tieux qui y est introduit en dose minime, et qu’il arrive à s’en débai-
rasser, tandis qu’il succombe à une infection.en masses trop brutales.
Là est probablement le secret de l’innocuité des èaux du Léman lors
des lavages et de l’ingestion naturelle dans l’organisme, tandis que les
germes qu’elles contiennent peuvent être mortels aux- cobayes quand
on les injecte en quantités considérables.
Je conclus de ces considérations que les expériences de MM. Lortet
et Despeignes, quoique très intéressantes et méritant toute l’attention
des hygiénistes, ne doivent cependant pas nous inquiéter trop ; qu’il
n’y a pas lieu, jusqu’à nouvel avis, d’incriminer; l’eau du lac Léman, et
de contester ses excellentes qualités d’eau alimentaire.
VII Les eaux d’alimentation doivent autant que possible être de
température constante. Cette température doit être assez basse; les
meilleures conditions hygiéniques sont celles d’une eau entre 10 et
12°. Sous ce rapport, les eaux d’un lac sont excellentes. En nous référant
ici aux études que nous avons développées plus haut sur les condi-
tions thermiques du lac Léman, je dirai que la profondeur recomman-
dable pour l’établissement de la prise d’eau des conduits d’aspiration
serait à ce point de-vue à 20“ environ au-dessous dp la surface. A cette
profondeur, les eaux de l’hiver seraient à 4° dans le Petit-lac, à 5° dans
le Grand lac, les eaux d’été ne s’élèveraient jamais au-dessus de 15°,
à leur point de capture ; elles resteraient le pjps souvent au-dessous
de 10°.
VIII. En fixant à 20“ de profonâeur la, prise d’eau dans le lac, on
aurait l’avantage d’éviter à peu pipsjjomplètement les eaux de surface
qui sont les plus variables au point de'vue de la composition chimique
et qui sont le plus salies par les poussières organiques.
On serait dans la couche des eaux lacustres proprement dites et non
dans la couche polluée par. les eaux fluviátiles. Si l’on pouvait
descendre à 30 et 40™, ce serait encore mieux ; mais l’on se heurterait
peut-être à des difficultés techniques insurmontables.
Pour l’établissement d’une telle prise d’eau, je recommanderai de
placer l’ouverture du canal d’appel à'quelques mètres au-dessus du
sol, sur le talus sous-lacustre, afin d’éviter le courant descendant des
eaux lourdes des affluents et égouts, ainsi que le courant descendant
des eaux littorales froides de l’hiver qui, les unes et les autres
s’écoulent dans les grands fonds en suivant la ligne de plus grande
pente.
IX. Un dernier point à considérer pour l’alimentation d’eau d’une
ville, c’est la question d’abondance. Il faut que celle-ci soit suffisante
pour les besoins actuels et futurs d’une cité dont la population s’accroîtra
probablement et dont les nécessités hygiéniques réclameront
un volumç journalier d’eau certainement toujours plus grand. Sous
ce rapport, un lac est un réservoir inépuisable, ce qui n’est pas le cas
des sources terrestres, dont le débit décroît généralement à mesure
que le déboisement augmente et que le climat s’altère. Une source
suffisante aujourd’hui pour une ville, sera certainement insuffisante
dans cinquante ans. Un lac sera toujours à même de satisfaire à tous
les -besoins.
En résumé, un lac comme le Léman fournit une eau d’alimentation
de qualité excellente, égale ou supérieure à beaucoup de points de vue
aux eaux de source. L’eau d’un lac est très recommandable au point
de vue hygiénique.
IV. l ’odeur du la c
L’eau du Léman est généralement inodore. Non seulement les riverains
ne perçoivent aucune odeur — on pourrait objecter qu’il y a
pour eux accoutumance et par suite défaut de perception i— mais
encore un étranger àrrivant brusquement au bord du lac ne sent
aucune odeur appréciable.
Cependant en certaines occasions on a noté une odeur très marquée
que l’on compare ordinairement à celle de la chair de poisson. En voici
une observation ;
Le 27 juin 1880, par un temps pluvieux, sans vent, sur le bateau à
vapeur de Villeneuve à Vevey, je remarquai une très forte odeur de
poisson. Je m’assurai, en me rendant à la proue même du navire que
cette odeur était répandue dans l’air du lac et ne provenait pas des
cuisines du bateau. Je constatai en même temps que l’odeur était plus
forte en plein lac que près de la côte ; qu’il n’y avait pas abondance
extraordinaire de poissons'crevés flottant à la surface du lac ou accumulés
sur la grève. Je fis une enquête auprès des matelots des divers
bateaux à vapeur, et j’appris que l’odeur de poisson avait été remarquée
ce jour-là sur toute l’étendue du lac de Villeneuve à Genève et
d’Ouchy à Evian.