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diftinétion. Par toute la ville de Cefarée les crienrs ap-
pelloient les hommes avec leurs femmes & leurs enfans
aux temples des idoles, & les tribuns appclloiem chaque
foldat par fon nom fur les rolles. Alors Apphien
fans avoir communiquéfonde(Tcinàperfonne, non pas
même à Eufebe, ni aux autres avec qui il vivoit : alla
trouver le gouverneur Urbain, comme il facrifioit, &
s’approcha de lui , fans que les gardes qui l’enyiron-
noienrs’cn apperçuiTcnt. Il lui prit hardiment la main,
î ’empêcha de facrifier , & lui parlant gravement , lui
confeilfa de fe défabufer , lui reprefentant qu’il netoit
pas raifonnable de quitter le feul vrai Dieu, pour facrifier
à des idoles & à des démons. Auifi-tôt ceux qui
entouroient le gouverneur fe jetterent fur Apphien,
comme des bêtes farouches, lui donnèrent mille coups
par tout le corps &c le mirent en prifen , où il demeura
un jour & une nuit , les deux pieds étendus dans les
entraves.
Le lendemain il fut prefenté au gouverneur, qui le
voulant contraindre à facrifier, lui fit fouffrir des tour-
mens très cruels: il eût les côtez déchirez,non feulement
une & deux fo i s , mais plufieurs : enforte que l’on voïoit
les os & les entrailles ; & fon vifage devint fi enflé des
coups qu il avoit reçus, qu’il n’étoit plus reconnoifla-
bte. Comme il ne fe rendbit point, les bourreaux lui
entourèrent les pieds de mèches trempées d’huile & les
allumèrent. Le feu lui fondoit la chair & pehetroit juf-
ques aux os, & le fuc de fon corps dégoutoit, comme
de la cire fondue , mais il demeura toujours ferme &
fut remis en prifon. Le troifiéme jour il fut encore prefenté
au juge v il perfifta dans fa confeffion , & quoique
demi mort il fut jetté dans la mer. Auifi-tôt il s’éleva
une fi grande tempête, non feulement fur la mer
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jfnaisdans l’air, que la terre & toute la ville en fut ébranlée;
& la mer, comme ne pouvant porter le corps du
martyr,le jetta devant les portes de la ville. Tous ceux
qui étoient alors à Cefarée furent témoins de cette merveille
, entr’autres Eufebe , qui la raconte. Ce fut le
deuxième jour du mois Xantique, ou le deuxième d’A-
vril, un vendredy. Dans le même temps & les mêmes
jours un jeune homme nommé Ulpien fouffrit. le martyre
à Ty r . Après avoir été fouetté & tourmenté cruel-
lemenr, il fut enfermé dans un lac de cuir ,. avec un
chien & un afpic & jetté dans la mer : c’étoit la peine
des parricides.
Apphien avoit un frere de pere nommé Edefius. Il
confefla plufieurs fois & après une longue prifon, il fut
condamné à travailler aux mines de Paleftine. Il avoir
plus étudié que fon frere , & avant que d’être chrétien
il avoit été philofophe ,& en gardoit encore l’habit.
Enfin fe trouvant à Alexandrie & votant les excès auf-
quels le juge fe laiffoit emporter contre les chrétiens,
en tourmentant des hommes graves & livrant des fem-
mes d’une pieté finguüere , &c des vierges mêmes à des
infâmes marchands d’efclaves; il s’approcha hardiment,
& aïant couvert le juge de confufion par fesreproches;
il fouffrit genereufement plufieurs fortes de tourmens,
& fut enfin jetté dans la mer comme fon frere. Ceci
arriva peu de temps après.
En Afrique, la perfécutionétantceffée, mais les egU-
fes n’étant pas encore rebâties, onze ou douze évêques
de Numidies’aifemblerent à Cirthe, pour élire un fuc-
ceifeur à l’évêque de cette yille qui étoit mort. Ce fut
le quatrième jour de Mars, après le neuvième confulat
de Diocletien : autrement fous le cinquième de Conf-
ïantius Si de Galerius,c’efl:-à-dire,cette année 30j.de
X x x iij
xirr.
Concile de Cifthe.
Aug. brevit. Collât.
die tert. c.
17.
ld . cont. Crefc»-
l. I I I . c. zë.-xj.
Optât. Al ilevit,
Itb. U
An• 3051