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. 220 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
Noyatien accompagné de quelques gens de ià forte, les-
* tint enfermez & les fit boire & manger avec excès, &
comme ils furent yvres, à quatre heures après midi il
les força de lui impoièr les mains & de l’ordonner évêque
de Rome, comme fi lefiege eut été vacant, ne comptant
pour rien l’ordination de Corneille, ni le confen-
tement de tout le clergé & de tout le peuple, qui etoit
fort nombreux. Car ily avoit alors à Rome quarante-
fix prêtres, fept diacres, feptfoudiacres, quarante-deux
acolytes, cinquante-deux, tantexorciftes que le£teurs&
portiers, quinze cens ‘veuves & autres affligez que l’é-
glife nourriiïoit, le reftedu peuple chrétien étoit innombrable.
Un des évêques qui avoit eu part à la faufïè ordination
de Novatien, revint peu de tems après à l’églifè,
pleurant & confeiîànt fon péché, & S. Corneille lui accorda
la communion, à la priere de tout le peuple, mais
feulement la communion laïque. Car il demeura de'po-
fë auiîi-bien que les deux autres, & S. Corneille envoya
d’autres évêques remplir leurs places. Telle fut l’ordination
de Novatien, le premier antipape, & le chef du
premier fchifme dans l’églife Romaine.
.Hift.ç. Au fchifme il joignit l’herefie , foutenant que l’é-
glife ne pouvoir accorder la paix à ceux qui étoient une
fois tombez dans la perfecution, quelque penitence
qu ils fiffent, & qu’il n’étoit jamais permis de commu-
niqu^^veceux. Il condamnoitauifi les fécondes noces.
Ses difciples les nommèrent en grec Cathares, c’eft-
à-dire, purs, &affeéterent de porter des habits blancs,
& cette feéte dura plus d'un fiecle. ' Poür retenir fès partions
dans le fchifme, Novatien les faifoit jurer für la
thd' fàinte euchariftie. Car après l’oblation, diftribuant à
chacun fà part, il lui prenoit les deux mains & ne le
quittoit point qu’il ne lui eut fait faire au lieu.de bene-
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Idiétionun ferment en ces propres termes: Jure moi par
le corps & le fang de N . S. J . C. de jamais ne me quitter ,
pour retourner à Corneille : & le malheureux qui faifoit
ce ferment, ne mangeoit point qu’il n’eût prononcé
cette malediétion, qu’il n’eût dit : Je ne retournerai
plus à Corneille : au lieu de dire Amen, comme on avoit
accoûtumé de le dire, en recevant le pain fàcré.
Novatien incontinent après fon ordination, envoya
des députez à diverfes églifes avec des lettres ; par lesquelles
il donnoit avis de fon éleétion, fuivant lacoû-
tume ; feignant d’avoir été ordonné malgré lui. Il ex-
hortoit tous les évêques à ne point admettre les apoftats
à la participation des myitérés; mais feulement les excitera
penitence, & en laiffer le jugement à Dieu; & il
n’oublioit pas les calomnies dont il chargeoit le pape
S. Corneille. Ce qui leur donnoitautorité, étoit le témoignage
des confefïèurs qu’il avoit ieduits, & quiécri-s“ - IY- ÎÀ
voient en même-tems. Ces lettres troublèrent prefque
toutes les églifès ; car on ne croyoit pas pouvoir tromper
en fuivant ceux qui avoient confefïe J . C. fi glorieu-
fement, & fouffert une année de prifon. Mais S. Denis
évêque d’Alexandrie , répondit en ces termes à Nova-
tien : Si on vous a ordonné malgré vous, comme vous
dites, vous le montrerez en cédant volontairement. Car
H falloit tout fouffrir,pour ne pas divifer l’églife de Dieu:
& le martyre que vous auriez enduré pour ne pas faire
de fchifine, n’eut pas été moins glorieux que pour ne
pas idolâtrer, & même plus grand félon moi. Car ici
chacun fouffre le martyre pour fà féuleame, & là pour
toute l’églife. Maintenant fi vous perfuadez aux frères
de fe réunir , l’aétion fera plus belle que la faute n’a
été grande, on ne vous l’imputera plus, & vous recevrez
des louanges ; fi vous n’êtes plus le maître des au-
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