
 
		La  formule  de M.  du  Boys  n’est  cependant  pas  d’une  application  
 très  facile  :  l’irrégularité du bassin  d’un lac  est  telle  que  l’on  peut  se  
 trouver  souvent  embarrassé pour la direction à prendre ;  il  est évident,  
 en  effet,  qu’il ne  faut  pas  suivre  fidèlement  la  ligne  du  thalweg,  soit  
 l’axe souvent compliqué qui donne les plus grandes profondeurs ; dans  
 son balancement,  la masse  d’eau  doit chercher la ligne dés plus  courtes  
 distances. Quelle  est la ligne  qui  doit  représenter  l’axe  du  balancement  
 des seiches ? C’est,  sur le Léman, fort  difficile à dir.e dans plusieurs  
 points.  C’est  tellement  vrai,  que  j’ai  répété  plusieurs  fois  
 l’établissement  du  tableau de la durée des seiches d’après  le  procédé  
 de M. P.  du Boys,  et que je suis toujours  arrivé  à des résultats  numériques  
 assez  différents.  Je ne  citerai les résultats  que  de  deux  de  ces  
 calculs. Le  premier m’a  été  donné par M.  du Boys lui-même;  il  avait  
 divisé le lac  en 22  éléments,  et il  avait  trouvé  pour  la  durée  des  seiches  
 du Léman  une  valeur de 74.6min,  qui  se  rapproche  de  très  près  
 du  chiffre donné  par l’expérience. Le  second,  c’est le calcul  où  j’ai  le  
 plus  multiplié  les  précautions,  en  divisant  la  longueur  du  lac  en  
 46  éléments,  limités  là où  cela  était nécessaire  par  des  différences  de  
 profondeur de 10  et même  de 5 mètres  seulement; dans  ce  calcul, j’ai  
 obtenu pour  chiffre définitif 77.4»«, valeur qui s’éloigne un peu'moins  
 du  résultat  expérimental  que le calcul  développé plus haut. 
 Ces divergences montrent la  difficulté d’application  de  la formule  de  
 M.  du Boys ;  elles n’en  attaquent pas la légitimité. 
 B.  La  position  du noeud. Où  est situé le noeud  de la seiche longitudinale  
 uninodale? A  cette  question, la même  réponse  est  donnée  par  
 l’expérience  et par la théorie. 
 Les  seiches  uninodales  de 73»«  sont visibles  sur les tracés  des  lim-  
 nographes  de tout  le lac,  excepté sur ceux  de  Rolle,  de  Fleur  d’Eau,  
 près Rolle,  de Thonon  et  de  Séchex, près Anthy,  où  elles  sont  si  faibles  
 et  si  mal  dessinées  qu’on  peut  presque  les  dire  absentes.  Cette  
 première  constatation  suffit pour nous  faire affirmer  que  le  noeud  de  
 ces seiches  est près de  ces  stations,  soit dans  la  partie occidentale  du  
 Grand-lac.  Cette supposition  est  confirmée par trois faits. 
 a.  Les  seiches  de 73min  sont  synchrones  et de même  sens  dans  les  
 diverses  stations  du  Petit-lac, Genève, le Rivage, Bellevue,  qui  ont été  
 étudiées par les limnographes Plantamour et Sarasin. 
 b.  Les seiches  de  73min  sont  synchrones  et  de même  sens  dans  les  
 diverses  stations  du Grand-lac,  à partir de Morges jusqu’à  Villeneuve. 
 Nous l’avons  établi  par  une  comparaison  des  tracés  hmnographiques  
 Forel et Sarasin dans  les  stations  de Morges,  la Tour-de-Peilz,  Chillon.  
 J’en  avais  donné une première  démonstration le 8 janvier  1877 ;  après  
 avoir reconnu  que mon limnographe de Morges  dessinait automatiquement  
 une belle  série dé  seiches  de 73»«, je me suis  rendu  à Vevey, et  
 là,  de 14''30»«  à  1 7 \ j’ai suivi  de  cinq  en  cinq minutes  les  d é n iv e llations  
 du lac telles que me les montrait le limnimètre  de  l’Eperon  de  
 l’Aile.  Un  tableau  graphique  que  j’ai  construit  avec  ces  valeurs  m’a  
 montré les mêmes  oscillations  qu’à Morges;  j’ai  pu  les  superposer  et  
 constater leur parallélisme,  leur synchronicité et la  similitude  de  leur 
 direction.  (1)  —  \   V  .  '   .  ■ 
 c.  Les  seiches de 73»«  sont  synchrones, mais opposées  de  mouvement  
 ou-de  direction,  à Morges  et à Genève. C’est  ce qui  résulte  de là  
 comparaison  que  j’ai  pu  faire,  pendant  plusieurs  an n é e s/ entre  les  
 tracés  Hmnographiques  de  Morges  et  ceux  de~Sécheron  (Geneve).  
 C’est  ce  qui  résultait  déjà  de-la  première  observation  où  j’avais  pu  
 constater le  phénomène. Qu’on me permette  de la relater ici en détail ;  
 elle a un  certain intérêt  historique,yçar  c’est  la  première  observation  
 suffisamment complète qui  ait  démontré la justesse de ma théorie des  
 seiches.'  C’était le 9 janvier  1877  ;  j’avais,  la  veille,  constaté  la  similitude  
 du mouvement à Vevey  et à Morges ;  la  série  des  seiches  continuait  
 à osciller avaé régularité, et à dessiner au limnographe de Morges  
 des ondulations parfaitement reconnaissables. Je partis pour Genève et  
 de 13h  à 17h, je suivis  de  deux minutés  en deux minutes les variations  
 du  limnimètre  à  flotteur  du  Jardin-Anglais.  Je  traçai  d’après  ces  
 valeurs numériques la  courbe graphique des dénivellations de Genève,  
 et je la superposai à.la  courbe automatique du limnographe de Morges  
 (fig.  73).  J’obtins  une  opposition  générale  très  évidente  des  mouvements  
 ; malgré la différence de hauteur des oscillations  de  1 eau,- malgré  
 la complication des broderies  secondaires, il  était  évident  que  les  
 énormes  seiches  de  73»«  de Genève  alternaient avec les  seiches  surbaissées, 
  mais  de même durée,  de Morges ;  les  grands  maximums  de  
 Genève  avaient lieu  au même moment que les minimums  de Morges,  
 les  minimums  . de  Genève  étaient  synchrones  avec  les maximums  
 de.Morges. 
 I1)  .Essai monographique sur les  séiches  du  Léman  [loc. cit. p.  63,  n° 8],  pl.  II,  
 àg. 3.