
E u f .y u i.c . i l .
X X X V .
Hiftoire dc faint
Theodoce hotelier.
A d a fine.
4 3 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
Arabie on les tuoit à coups de coignées. En Cnppadocè
on leur brifoit les jambes. Dans le Pont on leur fichoit
fous les ongles des rofeaux pointus : à d’autres on ré-
pmdoit fur le dos du plomb fondu, & on leur»faifoit
iouffrir des tourmens fi infâmes, qu’il n’eit pas même
polliblede les exprimer. Les juges s’étudioient à trouver
des inventions nouvelles de fupplices, comme s’ils euf-
fent combattu pour gagner un prix. En Phrygie il fe
trouva une petite ville dont le gouverneur, letreforier,
tous les officiers & tout le peuple confefferent qu’ils
étoient chrétiens , & refuferent d’obéir a ceux qui les
vouloient faire idolâtrer. On envoïa des gens de guerre
qui entourèrent la ville, y mirent le feu & la brûlèrent
avec les femmes & les enfans , qui invoquoient J . C.
Dièufouverain. Celui de cette villequife fignalale plus,
fut un officier Romain nommé Adaucus, d’une nobleffe
confiderable en Italie , qui avoic paffié par toutes les
charges, même par celle de catholique , ou treforier
général.
Le gouverneur de Galatie nomme Theotecne , étoit
un homme violent & cruel, qui avoit promis à l’empereur
d’y exterminer le chriftianifme. Sur le feul bruit de
fonarrivée dans la province,les églifes furent diflipées;
& un grand nombre de fîdeles s’enfuirent dans les de-
ferts & fur les montagnes. Car il fit marcher devant lui
plufieurs officiers l’un après l’autre, chargez de menaces
terribles, & enfin des edits qui ordonnoient la démolition
des éghles & le refte de la perfecution. Les païens
étoient dans les feftins & dans la joïe ; ils fejettoientdans
les maifons des chrétiens, & prenoient tout ce qu’ils
rencontroient, fans que l’on osât leurréfifter feülèment
d’ünp-parole : autrement on étoit accufé de fédition. Aucun
chrétien n’ofoic plus paroître en public : les princirL
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cipaux étoient en prifon chargez de fers ; les femmes de
condition étoient tramées par des hommes infolcns ; la
plupart fe retiroient dans les deferts, ou ils fe cachoient
dans des cavernes, réduics à vivre d’herbes & de racines.
Etant accoutumez à une vie. plus commode, ils fuccom-
boienc à cette mifere ; les uns mouroient de faim , les
autres venoient fe faire prendre.
A Ancyre capitale de cette province, étoit un chrétien
nommé Théodore, marié, & menant une vie coin-
mune en apparence, jufques-là qu’il tenoit une hôtellerie
; mais en effet d’une vertu finguliere. Dès fajeuneffe
il avoit mépriié les plaifirs & les richeffes, s’appliquant
au jeûne & à l’aumône. Il fecouroit les malades & les affligez,
travailloit à la cdnverfion des pecheurs, & par
fes exhortations fit plufieurs martyrs. Il avoir même le
don des miracles, & guériffoit les maladies incurables,
par fes prières & par l’impofition de fes mains.
Pendant la perfecution il ailiftoit les confcffeurs pri—
fonniers, & enterroit les corps des mar tyrs, quoiqu’on
l’eût défendu fous peine de mort. C ’étoit lui qui four-
niffoit du pain &c du vin pour le faint fàcrifice : car on
ne pouvoir en acheter, parce que le gouverneur avoit
fair offeir aux idoles tous les vivres que L’on ¿rouvoit
en public. Mais Theodote avoit fait fes provifions, ôc
fou métier lui donnoit occafion de donner à manger,
& même de loger plufieurs perfonnes; en forte que fon
hôtellerie devint l’églife , où on celebroit Les mylteres,
l’hoipice des étrangers, & le refuge de tous les chrétiens.
Il alla à un bourg nommé M a l , diftaiét de la ville
i • - 11- environ quarante milles ou treize lieues, pour recueillir
les reliques du martyr Valens, que l’on avoit jettées
dans le fleuve Halys. Il rencontra quelques chrétiens,