imagination des Italiens et de mettre sous l’invocation d’unè autre fée,
la fée des brouillards, ces visions fugitives, sans corps ou sans réalité!
Je l’appelle F a ta -b rum o s a .
Je l’ai observée dans des conditions analogues à celles de la F a ta -
m o rg a n a , dans des après-midi chaudes et calmes de belles journées
de printemps (8 avril 1889, 9 et 12 mai 1890, etc.). Je trouve cependant
dans mes notes l’indication de légères brises, ou plutôt de bouffées
d’air locales soufflant irrégulièrement sur le lac.
L’apparition consiste essentiellement en un simulacre de brouillards
s’élevant par places au-dessus du lac, ces brouillards n’ayant du
reste aucune réalité et n’étant que des jeux optiques. Le lac est blanc,
la côte opposée grise; les pseudo-brouillards ont exactement la teinte
du lac, tellement qu’en certains cas ils semblent des vagues gigantesques
soulevant la surface du lac.
Le 8 avril 1889, à 16!>40, vue du quai du château de Marges, on
i f | . v-;: .
(Fig. 152.) Fata-brumosa, vue de Morges, 8 avril 1889.
aurait dit une épouvantable inondation, un ras de marée gigantesque
arrivant de Genève, et ravageant la côte de Savoie, vers Thonon et là
Drance, sous sa vague destructive de dix ou vingt mètres de haut qui
recouvrait-successivement les maisons et arbres de la rivé (fig. 152). (i)
D’autres fois les brouillards sont plus limités ; ils semblent flotter
dans l’air (fig. 153).
(Kg. 153.) Fata-brumosa. Morges, 12 mal 1890,12".
Le phénomène est du reste peu élevé; je l’évalue au plus à 2 ou
4 minutes de degré.
(') Dans cette figure, il y a évidemment une erreur. Les deux pseudo-vagues du
pseudo-mascaret ne devaient pas s’élever au-dessus du plan général de la Fata-
brumosa; mon croquis a dessîïïe>lutôl l’impression q u e je subissais plutôt que la
réalité que je voyais. Je nîose cependant pas corriger ce dessin, l’image ayant
disparu et ne s’étant plus reproduite à mes yeux.
Ces faux-brouillards ne sont pas simplement, comme je l’ai cru
d’abord, un relèvement local du plan de l’horizon d’eau ; en effet, j’ai
vu le 12 mai 1890 les étages inférieurs d’une maison qui m’apparaissaient
nettement un instant auparavant, être masqués par la masse
des pseudo-brouillards qui s’avançaient au-devant de la dite maison
(fig. 152.)
Un des caractères les plus évidents dans tous les cas de Fata-
brumosa que j’ai observés, est l’irrégularité apparente dé l’horizon du
lac; au lieu de dessiner une ligne droite, nette et tranchée, il est
ondulé, irrégulièrement bosselé,' oscillant, vibrant, -
Ces brouillards n’ont rien de réel ; si l’observateur s ’élève en plus
de un ou deux mètres au-dessus de l’eau, ils s’évanouissent sans
laisser de traces.
Aussi bien les pseudo-brouillards que les ondulations de la ligne de
l’horizon, se déplacent progressivement dans le sens des airs de vent
qui soufflent sut; Je lac. Ce déplacement m’a semblé plus rapide que
celui que j’ai signalé dans. la Fata-morgana.
Ajoutôns enfin que cette Fata-brumosa peut coexister avec la Fata-
morgana. La zone, striée de cette dernière apparition peut se voir à
côté des simulacres de brouillards de la Fata-brumosa ; celle-ci représente
alors la partie élevée de l’horizon qui limite de côté la zone
striée de la Fata-morgana.
Mirages et déformations diverses en temps de réfractions
. sur ëau froide.
Les déformations des objets à l’horizon en temps de réfraction sur
eau froide sont parfois très bizarres, très variées et diverses. Elles sont
difficiles à décrire et difficiles à figurer, car elles sont presque insaisissables
; elles ne durent qu’un instant, elles se modifient très rapidement
et leurs contours sont essentiellement indécis. Elles se répètent
rarement de la même manière; elles sont d’apparition si fugace et si
peu précise que je n’essaierai pas d’en déterminer les conditions.
Je me bornerai à tenter d’en figurer quelques-unes, telles qu e je les ai
observées à l’oeil nu, avec une bonne jumelle ou avec une lunette
d’approche (l). Vu la difficulté de l’observation, je n’ose attribuer une
f1) Les images sont très peu nettes ; il faut éviter d’employer pour leur étude
des grossissements trop forts.