
3 18 H i s toire E ccl es ias tique .
Montan racontoit fon fonge. Jufques ici les martyrs
écrivirent eux-mêmes dans la prifcn ce qui leur étoit
arrivé , le refte fut écrit par ceux qui étoienr prefens:
à qui le diacre Flavien l ’un des martyrs l’avoit recommandé.
Les martyrs demeurèrent plufieurs mois en prifon,
& iouffrirent long-tems la faim & la foif. Enfin, ils furent
préièntez au gouverneur, & confefïèrent tous glo
rieufement, mais les amis de Flavien iè recrierent, foû-
tenant qu’il n’étoir point diacre , quoiqu’il l’avoüât ; &
par confequent n’étoir point compris dans l’ordonnance
de l’empereur, pour être condamné à mort. Il fut
doncrenvoyé en prifon; & les autres jugez : foavoir,
Lucius, Montan, Ju lien , V id o ric . On les mena au lieu
de l’execution, où il y eu t un grand concours de gentils ;
& tous les fideles y vinrent ; car les inftru&ioris qu’ils
avoient reçues de S. Cyprien , leur faifoient honorer
particulièrement les martyrs. Ceux-ci marchoient avec
un vilàgegai, & chacun d’eux exhorta le peuple. Lucius
naturellement doux & modefte étoit abbatu de maladie
& de l’incommodité de la prifon. C ’eft pourquoi il marcha
devant, accompagné de peu de peribnnes ; de peur
q u il ne fut accablé de la'foule , & n’eut pas l’honneur
de repandre ion iang. Il ne laifta pas de parler comme
il pût à ceux qui l’accompagnoiént. Les freres lui di-
foient : Souvenez-vous de nous. Vous - mêmes, dit-il,
iouvenez-vous de moi : tant il préfumoit peu de la gloire
de fon martyre. Julien & Viétoric exhortèrent long-
tems les freres a la p aix, & leur recommandèrent tous
les clercs, particulièrement ceux qui avoient foulagé
leur faim dans la prifon.
zaxx.i .io. Montan étoit fort de corps & d ’eiprit. Il crioit: Celui
qui facrifie aux faux dieux, ièra exterminé : fi ce n’eft
L i v r e s e p t ï e ’m e . j i g
I au Seigneur lèul ; ce qu’il répéta plufieurs fois. Il repri-
I rnoit l’orgueil & la témérité des heretiques : leur di-
I fant, qu’ils devoient connortre lavrayeéglife,aumoins
I par la multitude de lès martyrs. Il exhortoit ceux qui
I étoient tombez , à ne iè point preflèr& à accomplir leur
■ pcnitence ; les autres à demeurer fermes, les vierges à
I conièrver leur pureté : tous generalement à honorer les
■ évêques ; les évêques à la concorde. C a r , difoit-il, c’eft
I fouffrir pour J . C. que de l’imiter , & donner par nos
■ exemples des preuves de notre foi. Le bourreau aïant
I déjà levé l’épée fur là tête, il étendit les mains à Dieu,
I & pria à haute v o ix , enforte que les païens mêmes l’oüi-
I rent : que Elavien les fuivît le troifiéme jour. Il déchira
I en deux le mouchoir dontildevoit le bander les yeux,
I & en fit garder la moitié pour Flavien. Il fit auilï garder
I pour lui une place dans l’aire, où on devoit les enterrer;.
■ afin qu’ils ne fuflênt pas fèparez de ièpulture.
Flavien étoit retourné dans la prifon fort trille , d’ê-
I tre féparé d’une fi bonne compagnie : mais ilfefoûmet-
■ toit à la volonté de Dieu. Sa. mere qui ne le quittoit
I point , étoit auffi affligée que lu i , de ce rétardement.
I Yous foavez, ma. mere, lui difoit-il, que j’ai toûjours
■ fouhaité d’avoir le loifir de joüir du martyre : de paroi-
I tre fouvent avec lès chaînes, & d’être fouvenr remis.»
I Une nuit comme il étoit affligé d’être demeuré après
I lès confrères, un homme lui apparut, & lui dit rDequof
I vous affligez-vous ! vous êtes confelTeur pour la troifié—
I me fois, & vous ferez martyr par le glaive : ce qui le
I trouva véritable. Il crut-voir auffi l’évêque Succelfus ,,
I qui avoir fouffert avec Paul & avec d’autres. Succelïus-
I avoir le vifage & l’habit fi éclatans , qu’à peine Flavieni
I k put reconnoître. Je fuis venu, dit-il, vous annoncer'
I que vous devez.fouffrir. Auiîi-tôt. vinrent deux ioldats