80 HYDRAULIQUE
Le premier se rapporte au lac de Walenstadt. A cette époque (1876)
la carte hydrographique de ce lac n’était pas encore levée ; les renseignements
les plus précis sûr la profondeur du lac provenaient des
opérations du sauvetage du bateau à vapeur le Dauphin, naufragé en
1851 ; d’après le dire des ingénieurs, le bateau gisait sur le fond sous
114m d’eau; le fond étant plat autour du bateau, ils admettaient que
c ’était la profondeur maximale du lac. Pour la longueur du lac, la carte
fédérale donnait 15.5km. Quant aux seiches, je les avais mesurées le
18 septembre 1874; elles étaient, ce jour-là, très belles et très régulières;
leur durée moyenne de 871 secondes me paraissait fort bien
assurée.
Or en appliquant la formule (7), je tirai de la longueur du lac et de
la durée dès seiches une valeur de h, profondeur moyenne, de 125m.
Cette valeur était incompatible avec une profondeur maximale de
114m. Ou bien les ingénieurs du Dauphin avait fait erreur, ou bien ma
mesure des seiches était fausse, ou bien encore la formule employée
ne s’appliquait pas à ces faits. Il fallait donc vérifier les données. Le
3 octobre 1876, je me suis rendu à Wesen, et, armé de la sonde, j’ai
cherché quelle est la profondeur maximale du lac. J’ai trouvé devant
Quinten jusqu’à 138m ; depuis lors, en 1880, M. l’ingénieur Manuel, en
faisant le lever de la carte hydrographique, a constaté jusqu’à 151®
de profondeur maximale. Cela étant, la profondeur moyenne pouvait
être 125m, et la formule était justifiée.
Le second cas se rapporte à un lac fort éloigné de nous. M. H.-C.
Russell, astronome royal à Sydney, fit établir en 1885 un limnographe
sur le lac George, lac de montagne, situé dans l’intérieur des terres,
derrière le Gourock-Range, dans la province de Murray, Nouvelles
Galles du Sud, longit. E. 149°25', lat. S. 35°7', altitude 600m. Les dimensions
de ce lac sont : longueur 18 milles anglais (29km), largeur
5 milles (8 km) profondeur 15 à 2U pieds (4.6 à 6.1m). Le limnographe
commença à fonctionner le 18 février 1885, et aussitôt le crayon dp
l’enregistreur dessina des oscillations rythmiques qui intéressèrent au
plus haut degré les observateurs. Ils constatèrent bientôt tous les détails
d’allures que nous avons étudiés sur les seiches du Léman (constance
de la durée, variabilité de la hauteur des oscillations, au maximum
13cm, relations avec les orages, distinction entre les seiches uni-
nodales et binodales). Je n’analyse pas ici cette partie du rapport qui
répéterait des faits depuis longtemps établis par l’étude de notre lac.
Mais ce que j’y trouve de plus intéressant, c’est ce qui se rapporte
à la durée des seiches. De la mesure de 33 seiches bien régulières,
M. Russell conclut à une durée de 131 minutes pour l’oscillation entière
des seiches du lac George. Or cette durée est énorme; elle atteint
presque.le double de ce que nous avons sur le Léman où la
grande seiche uninodale a une durée de 73 minutes, quoique notre
lac avec ses 72k“ de longueur sur son axe .courbe, soit de plus du
double de la longueur du lac George qui n’a que 29km.
La très faible profondeur du lac George suffira-t-elle à expliquer un
ralentissement aussi marqué du mouvement des seiches? Appliquons
notre formule :
l —; 28962“ .
t la durée d’une demi-oscillation de seiche = 3 930sec
donc h -± 5.536m, soit 18.1 pieds anglais.
M. Russell nous dit que le lac George a actuellement 15 à 20 pieds
de profondeur. Le calcul des seiches me donne pour cette profondeur
18 pieds. La vérification est aussi brillante que possible.
Ainsi donc j’étais autorisé par l’expérience à admettre que la formule
l
■ . _ \J 9 h
est applicable aussi bien à l’oscillation fixe uninodale d’un bassin d’expérimentation
qu’aux mouvements des seiches des lacs.
Il s’agissait toutefois de définir ce que doit représenter h dans un
bassin irrégulier, à fond inégal et compliqué, comme le sont les bassins
d’eau dans la nature, h doit être la profondeur moyenne; mais
qu’est-ce, en pareil cas, que la profondeur moyenne ? Est-ce le volume
total de la massé d’eau divisé par la superficie ? Est-ce la profondeur
moyenne dans le plan vertical passant par l’axe du bassin suivant
lequel l’eau balance ?
On peut comprendre avec quel intérêt j ’attendais l’achèvement de
la carte hydrographique du Léman qui devait permettre de juger cette
question. Je connaissais exactement la durée des seiches uninodales
du lac; je connaissais la longueur de l’axe du bassin; quant à la profondeur
moyenne, je n’ai pu la calculer que lorsque j’ai eu à disposition
la carte hydrographique du lac. Ces calculs ont été exécutés en
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