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M a r t y r o l .
J l p r i l ,
3 1 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q ^ j e .
frere félon la chair ; il m’a demandé avec euriofité , Si
comme pour m’infulter, comment nous nous trouvions
des tenebres Si du jeûne de la prifon l Je lui ai répondu ;
que la parole de Dieu fert de lumière & de nourriture
aux foldats de J . C . Sçâchez, m’a-t’ild it , que tous tant
que vous êtes de prifonniers, fi vous vous opiniâtrez,
la peine de mort vous attend , Si comme je femblois
en douter, il me l’a confirmé. Puis il a ajouté : Mais vous
autres , qui méprifez ainfi la vie , je voudrois f^avoir, fi
tous indifféremment vous aurez la même recompenfe
dans le ciel. Je ne fuis pas capable, lui ai je d it , de décider
une fi grande queftion ; mais levez les yeux au ciel;
ces étoiles innombrables ont - elles toutes la même lumière
3 II m’a dit encore : S’il y a de la différence , qui
font ceux que Dieu préféré ? Ceux dis-je , dont la victoire
eft plus rare & plus difficile ; comme les riches.
C ’eft ainfi qu’Emilien racontoit fa vifion. Il fouffrit le
martyre au même lieu de Cirthe. Les évêques Agapius
Si Secondin y finirent auffi le leur ; & avec deux vierges
Tertulla & Antonia, qu’Agapius aimoit comme fes filles.
Il avoit fouvent demandé à Dieu qu’il leur fît cette
grâce de fouffrirle martyre avec lu i, & on lui répondit:
Pourquoi demandez-vous fi fouvent ce que vous avez
obtenu dès la première fois ?
Après les vifions qui ont été racontées, Jacques Si
Marien demeurèrent encore quelques jours en prifon ;
puis ils furent menez en public & préfentez aux magiftrats
de Cirthe. Un des fideles, qui étoient fpeéfcateurs,
attira les yeux de tous les infidèles, par les marques de
zele qui paroiffbient fur fon v ifage ; ils lui demandèrent
avec emportement, s’il étoit de la même religion ; il le
confeffa auffi-tôt Si fut joint aux martyrs, que'les ma-
giftrats renvoïerent au gouverneur de Îa province. I ls
allèrent le trouver en diligence, par un chemin long &
difficile ; Si quand ils lui eurent été préfentez , on les
mit dans la prifon deLambefe. Pendant plufieurs jôurs
le gouverneur fit mourir un grand nombre de fideles
laïques avant que d’en venir à Jacques Si à Marien. Les
clercs étoient affligez de-cette diftin&ion Si du retardement
de leur viétoire. Dans cette prifon Jacques vit en
dormant l’évèque Agapius qui faifoit un grand feftin ,
Si témoignoit beaucoup de joie : lui Si Marien y etoient
appeliez comme un Agape , Si ils rencontrèrent un enfant
, l’un de deux jumeaux, qui trois jours auparavant
avoient fouffert avec leur mere. Cet enfant avoit autour
du col une couronne de rofes, Si tenoit à fa main
droite une palme très-verte. Il leur dit : Et ou allez-
vous fi vite ? Réjoüiffez-vous, vous fouperez demain
avec nous.
Le lendemain Marien, Jacques Si tous les autres clercs
furent condamnez à mort. On les mena au lieu de l’exe-
cution , qui étoit fur le bord du fleuve dans un vallon ,
avec des collines élevées de deux cotez comme pour fa-
vorifer le fpeétacle. Parce qu’ils étoient en grand nombre
, on les fit ranger de fuite, afin que l’exeçuteur ne
fît que paffer de l’un a 1 autre en coupant les tetes : autrement
l’execution eût été trop longue , & il y eût eu
trop de corps en un monceau , s il les eut fallu faire venir
l’un après l’autre a la meme place. Quand ils curent
les yeux bandez, la plupart difoient aux fideles qui
étoient proche , qu’ils voioient en haut des chevaux
blancs montez par de jeunes hommes vêtus de blanc ;
d’autres difoient quils entendoient le fremiffement des
chevaux. Marien difoit hardiment, que la vengeance
du fang innocent étoit proche , Si que le monde feroit
affligé de divcifes plaies ; de pefte , de captivité, de fa -