d ’un tremblement de terre à l’autre, — si toute secousse dé même
intensité est accompagnée nécessairement de mouvements de l’eau de
même amplitude, — si, à côté des secousses ayant produit les raz-de-
mer dont l’histoire a gardé le souvenir, il n’en a pas existé d’autres,
de même force, qui n’ont pas agité ou n’ont que peu ébranlé la mer ?
Cette lettre a obtenu plusieurs réponses très intéressantes, entre
autres de M. M.-E. de Rossi, de Rome, de M. Tardy, de Rourg-en-
Rresse, de M. Chaplin, de Tokio, au Japon. En raison de son importance,
je reproduis ici intégralement la lettre de M. de Rossi « J’ai
vu avec plaisir, à propos des seiches du lac de Genève, dans votre
livraison du 9 mars, une lettre de M. le docteur Forel, dans laquelle il
est question de l’influence des tremblements de terre sur les seiches
des lacs. M. Forel constate le fait que souvent, pendant des secousses
très sensibles, les lacs ne donnent pas des vagues ou des seiches, tandis
que, d’autres fois, les lacs prennent de très grands mouvements
sous l’influence des tremblements de terre.
» Je dois faire observer que, dans ce phénomène des tremblements
d e te rre , comme dans les seiches, les lacs se comportent tout à fait
suivant les lois du pendule. Nous avons parfaitement constaté dans
nos dernières études, en Italie, qu’il peut bien survenir un tremblement
de terre sensible, sans que le sismographe à pendule donne
aucune trace de mouvement. En revanche, il arrive très souvent de
voir un pendule entrer en grande oscillation sans que la secousse soit
ressentie par personne. 11 m’a été possible d’avertir moi-même de
l’existence d’un tremblement de terre très sensible, signalé en môme
temps par beaucoup de personnes, et d’avoir sur le champ observé au
microscope huit pendules de différentes longueurs, sans avoir pu y
remarquer un mouvement d’aucune sorte. Evidemment, ce fait dépend
d e la relation entre la longueur du pendule et la célérité des vibrations
terrestres. Lorsque l’onde sismique est s y n c h ro n e à l’oscillation
naturelle du pendule, celui-ci prend un grand mouvement. Mais, lorsqu’elle
est d is s y n c h ro n e , le pendule se refuse plus ou moins à suivre
le mouvement de la terre. Cela arrive de la même manière dans
les roches de la croûte terrestre, et surtout dans les plus mobiles
«d’entre elles, c’est-à-dire dans les lacs. »
La science moderne a fait des pas considérables dans la connais.(')
La Nature, VI, I, 282. Paris, 30 mars 1878.
sance des tremblements de terre, grâce aux excellents sismographes
des Anglo-Japonais, et spécialement grâce au sismographe d Ewing
qui nous a révélé les caractères de la secousse sismique. Ces appareils,
en nous-montrant graphiquement ce que sont la secousse et les oscillations
qui la composent, nous permettent de mieux juger les rapports
éventuels du phénomène avec les seiches. Voici le résumé de l’expérience
qu’ont acquise les physiciens de l’extrême orient de l’Asie, par
leurs travaux dans une terre bénie pour l’étude des mouvements du
sol. (>)
a] Une secousse sismique consiste en une série d’oscillations d’amplitude
d’abord progressive, puis décroissante.
b] Généralement les oscillations commencent par être très faibles
et n’atteignent leur amplitude maximale qu’après quelques secondes
de temps.
a/ La durée des oscillations, leur grandeur, leur direction varient
■considérablement dans la série d’une même secousse.
d) La durée de la série d’oscillations qui constitue la secousse est
rarement inférieure à une minute ; elle est fréquemment de plusieurs
minutes.
a! Même dans les forts tremblements de terre, le déplacement du
aol dépasse rarement quelques millimètres ; quand la secousse est faible,
l’oscillation nîatteint pas un millimètre d’amplitude.
f] La durée moyenne des oscillations du sol est Va seconde environ ;
on a vu des secousses dans lesquelles il y avait 5 oscillations et même
plus par seconde.
gj Le mouvement dans le plan vertical est ordinairement plus faible
•que dans les plans horizontaux.
La durée de l’oscillation du sol est donc remarquablement courte:
dans la généralité des cas. Exceptionnellement, on a vu une duréë
plus longue. C’est ainsi que le 18 avril 1889, l’observatoire sismologique
de Tokio a enregistré une secousse, dont les oscillations extraordinairement
lentes avaient une durée de 4 à 7 secondes chacune ; faibles
au début, elles ont atteint une'amplitude horizontale de 17«™.
Une aussi grande paresse des oscillations, jointe à un aussi fort déplacement
du sol, n’avait jusqu’alors jamais été enregistrée par un sismographe.
Pendant ce temps, le professeur West, du Collège des ingé{')
J.-À. Ewing. Earthquake measurement. Tokio, 1883.
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