étaler en nappe horizontale, et v déposer leur alluvion suspendue
en formant la plaine centrale. Pour les affluents directs, non
glaciaires, leur écoulement est un peu plus compliqué. Si nous en
jugeons par 1 exemple du ruisseau la Morge, le seul que nous ayons
étudié (*), pendant la petite moitié (0.4) de l’année, les eaux de
l’affluent, plus légères que celles du lac par le fait de leur température
relative, s’étalent à la surface du Léman; pendant la grande moitié
(0.6) de l’année, les eaux de l’affluent descendent, ou entre deux eaux,
ou dans le profond du lac. Ce dernier cas doit se présenter toutes les
fois que la rivière, grossie par la pluie ou par la fonte des neiges,
charrie des eaux salies et alourdies par l’alluvion. Quand donc leur
ti ansport d eau est considérable, aussi bien pour le Rhône que pour
les affluents directs, les eaux fluviátiles descendent dans les grands
fonds du lac ; quand leur transport est faible, et c’est alors qu’elles
sont le plus chargées de matières en dissolution, le plus souvent elles
restent à la surface.
Une des causes d’altération du lac qui mérite le plus d’attention
est l’eau versée par les égouts des villes riveraines. Les quantités
d eau sale sont peu importantes, mais leur forte charge en matières
organiques décomposées, en microbes et en germes, peut avoir un
intérêt capital au point de vue hygiénique. Les eaux d’égout seraient
évidemment dangereuses, si elles entraient dans l’alimentation de
l’homme et des animaux.
Les eaux d’égout sont toujours des eaux lourdes ; elles sont
surchargées de matières en suspension et en dissolution, et par
conséquent leur densité est supérieure à celle de l’eau relativement
pure du lac. Les eaux de l’égout principal de la ville de Morges, que
je surveille depuis nombre d’années, à côté du débarcadère des
bateaux à vapeur, ne s’étalent jamais à la surface ; elles font cascade
sur le fond de la beine et y progressent lentement en nuages arrondis
et bien limités, qui cherchent les déclivités (®). Les eaux d’égout tendent
donc à descendre en masse le long des talus du lac et à gagner
les grands fonds.
Elles peuvent cependant être entraînées loin de la ligne de plus
grande pente par un courant horizontal ; une ladière (v. p. 285), dont
la vitesse est sujjérieure à leur écoulement très paresseux, peut les
faire dévier latéralement fort loin de leur trajet naturèl.
D’une autre part, les égouts entrent dans le lac à une profondeur
assez faible pour que, en temps de vagues, leurs eaux se mélangent
avec les eaux de surface du lac; dans ce cas, les eaux littorales peuvent
être polluées jusqu’à d’àssez grandes distancés. Il est vrai que,
dans cës circonstances, les courants développés par le vent sont assez
énergiques pour que la massé d’eau lacustre qui reçoit la petite quantité
d’eau d’égout soit relativement très considérable ; au point de vue
quantitatif, la solution doit être extrêmement étendue. Mais cbmme,
aù point de vue hygiénique, un seul microbe peut être nocif, il y a
lieu cependant de tenir compte de cette éventualité, si l’on veut
demander au lac l’alimentation d’eau d’une ville.
Les précipitations aqueuses atmosphériques, pluie, neige, grêle,
eau de condensation, sont de l’eau presque pure. La pluie ne contient
que 2 à 3 milligrammes d’ammoniaque et d’acides nitrique et nitreux,
de nitrites et de nitrates, environ 50m» de matières organiques révélables
par le permanganate de potassium (l). Elle est donc, au point de vue
des matières organiques, plus riche que l’eau du lac, mais pour ce qui
concerne, les matières minérales, elle peut être regardée comme étant
de l’eau pure. Ne considérons actuellement que ce dernier point de
vue. La pluie se diffuse dans l’eau de surface du lac, et en affaiblit la
teneur en matières dissoutes.’
Il tombe, année moyenne, environ 0.9m d’eau de pluie sur la région
du Léman ; sur les 582km2 du lac cela représente 524 millions1115 ;
l’éau séjournant en moyenne 11 ans dans la buvette du lac 0 , . la
chute de pluie de ces onze années a un volume de 5770 millions1”3.
Or cette quantité n’est que le 0.06 de la masse constante de 88900 millions
de mètres cubes qui constitue le lac Léman. C’est donc dé 6 °/0
environ que l’action totale de la pluie dilue l’eau des affluents du lac
pour la transformer en eau lacustre. C’est peu de chose.
Mais cette pluie ne tombe pas dans le lac en une fois ; elle s’y versé
0) Alberi-Lèvy. Annuaire de l'Observatoire de Mohtsoui*is, près Paris, pour
l’année 1879, p. 402.