échouer sur un fort. De même, d’après le témoignage d’Acosta, la
terrible vague qui démolit Callao, en l’année 1586, et qui lança un
grand navire sur la route de Lima, à 16 mètres au-dessus du niveau
moyen de la mer, aurait eu la hauteur totale de 27 mètres. » « Dans
le grand tremblement de terre de Lisbonne (1er novembre 1755),
un mur d’eau de 17 mètres de haut se dressa à l’embouchure du
Tage, remplit l’estuaire, dépassa les quais de la ville et se rua
dans les maisons. » Citons encore la destruction récente d’Arica, au
Pérou, 13 août 1868 et celle d’Iquique, sur la côte du Pacifique aussi,
le 9 mai 1877.
Citons encore l’exemple donné par Arago (*) pour justifier son opinion
que les seiches peuvent être causées par des tremblements de
terre. Après avoir rappelé le raz-de-mer du tremblement de terre de
Lisbonne, il ajoute : « Le tremblement de terre, beaucoup moins fort,
du 31 mars 1761, donna aussi lieu à une semblable agitation de vagues
à Lisbonne,' à Madère, à Cork, à Mount’s Bay (Cornouailles), à Bristol,
à Amsterdam et même à la Barbade. A Mount’s Bay, la mer s’éleva de
deux mètres et reprit son niveau cinq fois de suite, dans le court
espace d’une heure. »
Voyez encore le chapitre intitulé Les mouvements de la mer, dans
l’ouvrage de Fuchs sur les volcans. (-)
Ce n’est pas seulement la mer qui est agitée par les tremblements
de terre. Les bassins fermés des lacs ne sont pas à l’abri de ces mouvements.
Dans une énumération des tremblements de terre connus en Suisse,
avant l’an 1756 (3), je trouve les faits suivants :
Le 1er mars 1584, tremblement de terre dans toute la Suisse et les
pays voisins. « Le lac Léman, agité sans vent, s ’élance dans les terres
plus de vingt pas. »
« Le 16 septembre 1600, le cours du Rhône, près de Genève, fut
suspendu par un tremblement de terre. Le terrain, dans l’endroit d où
le Rhône sort du lac, fut soulevé ; ce soulèvement et l’abaissement qui
(1) F. Arago, îloc. cit. p. 169] p. 580.
(2) K. Fuchs, Les volcans et les tremblements de terre, p. 129 sq. Paris 1876.
(3) E. Bertrand, Mémoires historiques et physiques sur les tremblements de terre.
La Haye, 1757, p. 48 sq.
succéda donnèrent lieu à un flux et à un reflux. » Ce sont les célèbres
seiches de 5 pieds de haut, décrites par Fatio de Duillier. (*)
Le 8 septembre 1601, tremblement de terre dans toute la Suisse et
les pays voisins. « Le lac Léman fut ému. » A Lucerne, le cours de la
Reuss fut interrompu, en sorte qu’une partie tombait dans le lac et
l’autre partie rebroussa, et qu’on aurait pu passer à sec dans le lit
pendant un instant.
Le 1er septembre 1666. Tremblement de terre, à Arbon, au lac de
Constance : « Les eaux du lac s’avancèrent sur le rivage de plus de
25 à 30- pieds et se retirèrent subitement. »
Le 13 janvier L729. Tremblement de terre dans le canton de Berne.
« Sur le lac de Thoune, des bateaux furent poussés avec violence sur
les bords. »
Le 1er novembre 1755, le tremblement de terre dit de Lisbonne fut
ressenti en Suisse. « Le lac Léman eut, environ les dix heures du matin,
du côté de Vevey, la Tour, Cbillon, Villeneuve, un mouvement
sensible. Trois fois, ses eaux montèrent brusquement et se retirèrent
de même. Une barque partie de Vevey, allant à pleines voiles, recula
tout à coup. On n’a rien aperçu du côté de Morges ni de Genève.
« Des pêcheurs qui étaient sur le lac de Nidau sentirent leur petit
bateau emporté et ramené par une sorte de courant, et soulevé ensuite
par des flots alternatifs, quoiqu’ils n’aperçussent aucun vent extérieur.
« Les lacs de Brienz et de Thoune, surtout le premier, s’avancèrent
successivement sur le rivage et s’en éloignèrent ensuite; le cours de
l’Aar, sortant du premier pour entrer dans le dernier, parut un instant
retardé. »
Dans le petit lac de Seedorf, « l’eau haussa tout à coup et baissa
ensuite, se remettant comme auparavant. »
« Le lac de Zurich, surtout le lac supérieur, au-dessus de Rappers-
wyl, fut agité èt soulevé sans aucun vent extérieur. Il haussa différemment
de 6, de 10, jusqu’à 12 pieds. Les phénomènes durèrent 6 à
(*) Au sujet de celte observation, je dois faire une réserve. Le tremblement de
terre indiqué par Spon dans son Histoire de Genève, I, 417, et admis par Bertrand,
n’a été confirmé par aucun autre auteur et n’est basé que sur l’existence des seiches.
J ’estime plus probable que les seiches ont, comme je l’ai dit plus haut, été
causées par l’orage qui a éclaté au moment même du commencement des oscillations
de l’eau (voyez p. 192).