
8 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
dans Ton opinion, &menaçadegrofles peines les accusateurs
des chrétiens. Confultez vos mémoires, vous y
trouverez que Néron le premier a emploie le fer contre
cette feéte qui s’élevoit alors principalement à Rome.
Nous tenons à honneur d’avoir un tel auteur de notre
condamnation. Domitien avoit auffi entrepris de nous
pcrfecuter, mais il ceifa bien-tôt & rappella ceux qu’il
avoit releguez. Tels ont été nos perfecuteurs, ceux que
vous ordonnez vous-mêmes. De tant d’autres princes
inftruits du droit divin & humain, montrez-en un qui
ait pourfuivi les chrétiens.
Au contraire nous en montrons un qui les a protégez :
fî on veut chercher les lettres de Marc-Aurele,cefage
empereur ; où il rend témoignage de la pluie que les
foldacs chrétiens obtinrent par leurs prières pour appai-
fer la fo ifd e fon armée en Germanie. Quelles font donc
ces loix qui ne font exécutées contre nous que par des
princesinjuftes,infam.es,brutaux,infenfez ? queTrajan
a éludées en partie, défendant de rechercher les chré-*
tiens ; que ni Adrien quelque appliqué qu’il fût a le-*
chercher tout ce qui étoit curieux ; ni V e fp a fien ,qu o iqu’il
eût détruit les Juifs ; ni Puis ; ni Verus n’ont ja-v
mais autorifez ? Il ajoute que les loix touchant la re-
licrion n’étoientpas mieux obfervees a Rome que les autres
, &l que l’on y avoit enfin reçu les cérémonies étran-r
geres de Serapis & de Bacchus, après les avoir rejettées.
Il vient aux calomnies des enfans tuez, des repas de
chair humaine & des inceftes. Après avoir montré que
non-feulement, il n’y en a pas de preuve, mais qu’elles
ne font pas même vrai-femblables ; il ajoute qu elles
pouvoient être fondées fur ce que les payens faifoierït
eux-mêmes. En Afrique, dit-il, onimmoloit publique-
ment des enfans a Saturne jufques au proconfulat d$
T lb e re ,
I i i v R î c i n q u i e’me." S(
T ib c re , qui fit crucifier les facrificateurs furies mêmej
arbres dont le temple étoit couvert.!Les milices de notre
païs, qui fervirent le proconful en cette occafion , en
rendent témoignage. Mais on ne laiiTe pas de faire encore
en cachette ces facrifices impies. Les parens mêmes
offroient ces pauvres enfans , 8c les flattoient de
peur qu’ils ne pleuraifent quand on les immoloit. Chez
ÎesGaulois on égorge en l’honneur de Mercure des hommes
faits. A Rome même il y a un certain Jupiter que
l’on arrofe du fanghumain, aux jeux quife font en ton
honneur. Pour montrer combien les chrétiens étoient
éloignez de manger du fang des en fan s , il dit : Nous
ne mangeons pas même le fang des animaux ; 8c c’eft
pourquoi nous nous abftenons des bêtes fuffoquées on
mortes d’elles-mêmes, de peur de nous fouiller du fang
qui feroit demeuré dans leurs entrailles. Enfin vous em-
ployezles boudins pleins de fang entreles épreuves donc
vous ufez pour connoîcre les vrais chrétiens. En e ffe t,
ilsgardoiént la défenfede manger du fa n g , portée par
le concile des apôtres ; & elle a été encore obfervée long-
tems depuis.
Après avoir refuté les calomnies fans fondement, il
vient aux accufitions manifeftes. Il y en avoit deux capitales
contre les chrétiens ; de facrilege & de leze-
majefté > parce qu’ils n’adoroient point les dieux, 8c ne
faifoient point de facrifices pour les empereurs. Nous
celions , d i t - i l , d’adorer vos dieux depuis que nous
connoiiTons qu’ils ne font point. M a is , dite s -vo us ,
nous les tenons pour dieux. Nous apellons , dit-il , de
vous à votre confidence ; condamnez-nous, fi vous
pouvez nier que tous vos dieux ayent été des hommes.
Enfuite il le prouve en commençant par Saturne & par
Ju p ite r , & ajoûce : Et parce que n’ofant pa$ nier qu’ils
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