Dans aucun de ces hivers très rigoureux, le Léman n’est cité comme
ayant été gelé, sauf les congélations littorales dont nous allons parler.
2° En effet,les chroniques rapportent la prise par la glace du port de
Genève, de la rade de Genève, et la traversée du lac des Pâquis aux
Eaux-Vives (*), et cela dans les années suivantes (2) :
En 1570, le lac gela tellement qu’on traversa sur la glace
entre le Vangeron et Yésenaz.
En 1587, le 18 janvier, le Rhône a gelé vers la petite île; de
même une partie du lac.
En 1602 et 1603, gel du lac à Genève (3).
En 1681,1er février, le lac fut gelé. On traverse sur la glace de
Cologny à Sécheron (*).
En 1684,1, 2 et 5 février, le lac gela à tel point que la glace
reposant sur la terre, le Rhône fut arrêté; et qu’on traversait à
pied sec depuis Cologny à Sécheron; on fut obligé d’augmenter
la garde du port, vu la facilité d’entrer dans la ville par le côté
du lac.
En 1685, 5 janvier, le Rhône fut gelé depuis les Pâquis aux
Eaux-Vives.
En 1697, 26 janvier, le Rhône fut entièrement gelé au-dessous
des ponts et jusqu’à la pierre du Niton.
En 1709, 23 janvier. Il a fait ici depuis le 6 de ce mois un froid
extraordinaire, à tel point que tous les moulins ont été arrêtés
pendant quatre jours, et que le Rhône a gelé, ainsi que le lac,
des Eaux-Vives aux Pâquis.
En 1785. Au commencement de mars, après un hiver très
rigoureux en décembre et en février, on put traverser sur la
glace des Pâquis aux Eaux-Vives (5).
p) Faubourgs de Genève.
P) Je dois les dates pour lesquelles je ne donne pas une indication spéciale à une
communication de l’Ingénieur E. Merle d’Aubigné, d’après les Registres des Conseils
de la République de Genève.
(3) M. S. N° 43 des Archives de la Ville de Genève. Communication de M. le prof.
Eug. Ritter, à Genève.
(4) La congélation de 1681 est omise pa r Galiffe qui cite celle de 1670 (30 janvier,
trois jours après le grand incendie du pont de l’Ile, le bras gauche du Rhône fut
entièrement gelé), de 1684,1685 et 1697. Genève historique, I., 34:1869.
(5) Lettre de G.-A. Deluc du 10 juin 1785, communiquée par M. Edm. Pictet.
En 1788, 29 décembre. Le froid a été si rigoureux que le lac
a gelé dans le port et sur les bords à une assez grande distance,
et qu’on a pu traverser depuis l’un jusqu’à l’autre; il en a
été de même du Rhône jusqu’au-dessous de la Ville, de manière
que la machine hydraulique était arrêtée. Le lac fut gelé jusqu’à
Sécheron. On passa à cheval et en traîneau des Pâquis aux
Eaux-Vives.
4810. Dans la nuit du 21 au 22 février, le lac a gelé depuis le
port jusqu’à 500“ , à la suite, d’une bise froide qui a soufflé plusieurs
jours. Une accumulation de glaçons contre les digues
qui barrent le Rhône en ont suspendu le cours et pendant quelques
heures un bras du fleuve a été à sec (I).
1854, février. Rise violente les 13 et 14 février. Le 14, le
Rhône est gelé jusqu’à l’estacade; le 15, la glace s étend au-delà
du port, depuis les Pâquis aux Eaux-Vives et dans la journée,
des milliers de personnes ont traversé le Rhône sur la glace au-
dessus de l’estacade. La débâcle a eu lieu dans la nuit du 15 au
16, malgré la persistance du froid, le thermomètre étant à 11°.
Le 16 au matin la glace avait disparu (2).
1891, janvier. Le port et la rade ont été congelés et l’on a
traversé d’une rive à l’autre (voir plus loin).
Les dates où la prise du port de Genève a coïncidé avec celles de la
congélation des grands lacs sont les années 1570(71), 1684, 1709,
1789 (88), 1891. En revanche, 1830 et 1880 qui ont été des grands
hivers n’ont donné que des congélations partielles du port de Genève.
L’histoire nous apprend donc l’absence de congélation totale
du Grand-lac, mais la congélation partielle du Petit-lac près de
Genève.
Gomment pouvons-nous concilier ce dernier fait avec les constatations
modernes delà température pélagique du Grand-lac qui reste toujours
au-dessus de 4.0°, avec nos affirmations que le Léman appartient
au type des lacs tropicaux qui ne gèlent jamais? Nous allons pour le
faire comprendre étudier d’abord le régime thermique littoral du lac en.
hiver.
(*) Bibl. britann. Sc. et Arts X L I I I 198.1810.
(2) Archives de Genève, XXV, 305.1854.