si nous la transportons au fond du lac où elle est soumise à une
pression de 30 atmosphères, sa densité est accrue d’une valeur
de 0.001 50
et devient 1.001 48
Elle devient plus dense que de l’eau à 4° qui serait à la surface et
dont la densité monterait à ■ 1 -000 20
Nous pourrions semble-t-il avoir le paradoxe hydrostatique d’une eau
froide superposée à une eau chaude et dans un état d’équilibre stable,
le tout dans les conditions de la stratification directe (l), Cet état paradoxal
pourrait-il se développer dans un lac? Si oui, toute la théorie
des courants de convection, en particulier la théorie que nous établirons
bientôt du refroidissement automnal par descente dans la profondeur
des couches de la surface, en est fondamentalement ébranlée.
Mais est-ce possible ?B - Ce serait possible si le refroidissement superficiel
était infiniment lent et si le pouvoir de conduction thermique
de l’eau était infiniment grand. Alors le refroidissement se propageant
d’une manière graduelle et ménagée dans la profondeur, l’on pourrait
avoir des. couches froides superposées aux couches chaudes, de telle
manière que, de haut en bas, la progression de densité due à l’augmentation
de pression fût toujours plus forte que la diminution de densité
résultant dé l’élévation de la chaleur. L’équilibre resterait stable et le
paradoxe serait une réalité.
Mais ni l’une ni l’autre des deux hypothèses n’est exacte. Le refroidissement
superficiel est puissant et rapide, et la ; conduction thermique
dans l’eau est infiniment lente. Il en résulte que, par refroidissement,
les couches supérieures augmentent rapidement de densité ;
comme elles sont mobiles, elles descendent dàns la profondeur ; à
mesure qu’elles s’enfoncent, elles sont, elles aussi, soumises à l’accroissement
de densité dû à l’augmentation de la pression; pendant toute
cette descente, elles sont soumises à la même pression, par conséquent
à la même augmentation de densité que les couches avec lesquelles
elles sont en contact, et c’est la différence de température qui
seule détermine les relations hydrostatiques. Elles ne s’arrêtent donc
dans leur descente que lorsqu’elles ont trouvé des couches de même
température, et par conséquent de même densité qu’elles-mêmes.
Donc les phénomènes de convection thermique ne sont point
influencés par l’augmentation de densité résultant de l’accroissement
de la pression dans les couches profondes. Le paradoxe hydrostatique
que j’ai énoncé ne peut être représenté dans un lac.
Il en est autrement lorsqu’il y a dans un lac superposition de couches
de densités différentes, par le fait d’une teneur plus ou moins
riche en matières dissoutes. Les couches profondes peuvent être assez
minéralisées pour qu’elles restent plus lourdes que les eaux de surface,
même très refroidies. On peut "alors avoir la stratification paradoxale
d’eaux plus froides, intercalées entre des eaux de surface et des
eaux de fond plus chaudes. M. A. Delebecque a découvert un exemple
très intéressant d’une telle stratification dans le lac de la Girotte,
arrondissement d’Albertville (Savoie) (1). En juillet 1892, ce lac avait :
à la surface 17°
à 25m 5°
à 100m 7°
Le paradoxe thermique est donc possible. Mais il ne nous touche
pas pour le Léman, les différences de composition des eaux étant certainement
trop faibles pour y amener un tel effet.
Nous traiterons plus loin des déplacements d’ordre hydrostatique
résultant de la surcharge de certaines eaux par l’alluvion qu’elles tiennent
en suspension [convection hydrostatique].
2° Cette même mobilité des molécules liquides permet à l’eau de se
déplacer sous des impulsions mécaniques actives, celle du vent par
exemple, et peut occasionner, par les courants, des mélanges de couches
de températures difïérentés [convection mécaniqueI.
3° La diathermanéité de l’eau qui permet la pénétration ou l’émission
de la chaleur rayonnante, non seulement par le plan de surface
supérieure, mais par les couches sous-jacentes. La diathermanéité de
l’eau est faible ; de tous les liquides étudiés par Melloni, elle est celui
qui laisse passer le moins les radiations thermiques /conduction dia-
thermique]. Par conséquent, la surface du lac subit des variations
considérables par suite de la chaleur rayonnante, les couches
moyennes et profondes des variations très faibles ou nulles.
D’après les recherches de J.-L. Soret, la diathermanéité de l’eau est
plus grande pour la chaleur lumineuse que pour la chaleur obscure ;
(*) C. E. Acad. sc. Paris, t. CXVI, p. 700,1893.