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Saiiis: Pullion.
480 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fes parens plus que moi ,11’eit pas digne de moi! En di»
Tant cela , il levoit les yeux au ciel ; comme pour dire
qu’il jie connoiffoit plus perfonne fur la terre. Probus
die ; Sacrifie du moins à caufe d’eux. Irenéedit : Mes eft.
fans ont le même Dieu que moi, qui peut lesfauver.
Probus dit : Jeprononcerai ta fentence. Je vous en ferai
obligé , dit Irenée. Probus prononça donc ainfi : J ’ordonne
qu’Irenéedéfobéiifant aux ordres des empereurs,
foit précipité dans le fleuye. Irenée dit : Après tant de
menaces j ’attendois de grands tourmens, & que vous
me feriez mourir par le fer. Je vous prie de le faire, afin
que vous voïez combien là foi donne aux chrétiens de
mépris pour la mort. Probus irrité commanda qu’on
lui coupât auffi la tête. Irenée en remercioit Dieu,
çomme.d’une fécondé viètoire. Etant venu fur lepont
il fe dépoüilla de fes habits , & d i t , les mains étendues
au ciel: Seigneur J .C . qui avez bien voulu fouffrir pour
le falut du monde, ouvrez-moi vos cieux , puifque je
fouffre pour votre nom & pour le peuple de votre églife
catholique de Sirmium, Daignez par votre mifericorde
me recevoir & les confirmer dans votre foi. Ainfi il eut
la tête tranchée&fut jetté dansla Savéle fixiéme d’Avril.
Enfuite le gouverneur Probus. vint à Cibate autre
ville de Pannonie, dont il 11e reife plus aujourd’hui de
velfige , quoique ce fut alors une ville épifcopale. Le
même jour que le gouverneur y arriva, on prit Pullion
premier des lecteurs, & on le lui prefenta, comme un
homme quineceifoit de parler infolemment contre les
dieux & contre les princes. Probus luidemanda fon
nom ; s’il étoif chrétien ; quelle charge il avoit ; ce
que c’étoit que les leéfeurs. Pullion répondit : Ceux
qui ont accoutumé de lire au peuple la parole de Dieu.
O i j i , dit Probu? j ces gens qui féduifent des femmes
legeres
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îegeres, les empêchant de fe marier, & leur perfuadant,
à ce que l’on d i t , une chaftetâhnutile. Pullion répondit
: Ceux-là font légers & imprudens, qui quittent
leur créateur pour fuivre vos fuperftitions. Mais ceux-
là font fermes 5c fidelles à leur roi éternel , qui s’efforcent
d’accomplir malgré les tourmens. les préceptes
qu’ils ont lus. Probusdit : Quels commandemens ? de
quel roi ? LesfaintscommandemensdeJ.C.ditPullion.
Quoi, dit Probus, que difent-ils ? Pullion répondit : Ils
enfeignent qu’il n’y a qu’un Dieu qui lance le tonnerre
, que l’on ne peut nommer Dieu, ce quieft fait de
bois ou de pierre ; ils corrigent les pecheurs ; ils fortifient
les bons dans l’innocence. Ils enfeignent aux vierges
à garder l’état fublime de l’intégrité ; aux femmes la
continence qui convient à la production des enfans; aux
maîtres, à commander avec douceur à leurs freres; aux
efclaves,à fervir plus par amour que par crainte, à obéir
aux rois Sc aux puiffances, quand ils commandent des
chofes juftes, à rendre l’honneur aux parens, la pareille
aux amis,le pardon aux ennemis,l’affection aux citoïens,
•l’humanité aux hôtes, la compaffion aux pauvres , la
charité à tous. Ne faire mal à perfonne, fouffrir patiemment
les injures, n’en faire aucune, ceder fes biens, ne
point defirer ceux d’autrui ; pas même d’un regard de
complaifance. Enfin que celui-là vivra éternellement,
qui pour là foi méprifera la mort d’un moment, que
¡vous”pouvez nous donner. Si ces maximes vous déplai-
fent, vous pouvez les condamner avecconnoiffance de
jeaufe. Probus dit : Et que fervira tout cela à un homme
mort, privé de la lumière Sz de tous les biens du
corps ? C ’eft dit Pullion, que la lumière perpétuelle 5z
les biens permanens valent mieux. Que fert tout cela ,
dit Probus Fais ce que les empereurs ordonnent, fa-
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