
52.8 H IS T O I R E E C C L E S I A S T I QJJE.
un jeune homme bien fait de corps 6c d’efprit, de bonnes
moeurs, qui avoir du genie pour la guerre , & une
honnêteté finguliere;en forte que les foldatsl’aimoient,
6c le peuple le defiroit : il y avoir long-temps que Dio-
eletien l’avoit fait tribun du premier rang ; &c il étoit
alors prefent à Nicomedie. Mais Galerius craignit de
n’être pas affez le maître , s’il faifoit cefar un homme
de ce mérité 6c fi agréable à tout le monde ; il voulut
avoir des gens quidépendiifent de lui abfolument. Qui
ferons-nous donc cefars, dit Diocletien ? Galerius dit:
Severe. Quoi, dit Diocletien, ce danfeur, cet ivrogne,
qui fait de la nuit le jour,& du jour la nuit ? Il en eft digne
, dit Galerius, il a fidelement commandé les troupes
; 6c je l’ai envoie à Maximien pour recevo’ir de lui
la pourpre. Diocletien dit : Soit. Quel autre nous donnerez
vous } Celui-ci, dit Galerius, montrant fon neveu
fils de fa foeur nommée Daïa ou Daza, qui étoit un jeune
homme demi barbare, à qui Galerius avoit donné le
nom de Maximin, approchant dé fon nom de Maximien.
Diocletien dit en foupirant : Ce ne font pas là des
gens capables de foutenir l'état. Mais c’eft déformais
votre affaire ; j’ai affez travaillé 5 s’il arrive quelque inconvénient
, on ne s’en prendra pas à moi.
Les chofes étant ainfi réfoluës,ils parurent le premier
jour-de Mai l’an 305. A trois milles de la ville étoit une
éminence au haut de laquelle Galerius lui-même avoit
reçu la pourpre , 6c onyavoit érigé unecolomne,avec
une ftatuë de Jupiter. Ils y allèrent ôc affemblerent les
foldats pour les haranguer. Le viel empereur dit en
pleurant : qu’il^ étoit infirme ôc demandoit du repos
après fes travaux, qu’il laiffoit l’empire aux autres plus
vigoureux 6c fubftituoit d’autres ceiars. On étoit dans
une grande attente, ôc tout le monde jettoit les yeux
L i v r e n e u v i e ’m e .'
fur Conftantin,qui étoit fur le tribunal. Tout d’un coup
Diocletien déclaré cefars Severe 6c Maximin. La furpri-
fe fut grande. On demandoit fi Conftantin avoit changé
de nom. Mais Galerius étendant la main repouffa
Conftantin , tira Daïa , qui étoit derrière ; lui ôta fon
habit ordinaire 6c le mit en prefence. Tout le monde
demandoit qui il étoit & d’où il étoit venu ? mais ils
étoient fi furpris, queperfonne n’ofa parler. Diocletien
fe dépoüilla de fa pourpre 6c la jetta fur ce jeune homme.
Ils defcendirent du tribunal ; Diocletien traverfa
la ville en chariot, 6c fut renvoie dans fon pais, étant
redevenu Diodes & fimple particulier ; il retourna à
DiocléeenDalmatie. Le nouveau cefar Daïa ou Maximin
eut le gouvernement de l’Orient. Il n’y avoit pas
long-temps qu’il avoit été tiré des forêts, 011 il gar-
doit des troupeaux ; il avoit été d’abord écuïer, puis
protecteur, c’eft-à-dire garde du corps, puis tribun 6c
enfin cefar, & tout cela en très-peu de temps ; il ne
fçavoit ni la guerre ni les affaires.
Son oncle Maximien Galerius fe regarda dès-lors comme
le maître du monde. Ce n’eft pas qu’il n’eût partage
avec Conftantius, enforte que Galerius avoit l’i l—
lyrie, la Grece 6c l’Orient, & Conftantius la Gaule, l’Ef-
pagne, 1 Italie 6c l’Afrique ; mais il refufa l’Italie 6c l’A frique:
6c d’ailleurs Galerius nelecomptoitgueres. Car
Conftantius étoit doux naturellement, & alors affoibli
par la maladie ; enforte qu’il efperoit le voir mourir
bien-tot, ou le dépouiller aifément ; croïant qu’il ne
pourroit lui feul refifter à trois. Galerius avoit un ami
qu il confultoit fur toute ia conduite j aïant contracté
avec lui une liaifon fort étroite dès le commencement
qu’il avoit porté les armesfc’étoit Licinius. Maisiln’a-
Voit pas vpuLu le faire cefar, de peur de l’adopter pour
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Tyranje if
niien Galerius.