Les mascarets qui se suivent ont une intensité assez variable ; j en
ai donné une idée dans l’observation du 3 octobre 1893, en notant par
un facteur de I à IV la grandeur relative du phénomène : parfois les
vagues sont presque nulles, et d’observation très difficile. Suivant
donc que j’ai noté ou négligé ces mascarets très faibles, la moyenne
d’une série d’observations peut en être sensiblement relevée ou
déprimée. Puis, si l’attribution que je vais faire de ce mascaret à l’action
des vibrations du lac est juste, je puis difficilement séparer les
vibrations dues au vent, de celles dues aux bateaux à vapeur.
Toujours est-il que voiei la durée moyenne de la période qui sépare
les mascarets successifs, dans quelques observations faites dans
l’estuaire de la Morge, par des états du lac fort divers :
Nos . Dates E ta t du lac. Durée moyenne.
i ü 1er octobre 1892 Vagues mortes de rebat 51 sec .
II 7 — Grand sudois, durée des vagues 2.5sec 31
III 11 — ^ — Sudois II 45
IV 12 — — Sudois I, vagues de 2.5sec 40
V 22 — Sudois HI — de 3sec 36
VI 11 décembre 1892 Sudois IH 51
VII 22 septembre 1893 Sudois III 25
v m 29 — w S Joran II 29
IX 3 octobre 1893 Sudois m 26
X i l — Grand beau, grand calme 62
XI 20 — — Bise II 32
xn — — — . : Après le passage d’un bateau à vapeur 28
moyenne 3 8 scc
La durée moyenne de retour périodique de nos mascarets est donc
de 38 secondes environ, un peu plus d’une demi-minute.
J’avais d’abord pensé à attribuer ces vagues, qui remontent l’estuaire
de la Morge, à la propagation de ce qu’on appelle la I e vague. On sait
que, dans les vagues du vent, l’intensité des vagues successives est
très inégale ; qu’il y a de temps en temps recrudescence notable de la
grandeur des vagues ; deux ou trois vagues sont de hauteur maximale,
puis les suivantes sont relativement faibles ; les marins désignent
ces fortes vagues d’intensité extrême sous l’épithète de la 7e v a g u e .
J’avais pensé que, tandis que les vagues relativement faibles se seraient
éteintes à l’embouchure de l’estuaire, les vagues plus fortes se seraient
propagées plus loin, et auraient seules apparu au point où je faisais
mon observation. Mais cette hypothèse tombe devant les chiffres que
je viens de donner. On y voit la période de ce que j’appelle le mascaret
être aussi longue lorsque les vagues sont nulles ou très faibles
(observations I, X, XI, XII), que lorsque le lac est tourmenté par des
vagues violentes. Il n’y a pas proportion entre la période du mascaret
et la grandeur des vagues qui viennent battre à l’embouchure de la
Morge.
Nous en restons donc à notre notion, que les vagues en question
remontant l’estuaire de la Morge sont bien un mascaret. Un mascaret
est dû à la crue des eaux de l’estuaire par le fait de la marée montante
; pour qu’il y ait crue de l’estuaire, il faut apport d’eau ; cet
apport ne se fait pas sans courants ; les frottements de l’eau sur le
plafond et sur les bords du chenal déterminent les vagues et le roulement
du flot du mascaret. Le mascaret dé la Morge est donc dû à
une crue du lac.
Parmi les dénivellations périodiques du lac, quelle est celle dont le
rythme correspond à celui du mascaret ? Ce ne sont pas les seiches qui,
à Morges, ont 10 et 5 minutes de durée ; ce ne sont pas les vagues du
vent ou des bateaux à vapeur qui ne dépassent pas 5 secondes au
maximum. Les seules oscillations du niveau de l’eau qui se rapprochent
de la demi-minute que dure la période du mascaret de la Morge,
sont les vibrations du lac.
J’attribue ce mascaret de l’estuaire de la Morge aux vibrations du
lac, aussi bien à celles causées par le vent qu’à celles dues aux bateaux
à vapeur.
■4° Les vibrations de la mer.
Nous n’avons pas à chercher des seiches dans la me r; le bassin de
1 océan est trop large pour que nous puissions espérer y voir se développer
un balancement simple, uninodal ou binodal. Tout au plus dans
certaines méditerranées, dans leurs parties les plus étroites (le canal
d’Irlande, la mer Adriatique, le golfe de Bothnie, la mer Rouge, le
golfe Persique, etc.), pourrait-on peut-être en retrouver des analogues ?
Cette recherche n’a pas encore été faite.
En revanche, les vibrations que nous venons de constater dans nos