1 année 1715, la ville de Genève a élevé l’eau du lac à l’aide de
machines hydrauliques établies sur le Rhône, et à chaque génération
les besoins augmentant, elle a dû accroître les quantités d’eau qu’elle
livrait ainsi à sa population.
Je discuterai cette question en la traitant au point de vue théorique
et au point de vue historique.
Les eaux d’alimentation d’une ville doivent satisfaire à plusieurs
nécessités. Elles doivent servir à la fois d’eau potable pour l’homme et
ses animaux domestiques, d’eau d’arrosage pour les plantes de ses
jardins, d’eau de ménage, d’eau industrielle. Les caractères d’une
eau d’alimentation et ses qualités nécessaires peuvent s’étudier sous
plusieurs chefs.
I. L’eau doit contenir des substances fixes dissoutes. De l’eau de
pluie, ou de neige, de l’eau distillée ne sont pas potables ; elles sont
fades, insipides ; il leur manque les sels, et en particulier les sels calcaires
et la silice qui font de l’eau une substance alimentaire. Sous ce
rapport, les eaux lacustres sont excellentes ; celles du Léman avec
• 50 de sulfate de calcium
75 carbonate de calcium
4 silice
répondent aux meilleures conditions des eaux alimentaires.
On admet encore que les sels de chaux doivent, dans une eau potable,
représenter au moins la moitié du résidu. Cette condition est bien
remplie par l’eau du Léman avec ses 125m? de sels de chaux sur 175mc
de résidu sec.
II. L’eau d’alimentation ne doit pas contenir trop de sels dissous ; un
excès de sels de chaux et de magnésie la rendrait indigeste, en ferait
une eau d u re et non une eau d o u c e , suivant l’expression usitée en
hygiène. L’eau ne doit pas par les sels de chaux coaguler le savon, ce
qui la rendrait impropre aux usages de la buanderie; elle doit attendrir
les graines de légumineuses, haricots, fèves, etc,, qu’on y soumet
à la cuisson.
On admet que la somme des sels dissous dans une eau potable ne
doit pas dépasser 0.5fc’ par litre, que la quantité des sels de chaux ne
doit pas atteindre 0.48ï par litre. Sous ce rapport les eaux du Léman
sont excellentes ; elles ne contiennent comme total des résidus fixes
175™?, total des sels de chaux, 125mfc\
III. L’eau d’alimentation doit contenir des gaz dissous, à savoir les
gaz de l’air, oxygène, azote et acide carbonique ; elle doit être aérée.
Nous avons vu qu’à ce point de vue, l’eau du lac Léman est à l’état
de saturation, ou même d’excès de saturation. Les diverses analyses
nous ont donné par litre :
Oxygène de 5 .0 cm3 à 10.4
Azote de 11.9 à 17.3
Acide carbonique de 2.8 à 12.5
Tandis qu’à saturation dans les températures de 5 à 20°, l’eau contiendrait,
d’après les formules de Bunsen :
Oxygène de 5 .7 cm3 à 7.3cm3
Azote de 10.7 à 13.6
Acidé carbonique de 0.3 à 0.6
Lès eaux du lac sont donc à l’état de saturation ou de sursaturation
pour l’oxygène et l’azote, et contiennent un excès considérable
d’acide carbonique. Ce sont des eaux bien aérées, faiblement acidulées,
ce sont des eaux excellentes.
Ce qui est vrai pour les eaux de surface l’est aussi pour les eaux
profondes, comme l’ont prouvé les analyses de Walter. Les eaux profondes
ne sont pas autre chose que de l’eau de surface transportée dans
les profondeurs par des courants de convection thermique ou mécanique.
Elles sont loin d’être à l’état de saturation surélevée qu’autoriserait
l’excès de pression, mais elles ont le même état de saturation que
les eaux de la surface.
IV. Les eaux d’alimentation ne doivent pas contenir trop de matières
organiques dissoutes, sinon elles se putréfieraient facilement dans
les vases où elles séjournent. On évalue à 50ms, par litre, la limite
inférieure admissible pour de bonnes eaux d’alimentation.
Les analyses que nous avons citées, nous donnent, suivant les
auteurs et suivant les prises d’eau, des quantités de matières organiques
révélables par le permanganate de potassium variant de 5 à
15™fc'r par litre, la moyenne étant de 10mK>' environ.
Les quantités d’acide nitrique et d’ammoniaque doivent être minimes.
Les analyses de Lossier, qui ont séparé ces corps sont arrivées aux
extrêmes suivants :