d’une telle manière le niveau local du lac, que la moyenne réelle de
hauteur est fort difficile à apprécier.
Si la pente du lac avait existé, je l’aurais reconnue par une différence
systématique entre les séries d’observations de l’été et celles de
l’hiver. Au printemps, avec le fort débit du Rhône du Valais et la crue
progressive du lac, la pente du Grand-lac aurait été exagérée ; en automne,
avec le grand débit du Rhône de Genève et la décrue générale
du lac, la pente aurait dû être à son maximum dans le Petit-lac ; en
hiver, au contraire, les actions de dénivellation étant réduites à des
valeurs très faibles, la pente aurait dû être à peu près nulle. Il y aurait
donc eu des différences notables de régime dans les comparaisons
faites entre nos deux limnographes, suivant les saisons. Je n’en ai pas
reconnu trace.
Il est vrai que E. Plantamour, en comparant les moyennes mensuelles
de Vevey et de Sécheron dans les années 1874 à 1880, a trouvé
une pente :
aux basses eaux, hauteur du lac ZL -j- 1.14™, pente de 1.7mm
aux hautes eaux, » + 2.36 » 5.4
M. .T. Epper, ingénieur au bureau des travaux publics de la Confédération,
a fait une comparaison des moyennes limnirnétriques mensuelles
de Chilien et de Sécheron pendant 56 mois, de janvier 1885 à
décembre 1889. La différence qu’il a trouvée entre ces deux stations
n’est que de 4m™, l’eau étant plus élevée à Chillon qu’à Genève. (')
Il résulte de ces diverses recherches et comparaisons que la pente
du lac est très faible, et qu’elle ne dépasse pas un centimètre entre le
Grand-lac, qui peut être considéré comme étant de niveau, et l’extrémité
du Petit-lac à Sécheron, à l’entrée du banc du Travers.
Quant à la pente de la sortie du lac, à Genève, en aval du banc du
Travers, et spécialement à partir des entrées du port, nous en avons
suffisamment parlé dans notre chapitre de la limnimétrie (2). Nous n’avons
pas à y revenir.
(1) Observations hydrométriques suisses. Tables de récapitulation de l ’année
1889, p. 37. Berne.
(2) T. I, p. 415 sq.
VII. Dénivellations temporaires.
Dans les paragraphes précédents, j’ai traité des dénivellations qui
maintiennent d’une manière constante la hauteur du lac plus ou moins
élevée sur telle rive que sur telle: autre. J’arrive aux dénivellations
temporaires par lesquelles le niveau moyen, altéré déjà par les causes
constantes, est, accidentellement et pendant un temps limité, dévié de
son état d’équilibre.
D’après leur origine je les divise en deux groupes, suivant que leurs
causes déterminantes sont astronomiques ou atmosphériques.
VIII. Dénivellations temporaires à causes astronomiques.
Marées.
L’attraction des astres détermine sur l’océan les dénivellations
temporaires semi-journalières, connues sous le nom de marées.
Existe-t-il des marées sur notre lac ? La question peut se poser. En
effet, si théoriquement les marées n’ont lieu que dans une masse d’eau
illimitée recouvrant sans interruption la surface d’un globe, cependant
on en a constaté dans des bassins d’eau qui, sans relations largement
ouvertes avec l’océan, occupent une fraction relativement bien peu
considérable de la surface du monde.
Ainsi la Méditerranée a incontestablement des marées et leur amplitude
peut même être assez forte; elles atteignent, aux grandes marées
de syzygie à Livourne, 30cm, à Venise 60 à 90 cin, au fond du golfe delà
Grande Syrte jusqu’à 2m. (l)
« Le lac. Michigan, » dit Reclus, « est la plus petite nappe lacustre
où l’on ait constaté avec précision le retour régulier du flux et du
reflux; l’amplitude de la marée y est, d’après le lieutenant Graham,
(*) E. Reclus. La Terre. Paris 1862, II, p. 147