liberté de confulter & de délibérer
plus long-tems. Il répondit : Non. Le proconful
: Puifque tu cours à la mort, tu feras brûlé vif. En-
fuite il fit lire la fenrence écrite en latin fur une tablette,
en ces termes : Pionius iàcrilege s’étant avoüé chrétien,
nous avons jugé qu’il doit être brûlé v if, pour vanger
les dieux & donner de la crainte aux hommes. Pionius fè
rendit gaiement & d’un pas ferme au lieu du combat,
Y" étant arrivé, il n’attendit pas que l’officier le lui dit,
& fè dépoüilla lui-même. Alors penfànt à la pureté de
fon corps, il fut rempli d’une grande joye; leva les yeux
au ciel & rendît grâce à Dieu qui l’avoit ainfi confervé.
Il s’étendit f ur le bois, & fè livra à un ibldat pour être
cloué.
Après qu’il fut attaché, l’executeur lui dit: Reviens
x x x iv .
Condamnation
Sc exécution»