
3 jo H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
avec lui : mais ils leur perfuadenc de n’en efperer dans le
roi'aume de Dieu que des çbofes pentes, periffables &
femblables a celles de la vie préiente. C ’elt ce qui nous
oblige à parler a N ep o s , comme s’il étoit prefent. Ii
difoit enfuite ;
Ecanc dans le canton d’Arfin o é , où comme vous fça,
v e z , cette dodtrine a eu cours depuis long- temps, juf.
qu’à faire des fchifmes dans les égtifes : j’affemblai les
prêtres & les doéteurs des freres, qui font dans les bour,
gades ; & en prefence de ceux qui voulurent s’y trouver
je les excitai à examiner publiquement cette matière,
Ils propofoient ce livre comme une forterefle invincible.
Je m’ affis donc avec eux trois jours de fuite, depuis
le matin jufqu’au foir; & je tâchai d’examiner cet écrit.
Là j’admirai extraordinairement la foliditéde ces freres,
leur amour pour la v é r ité , leur facilité à me fuivre,
leur intelligence : avec quel ordre & quelle douceur
nous faifions les queitions & les objeéluons : comment
nous convenions de plufieurs p oints, fins vouloir fou-
tenii en toute maniéré &ç avec convention, cç que nous
.avions une fois jugé v ra i, fi nous le trouvions tel en effet,
&c fans eludei lesobjeéfcions. Nous faifions bien nos
efforts pour appuïer nos fentimens ; mais s’ils étoient
détruits par raifon, nous en changions & n’avions point
honte de l’avoüer : nous recevions fans diffimulation &
avec des coeurs fimples devant Dieu ce qui etoit établi
par les faintes écritures. Enfin C o ra c ion , qui étoit le
chef & le doéteur de cette opinion , nous protefta en
prefence de tous les freres, qu’il ne s’y arrêteroit plus i
qu’il ne l ’enfeigneroit, n’en parleroit, ni n’en feroit aucune
mention ; & tous les freres qui étoient prefens, fc
réjouirent de cette conformité de fentimens. Rare exemple
d’une difpute vraïemcnc chrétienne.
if
L i v r e s e p t i e ’m e . 3/1
Dans ce même ouvrage, S. Denis d’Alexandrie trai-
toit de l’autorité de l’Apocalypfe, qui étoit le principal
fondement des Millénaires. Il dit que quelques-uns de
leurs prédeceffcurs la rejettoient entièrement , comme
portant un faux titre , & étant l’ouvrage de l’herefiar-
que Cerinthe. Pour moi, dit-il, je n’ofe rejetter ce livre
, dont plufieurs de nos freres font tant de cas : mais
j’eftime qu’il eft au-deffus de ma capacité ; & je foup-
çorne qu’il contient une doétrine cachée & merveil-
leufe. Car quoique je ne l’entende pas, je me doute que
fes paroles enferment un fens plus profond ; & je ne les
mefure pas par ma raifon particulière : je donne plus à
la fo i; ¿¿'loin de condamner ce que je n’entends pas , ce
m’eft plutôt une raifon pour l’admirer. Or quoiqu’il
convînt que l’auteur de ce livre étoit un faint & un
homme infpiréde Dieu , il ne croïoit pas toutefois que
ce fût S. Jean l’évangehfte. Car , dit-il, je crois qu’il y
en a eu plufieurs de même nom que Jean l’apôtre , qui
ont été excitez à prendre ce nom , par l’amour qu’ils
portoient à fa perfonne , l’admiration & l’émulation de
fes vertus, &c le defir d’être aimez du Seigneur comme
lui : ainfi nous y v.oïons que les enfans des fideles portent
fouvent les noms de Pierre & de Paul Les raifons
de S. Denis, pour montrer que l’auteur de l’ApoCalypfe
n’eft pas S. Jean l’apotre , font tirées la plupart de la dif-
ferencè du ltyle ; mais fon opinion fur ce point n’a pas;
été fuivié ; & toute l’églife catholique a reconnu le livre
de l’Apocalypfe , non feulement pour écriture canonique,
mais pour l’ouvrage de S. Jean l’apôtre.
De tous les écrits de S Denis d’Alexandrie , le feuf . Lvr.
qui nous refte entier & indubitable,eft la lettre canoni- a fs. D.ni° Î?Â'
que à l’évêque Bafilide,qui l’avoit conlulté fur plufieurs i.f.
points de difeipline. Le premier, de fqavoir à quel- 8}1-