Le temps qu’emploie l’eau pour s’écouler depuis l’entrée du port
jusqu’à l’Ile de Genève explique le retard constaté sur les tracés de
M. Sarasin. Le limnographe placé à un kilomètre plus aval sur le
Rhône montrerait des fluctuations analogues, mais avec un retard
plus grand, proportionnel à la distance.
J’ai dit que les oscillations de l’eau sous la Machine hydraulique de
Genève n’avaient que l’apparence de seiches ; qu’elles étaient le
résultat de variations dans le débit de l’émissaire, causées par les
variations de hauteur de l’eau du lac, produites elles-mêmes par les
seiches du lac. Est-il légitime de m’exprimer ainsi, de parler d'apparence
? J’en ai à peine le droit.
En effet, les seiches ont d’abord été observées, décrites et nommées
à Genève, non pas à Sécheron, non pas dans la Genève moderne qui
s’avance de plus en plus en remontant sur les-rives du lac, mais dans
la Genève des siècles derniers qui était limitée à l’origine du
Rhône, dans l’arrière-fond du port actuel, en aval du pont des Bergues,
tout au plus jusqu’au pont du Mont-Blanc. Les seiches qu’ont vues
les vieux Genevois sont donc les seiches du pont de la Machine et
non les seiches de Sécheron. Les seiches historiques, les seiches
authentiques sont donc les oscillations de la hauteur du fleuve dues à
des variations de la hauteur du lac. Nous avons, Vaucher, moi-même
et mes collaborateurs, assimilé les seiches du lac avec les seiches de
la Machine, nous avons donné le même nom à tous ces mouvements
périodiques de la hauteur des eaux ; certainement nous avons
commis une erreur, mais il est trop tard pour la réparer. Le nom de
seiche est actuellement acquis à l’oscillation de balancement des lacs;
il nous est impossible de le restreindre au sens strict qu’il avait au temps
des Fatio de Duillier, des Jallabert, des H.-B. de Saussure. Mainte-
nons-lui donc le sens précis que nous lui avons donné' dans tout çe
chapitre.
D’après cela, le sommet du ventre terminal des seiches longitudinales,
le mur contre lequel se fait la réflexion du mouvement de
balancement, n’est pas au barrage de la Machine hydraulique, mais aux
jetées du port actuel de Genève; avant la construction de ce port, il
était au banc du Travers. (*)
(*) Nous pourrions faire encore ici une distinction, et dire que, avant la construction
du port moderne, le sommet du ventre des seiches longitudinales était au
Ouant à l’exagération de hauteur des seiches du lac mesurées dans
le Rhône, nous allons en parler dans un instant.
3° Hauteur relative des mêmes seiches dans deux ventres différents.
Nous avons sur ce sujet les termes de comparaison suivants :
E n tre G en èv e e t la T o u r -d e -P e ilz , la proportion est, d’après
M. Ed. Sarasin (*) qui a comparé à la fois les uninodales et les binomiales
: Genève 10, la Tour de Peilz 2 à 2.5.
E n tr e G en è v e e t C h illo n , tracés Plantamour et Forel, 7 demi
seiches uninodales du 10 novembre 1878 : Genève 10, Chillon 2.5.
E n tr e G e n è v e e t M o rg e s, tracés Plantamour et Forel : la
proportion est Genève 10, Morges 0.8 à 1.0.
Entre Genève et Tbonon,' tracés Plantamour et Delebecque, bino-
dales du 17 août 1888, à l h : Genève 10, Thonon 2.2.
E n tr e Gen èv e e t F le u r d ’Eau près Rolle; comparaison faite
par M. Ph. Plaritaniour entre ses tracés de Sécheron et ceux de
M. Sarasin, à Rolle t Genève 10, Fleur d’Eau 3.0. (-)
La différence énorme de hauteur entre les seiches de Genève et
• celles de Morges provient de la distance inégale entre ces stations et
le sommet des ventres correspondants ; Sécheron est au sommet du
ventre de Genève, Morges est près du noeud médian. Nous avons
déjà vu le même fait quand nous avons traité des seiches dans
diverses stations d’un même ventre.
Mais entre Sécheron et Chillon, stations situées l’une et l’autre à
-égale distance de l’extrémité respective du lac, la différence de
hauteur qui est 4 fois,plus grande à Genève qu’à Chillon, tient à
d’autres causes. Je puis en indiquer deux. Nous avons vu par notre
banc du Travers quand le barrage de la Machine, était ouvert, et au barrage
même quand celui-ci était fermé.
(1) ("Loc. cit. p. 63, n° 19) p. 728.
(2) M. Philippe Plantamour a eu l’obligeance de me communiquer un tableau
de comparaisons qu’il a faites entre la hauteur des seiches à Sécheron, et dans les
-autres stations du lac, d’après les divers tracés limnographiques.-Je reproduis ici
les moyennes de ce tableau.
Si les seiches de Sécheron ont une hauteur de 10, elles ont :
A la Machine hydraulique de Genève. 15.0
Au Rivage . 8.8
A Bellèvue 8.6
A Fleur d’Eau, près Rolle 3.0
A Thonon 2,4
A la Tour-de-Peilz 5.3
A Chillon (?) 10.0