longueur ; s il n y avait pas d’obstacle, de remous à la surface du
sable, à la fin du second temps, toute la couche mobile aurait repris sa
place primitive. Mais par le fait de l’obstacle posé au milieu de notre
plaine de sable, tous les grains qui, avant le premier temps, étaient
situés derrière cet obstacle, jusqu’à une distance égale à l r
étant transportés par-dessus l’obstacle, tomberont dans le remous
causé par sa saillie et seront immobilisés ; quand, dans le second
temps, le courant de retour ramènera en arrière toute la couche
mobile du sable, une partie restera, celle qui est arrêtée par l’obstacle.
Il y aura donc déficit de matière ; à la fin du courant de retour, il y
aura formation d’un sillon, et ce sillon aura la largeur l. Ce sillon, à
son tour, sera l’occasion de la formation d’une ride, dont là largeur
sera de même égale à l, étant formée dans des circonstances analogues;
et ainsi de suite. Ainsi s’expliquent, d’une part les relations de
largeur des rides avec l’intensité du mouvement de balancement, et
d’autre part l’équidistance des rides successivement formées par une
action identique.
Cette analyse du phénomène nous permet de préciser, mieux que
nous ne l’avons fait jusqu’à présent, la loi fondamentale de Ja largeur
des rides. La largeur des rides, soit la distance d’une crête à
l’autre, est le trajet que ferait, dans un mouvement de balancement,
un grain de sable librement transporté par l’eau. On pourrait facilement
démontrer que la longueur l de ce trajet dépend :
en fonction directe, de l’amplitude horizontale du balancement de
l’eau; .
en fonction directe, de la vitesse du courant de balancement, qui
entraîne d’autant plus facilement le sable, qu’il marche plus
rapidement ;
en fonction inverse, de la densité du sable ;
en fonction inverse, de la grosseur des grains. 41)
Dans du sable où des grains de grosseurs et de densités différentes
seraient mélangés, ce seront probablement les grains les plus lourds
et les plus gros dont le trajet déterminera la largeur des rides.
Ç) Nous expliquerons plus loin la contradiction apparenté entre cette formule
qui attribue aux rides une largeur d’autant plus grande que le sqble e.st .moins
grossier, et la loi expérimentale que nous avons établie, et que nous confirmerons
p a r 1 étude des faits n a turels; cette,loi dit que, toutes;choses égalés, la largeur
des rides est en raison directe de la grosseur des grains du sable.
De ces faits il résulte que les rides de fond sont dues à l’action des
vagues superficielles du lac, qui se manifestent dans la profondeur
par un mouvement de balancement de l’eau, ou, si l’on veut, par des
courants horizontaux alternant dans leur sens ; que ces courants soulevant
le sable .tendent à la .formation de dunes (i), mais que
l’alternance dans la direction des courants change le. type des dunes
et le transforme dans le type des rides. Les éminences ainsi dessinées
dans le sable ont une forme régulière, les deux talus étant symétriques,
et elles présentent une immobilité fondamentale ; la crête se déplace
légèrement à la manière des dunes pendant la durée très courte de
l’action de chacun des courants, mais elle est ramenée en arrière par
le courant de retour.
L’origine théorique des rides doit donc être rapportée à la formation
des dunes. Ainsi s’explique la ressemblance.que nous avons constatée
dans la répartition des matériaux. Dans les rides comme dans les
dunes, ils se distribuent en ordre de grosseur le long des talus d ébou-
lement, les grains les plus fins restant au sommet, les plus grossiers
descendant'dans le fond. Seulement, par la reproduction cent fois
répétée des mouvements qui agitent le sable, dans la formation des
rides, la distribution des matériaux suivant leur grosseur estbeaucoup
plus parfaite dans les rides que dans les dunes.
Cette description des dunes que j’oppose aux rides se rapporte aux
dunes parfaites, établies par l’action d’un courant continu, tel qu’il a
lieu au fond d’une rivière, ou à l’air, par l’effet d’un vent continu et
prolongé. Quant aux dunes du désert, des bords de l’océàn ou des
lacs, elles n’ont pas ordinairement la forme typique ; l’alternance irrégulière
des vents qui soufflent tantôt sur une face, tantôt sur 1 autre,
et cela sans aucune régularité dans les changements de direction,
leur donne généralement une forme intermédiaire entre celle dés
dunes, telles que je les ai décrites, et cèlle des rides; elles se rapprochent
plutôt de cette dernière. C’est le cas pour la plupart des dunes
que j’ai vues sur les bords de la Méditerranée,, entre. Cette et le Giau
(') J ’ai pu constater la justesse de cette interprétation, en observant les mouvements
des grains de sable dans la cuve oscillante de M. C. de Candolle ; grâce à la
lenteur des mouvements que'l’on peut obtenir dans' cet excellent appareil d expérimentation,
j ’ai pu, mieux que dans mes bassins où l’agitation de 1 eau est plus
tumultueuse, suivre avec précision le transport du sable, et vérifier la formation
de la ride pa r la superposition de deux dunes, alternativement établies pa r les
courants successivement de sens opposé dans l’eau.