générale qui attribue aux vagues le vingtième de leur longueur, si
34™ est la plus grande longueur des vagues du lac, leur hauteur en
eau profonde ne doit pas dépasser 1.75™. C’est assez bien conforme à
l’observation.
Jusqu’à nouvel avis, je donnerai donc aux plus grandes vagues du
Léman, en plein lac, les dimensions suivantes :
Longueur 35™
Hauteur 1.7™
Vitesse 7.3™sec
Durée 4 .7 sec
C’est peu de chose en comparaison des immenses vagues de la mer.
C’est déjà beaucoup quand la tempête fait rage. Les grandes vagues
de l’ouragan du 20 février 1879 ont renversé en trois points les jetées
du port de Lutry, et ont démoli les parois du talus du chemin de fer
de Cully à St-Saphorin sur 57 endroits différents.
Quelle est la profondeur d’action utile des vagues dans le Léman ?
jusqu’à quelle profondeur les grandes vagues remuent-elles le sol du
lac ? Je répondrai à cette question dans le paragraphe où je vais traiter
des rides du fond.
Comme les vagues solitaires, les vagues associées du vent se propagent
au loin en avançant sur le lac; elles peuvent dépasser la
région où le vent souffle et alors elles deviennent des vagues mortes,
ou lames mortes. Souvent, à Morges, nous ne sommes avisés d’une
vaudaire qui fait rage dans le Haut-lac, ou d’un coup de bornan
qui a frappé dans la Grande-Conche, que par les lames mortes
qui remuent le lac, une heure ou deux peut-être après l’apparition ou
même la disparition du vent. La rotondité de la terre nous a empêchés
de voir à l'horizon la ligne bleue du coup de vent, et les lames mortes
arrivent seules jusqu’à nous.
J’ajouterai quelques observations et remarques sur les vagues.
a L’adage populaire : « Petite pluie abat grand vent », exprime un
fait facile à vérifier, c’est que, sous l’action de la pluie, les vagues du
vent diminuent rapidement de hauteur. « La pluie abat les vagues »,
telle serait la formule exacte. M. Osborne Reynolds (•) attribue cet effet
(*) Ptiil. soc. of Manchester. N a t u r e , XI, 279. London, 1875.
au vortex annulaire qui traverse l’eau au-dessous du point où la goutte
a frappé, et qui descend (cela est facile à voir en laissant tomber une
goutte d’encre dans de l’eau claire) jusqu’à une fort grande profondeur,
40 à 50e™. Sans me refuser à accorder au vortex une action positive,
il me paraît que les vagues circulaires, déterminées par chaque
goutte de pluie, doivent avoir un effet encore plus puissant. Ces
vagues circulaires s’entrecroisent dans tous les sens, se coupent dans
toutes les directions, et doivent troubler et annuler l’oscillation régulière
et orientée des molécules d’eau mises en mouvemenl par les
vagues du vent.
Du reste, c’est un fait constant : deux vagues, ou deux systèmes de
vagues, ou deux types de vagues, peuvent interférer pendant un certain
temps, et se superposer avec leurs caractères propres. Mais cette
coexistence ne dure pas longtemps ; l’un des deux systèmes des
vagues finit par éteindre l’autre. Ainsi la vague des bateaux à vapeur
qui se propage si loin par un temps calme, disparaît bientôt si le lac
est agité par les vagues du vent.
Dans des proportions encore plus grandes, nous croyons avoir constaté
que la présence de vibrations du lac tendrait à éteindre le mouvement
des seiches (v. p. 223).
b Nous avons vu que les vagues passant dans une eau moins profonde
ont leur hauteur relevée, en même temps que leur longueur et
leur vitesse sont diminuées. Sur un haut-fond et dans les eaux littora-
rales, les vagues sont plus courtes et plus hautes; on dirait que ce
que les vagues perdent en longueur, elles le regagnent en hauteur. Il
semble donc que le haut-fond n’ait pas d’influence sur la grandeur
effective des vagues. Cela n’est vrai que pour les vagues développées.
Pour celles-ci le haut-fond agit seulement en déformant la vague ;
pour les vagues en croissance, pour les vagues non développées, le
manque de profondeur de l’eau est un obstacle à leur développement.
Les vagues ne prennent pas leurs dimensions normales dans une eau
peu profonde. Dans les lagunes de Venise, les plus fortes bises soulèvent
des vagues qui ne dépassent pas celles d’un de nos petits rebats.
Il en résulte que l’effet de la beine sur les vagues est différent suivant
le côté du lac où on le considère. La beine sur le vent restreint le dévelop -
pement des vagues qui ne prennent leurs dimensions normales que lorsqu’elles
arrivent à l’eau bleue, à l’eau profonde. La beine sous le vent,
au contraire, ralentit le mouvement des grandes vagues qui arrivent