Par le fait du maximum de densité de l’eau douce, la stratification a
des allures opposées suivant que la chaleur de l’eau est supérieure ou
inférieure à 4.0°. Quand la température du lac est plus élevée que le
maximum de densité, les couches les plus chaudes sont au-dessus des
couches les plus froides. Cet état, qui est conforme à la disposition
normale des couches d’un liquide quelconque, est ce que j ’appelle la
stratification thermique directe; quand le lac est plus froid que 4.0°,
les couches plus froides sont superposées aux couches plus chaudes,
et nous avons alors la stratification inverse. Dans ces deux cas, l’équilibre
est stable. Cette température critique du maximum de densité de
l’eau douce, a une telle importance dans la physique des lacs, que
nous n’hésitons pas à désigner sous les appellations d'eaux chaudes et
d’eaux froides, celles qui sont plus chaudes ou plus froides que 4°0.
Cela nous abrégera un peu les descriptions.
Les échanges thermiques ayant lieu presque uniquement à la surface
supérieure du lac, on peut admettre que,- dans un lac suffisamment
profond, il subsisterait, dans les grandes profondeurs, une couche
immobile à 4°, maximum de densité de l’eau ; au-dessus de cette
couche, si le climat de la région le commande, il s’établit des couches
à température variable, à stratification directe pendant la saison
chaude, à stratification inverse pendant la saison froide.
Les actions thermiques extérieures au lac tendent à le réchauffer
ou à le refroidir, à lui livrer du calorique ou à lui en enlever. Par suite
de la grande capacité calorique de l'eau, plus grande que celle de l’air,
les variations thermiques seront plus rapides dans l’atmosphère que
dans le lac ; la température de l’air se réchauffera plus vite, se refroidira
plus vite que celle du lac. Le lac retardera donc sur les variations
climatiques (i) de la région, les variations thermiques se feront d’abord
sentir dans l’air, puis plus tard dans l’eau. Quoi qu’il en soit de ce
retard, le lac sera soumis à des variations de même signe que celles de
l’air ; il participera aux variations périodiques du climat, aussi bien à
la période de l’année qu’à celle du jour ; il subira un réchauffement
diurne et un refroidissement nocturne, un réchauffement estival et un
refroidissement hivernal. Ces deux courbes se superposeront l’une à
i1) Fatigué de la longueur et d e là lourdeur du mot climatologique, dans l’impossibilité
d’appliquer le mot dimatérique, qui a une toute autre signification (Climaté-
rique, qui appartient à un des âges de la vie regardés comme critiques, Littré), je
me décide à créer le mot climatique', il n’a pas besoin de définition.
l’autre, la variation journalière étant beaucoup moins intense, et pénétrant
moins profond que la variation annuelle.
Ces actions de réchauffement ou de refroidissement tendront, selon
les circonstances, à développer et perfectionner la stratification thermique,
ou bien à l’annuler.
Il y a donc à considérer deux procès, celui de s tr a tif ic a tio n et
celui d ’u n ifo rm is a tio n thermique du lac.
Procès de stratification. Un lac à eaux chaudes reçoit de la chaleur
par sa surface ; un lac à eaux froides perd de la chaleur. Dans les
deux cas, les eaux supérieures, déjà plus légères que les eaux sous-
jacentes, perdent encore de leur densité; la stabilité de l’équilibre en
est accrue; la stratification thermique, directe ou inverse, se développe
ou se perfectionne.
Procès d’uniformisation. Un lac à eaux chaudes se refroidit par sa
surface ; la couche supérieure, en perdant de la chaleur, se contracte,
devient plus lourde, tombe dans la profondeur et est remplacée par la
seconde couche qui subira bientôt le môme sort. Ce procès est un peu
compliqué : illustrons-le par un exemple.
Soit une série de couches A, B, Ç, D, etc., de température de 10°,
9°, 8°, 7°, etc., superposées en stratification directe :
A 10°
B 9°
C 8°
D 7«
E 6°
La couche supérieure A perd de la chaleur, elle devient plus froide
que la 2e couche B ; disons qu’elle s’abaisse à 8° */2. Devenue plus
lourde que la couche B, elle descendra et se logera entre’ B et C, et
nous aurons la superposition suivante :
B 9°
A
00
C 8°
D 7°
.E 6°