celui qui s’ouvre sur la mer Egée, il y a aussi des oscillations de l’eau,
de type déréglé, de 14 à 16 vagues en 24 heures, en moyenne d’une
durée de l h40m™.
Les faits étant ainsi constants, voici mon explication basée sur le
phénomène des seiches. Il y a normalement deux variations périodiques
de la hauteur de l’eau au détroit de Chalcis ; la première est due
aux marées luni-solaires, dont la vague arrive de la mer Egée par
l’Euripe d’Erethria, l’autre est due aux seiches du bassin fermé du
canal de Talanti, qui s’étend au nord-ouest de Chalcis, entre l’Eubée
et la Béotie, sur une longueur de 111k™ jusqu’au fond du golfe de Zilani.
Ces deux variations périodiques, l’une de cause astronomique,
l’autre de cause atmosphérique, se superposent, et un marégraphe
établi à Chalcis dessinerait les deux courbes, brodant l’une sur l’autre,
comme nous avons vu fig. 55, page 97, les seiches transversales
du Léman broder sur les longitudinales, dans les tracés de Morges.
Or, suivant que l’eau est plus élevée d’un côté du détroit de
l’Euripe que de l’autre, il se produit des Courants tendant à égaliser
cette différence de niveau, et marchant ou dans un sens ou dans
l’autre. Une marée haute venant de la mer Egée tendra à déterminer
un courant d’entrée dans l’Euripe (marchant du sud au nord), une
seiche haute dans le canal de Talanti tendra à déterminer un courant
de sortie de l’Euripe ; et l’inverse pour les marées basses et les
seiches basses. Mais quelle qu’en soit l’origine, les courants ne se
produisent que s’il y a différence effective de niveau.
Ces deux ordres de variations sont de hauteur différente suivant les
circonstances. Les marées sont fortes aux syzygies, faibles aux quadratures
; les seiches sont hautes quand la pression atmosphérique est
variable et quand le temps est orageux (voir au paragraphe subséquent).
Suivant donc la hauteur relative des deux ordres de variations,
l’une ou l’autre peut être prédominante, et celle-ci déterminera le
3 jours de suite, le. courant coule très paresseusement, à raison 'de 1 Va à 3km à
l ’heure (tandis que les courants réglés de syzygie marchent beaucoup plus vite,
jusqu’à 13 Va1"" l’heure) ; sa direction n’est déterminée par aucune règle ou loi que
j ’aie su découvrir. Parfois il reste stationnaire pendant une demi-heure, puis
soudain il marche dans une autre direction pendant une demi-heure ou plus. Je
l ’ai vu parfois changer de direction 3 fois, et même dans quelques occasions
ju sq u ’à 5 fois dans une heure, et cela sans cause apparente,, le temps étant parfaitement
calme et le ciel sans nuage. Dans d’autres occasions,,jè l’ai vu marcher
d u côté du sud pendant tout un jour, restant seulement stationnaire de temps en
temps...* Mansell, in litt., 38 avril 1880.
rythme des courants de l’Euripe. A l’époque des syzygies, ce doit être
ordinairement les marées luni-solaires qui l’emportent ; à l’époque des
quadratures, ce doit être les seiches, toutes choses égales d’ailleurs.
C’est ainsi qu’aux syzygies, alors que les marées sont à leur maximum
d’amplitude, il faudrait des seiches énormes pour qu’elles se
dessinassent- par les courants de l’Euripe, et les quatre inversions
par jour synodique, du courant réglé sont la norme; aux quadratures,
quand la marée est très faible, les plus petites seiches peuvent
la dépasser en hauteur, et ce sont lep seiches qui déterminent
les courants de l’Euripe ; le courant est déréglé.
Mais sont-ce bien des seiches, c’est-à-dire des vagues d’oscillation
fixe en bassin limité qui causent les variations rapides du courant
déréglé? Cela semble probable. Nous connaissons le beau développement
des seiches du Léman, avec la longueur de ce lac de 72km et la
profondeur de 310™ ; pourquoi n’y en aurait-il pas dans le bassin
du canal de Talanti avec ses l l l k™ de longueur et ses 440™ de
profondeur maximale ? Les seiches du premier ont une durée de
72 minutes, pourquoi celles du second n’auraient-elles pas la période
un peu plus lente des courants déréglés. J’ai essayé d’y appliquer le
calcul par le procédé P. du Boys (v. p. 123) en me basant sur la carte
hydrographique publiée par M. Krümmel, établie d’après les cartes de
l’Amirauté anglaise. J’ai trouvé que la seiche longitudinale uninodale
du bassin de Talanti devrait avoir une durée d’environ 149™in, disons
2 >/2 heures, la binodale 75™™, ou 1 g&i; ; les plurinodales seraient naturellement
plus courtes encore. Cette durée correspond assez bien à
ce que nous savons des oscillations du courant déréglé de l’Euripe
pour que nous puissions, avec toute probabilité, attribuer celles-cr à
des seiches Q), en attendant que des tracés marégraphiques corrects
nous permettent de formuler une conclusion définitive.
Quant aux seiches que M. Krümmel constate d’après les observations
Mansell et Miaulis dans le détroit de l’Euripe d’Erethrie, au sud
de Chalcis, elles doivent compliquer le phénomène des courants de
l’Euripe ; mais nous n’en avons pas besoin pour la solution du
problème.
Cette solution est très simple. Je la répète en la condensant : Quand
(1) En somme les courants déréglés de l ’Euripe seraient tout à fait analogues aux
courants des seiches que j ’observe au g o l é r o n du port de Morges (v. p. 53).