
348 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
car la penfée n’cft point fans la parole , ni la parole fans
la penfée ; mais la penfée fait la parole , en laquelle
elle paroît ; & là parole montre la penfée , en laquelle
elle eft. La penfée eft comme une-parole cachée
au-dedans, ôc la parole une penfée qui fe produit
au-dehors 5 la penfée paife dans la parole , 6c la parole
communique la penfée aux auditeurs. L ’une eft comme
le pere ; fçavoir la penfée qui eft d’elle - même : l’autre
comme le fils, fçavoir la parole : puifqu’il eft impoihble
qu’elle foit avant la penfée , ni qu’étant avec e lle , elle
jÉÉtaf- vienne dehors. Ainfi le Pere étant la grande penfée, la
penfée univerfelle, a pour premier interprété &c premier
ange fon Fils le Verbe. Et ailleurs : La penfée
qui fort par la bouche, .eft autre que celle qui eft dans
le coeur. Car celle-ci aïant envoie l’autre , demeure telle
qu’elle étoit, & celle-là étant envoïéc , s’envole & va
par tout L ’une eft dans l’autre, 6c toutefois diftinguée
de l’autre : elles font un , quoiqu’elles foient deux. C ’eft
ainiî qu’il a été d i t , que le Pere.&*le Fils font u n , &
qu’ils font l ’un dans l’autre. Il difoit encore : Au commencement
étoit la parole : mais la parole n’eft pas celui
qui l’a proférée ; -car la parole étoit en Dieu. Le
Seigneur eft la fageife engendrée : donc celui qui a produit
la fageife n’étoit pas la fageife : car , d it-e lle , j’è-
tois celle en qui il fe plaifoit. Il finifloit le fécond livre
par cette formule de louange , qu’il difoit avoir reçûe
de fes anciens. A Dieu le Pere & au Fils N. S. J . C . avec
ü,j5; aiAmf.de le S. E fp r it , gloire &c puiffance dans les iîecles des fie-
f i . s . c . c j c s _ Amen. II difoit encore : La vie a engendré la v ie:
c’eft comme un fleuve qui a coulé d’une fource ; & une
lumière éclatante allumée d’une lumière qui ne s’éteint
point. C ’eft ainfi que S. Denis évêque d’Alexandrie expliquent
le myftere de la Trinité dans fon Apologie ;
& c’eft ce qui nous en refte. Il fe juftifia pleincmetn des
erreurs qu’on lui imputoit, 6c demeura dans l’eglile 6c Alh,n.u o.u.
dans fa dignité. . , .
Depuis long-temps l’erreur des Millénaires etoit eta- V* ^
blie en Egypte. Leur principal auteur avoir ete l’eveque
Nepos, qui prenant trop judaïquement les promelies miiio.«™.
desfaintes écritures, difoit que J . C . regneroit fur la K L j V m .
terre pendant mille an s , 6c que pendant ce temps, les
Saints joiiiroient de tous les plaifirs du corps. Il le fon-
doit principalement fur l’Apocalypfe de faint Jean ; &
avoit écrit un traité fur ce fujet, intitulé : Réfutation
des allefforiftes. S. Denis d’Alexandrie y répondit par
un traite qu’il intitula : Des promeifes ; 6c qu il divifa.
en deux livres. Car quoique Nepos fût m o r t , plufieurs
fuivoient avec attachement fon opinion. S. Denis difoit
dans le fécond livre de fon traite :
En plufieurs autres chofes, je reçois Nepos, & je 1 aime
à câufe de fa fo i , de fon affedtion au travail, de fon
étude de l’écriture , 6c des cantiques qu’il a compofez,
dont plufieurs de nos frères reçoivent encore a prefent
de la confolation ; j ’ai encore plus de refpeét pour lu i ,
parce qu’il n’cft plus au monde : mais j’aime 6c j’hqno-
re la vérité par deffus tout. S il etoit prefent 6c nenfei-
gnoit que de parole la fimple converfation fufflroit
pour le convaincre par des queftions 6c des-reponles«
mais il refte un écrit qui femble a quelques-uns tres-
convaincant : 6c il y a des doéleurs qui ne comptant
pour rien la loi & les prophètes, & fans s’attacher ni
aux évangiles ni aux épitres des apôtres, prêchent la
doétrine de cet é c r it , comme un grand myftere. Ils ne
permettent point aux plus fimples dentre nos fre re s ,
d’avoir des penfées hautes du glorieux avenement de
N . S. ni de notre réfurredion 6c de.notre reffemblance
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