NEUVIÈME PARTIE
ACOUSTIQUE
Vitesse de la transmission du son dans l’eau.
La question de la propagation du son dans l’eau douce a été étudiée-
expérimentalement, pour la première fois, dans le lac Léman, par
Daniel Colladon, de Genève, en 1826, à l’occasion des recherchés sur la
compression des liquides que ce physicien faisait en collaboration
avec Ch. Sturm (*). Voici comment l’expérience fut instituée. Deux
bateaux étaient ancrés à 200™ dé la rive, l’un devant Rolle, l’autre
devant Thonon, séparés l’un de l’autre par une distance de 13487™,
A l’un de ces bateaux était suspendue, à 1.5™ de profondeur sous
l’eau, une cloche de bronze pesant 65ks ; un marteau était articulé de
manière à frapper la cloche et à produire ainsi un son net et unique,.
En même temps une lance à feu fixée au manche du marteau allumait
une masse de poudre et déterminait un roclair qui coïncidait exactement
à l’instant du coup sur la cloche. Dans l’autre station le bateau
portait un cornet acoustique consistant eniün tube en fer-blanc de 5™'
de long terminé par un pavillon ovalaire de 20d™2, fermé lui-même par
une feuille de fer-blanc verticale. Ce tube plein d’air s’appliquait, par
(4) Mémoire su r la compres sion\des liquides par MM. D. Colladon et C. Sturm.
Mémoires des savants étrangers à l’Académie des sciences de Paris. Tome V.
Paris, 1887, p. 63 sq .:
-son extrémité supérieure terminée en pointe, dans l’oreille de l’observateur,
la plaque verticale du pavillon étant dirigée dans la direction
d’où devait venir le son, et le bruit de la cloche frappée à distance parvenait
avec une netteté extraordinaire à l’oreille.-
L’expérience se faisait de nuit, de telle manière que l’observateur
muni du cornet acoustique pût voir la lueur de l’éclair (la courbure de
la terre ne lui permettait pas de voir la flamme même de la poudre en
- combustion), il notait l’instant de l’explosion coïncidant avec l’instant
de la production du son, et notait l’instant de la perception du son en
moyenne 9.4 secondes après. D’après ces expériences, la vitesse de la
transmission dans l’eau est de 1435 mètres par seconde, vitesse à peu près
4 fois plus rapide que celle du son dans l’air qui n’est que de 341™.
Une seconde série d’expériences (*) a été faite par la même méthode
en août 1841 par D. Colladon, assisté par Müller, professeur à Nyon,
entre Pçomenthoux et Grandvaux, près Cully, et même entre Promen-
thoux et Chillon, Ces expériences n’ont pu servir à déterminer la
vitesse de la transmission dans l’eau, les observateurs n’étant pas
arrivés à apercevoir la lueur produite par la combustion d’une livre de
poudre brûlée à chaque essai ; mais la perception très nette du coup à
36 et 51km de distance montre l’excellence de la propagation du sOn
•dans l ’eau.
Colladon a fait; à cette occasion une foule .d’observations très
intéressantes qui montrent entr’autres, à l’aide d’un cornet hydro-
acoustique, que les vibrations peuvent persister assez longtemps dans
l’eau, que l’on peut reconnaître le timbre des bruits, distinguer par
exemple le bruit des chaînes d’une barque dont on lève les ancres
à 3 ou 4k™ de distance, que malgré l’interposition d’un promontoire,
le son peut encore très bien être perçu dans l’eau, etc., etc.
Transmission du son dans l’air à la surface du lac.
L’audibilité des ondes sonores à distance est très variable d’un jour
à l’autre c’est ce que chacun a pu constater. Ces différences ne
s’étudient nùlle part mieux qu’à la surface d’une nappe d’eau où
aucun obstacle solide ne s’oppose à la propagation du son.
d) Dan. Colladon. Expériences relatives à la production et à la transmission du
son dans l’eau. Bibliothèque universelle de Genève, août 1841.