Ces courants sont parfois très nettement limités ; si l’oeil est assez
élevé au-dessùs de l’eau, il en voit les bords fort
bien tracés. Souvent, des amas d’écumes et
de poussières aquatiques signalent de loin les ^
rives du courant. Si l’on s’approche en bateau
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de la limite de ces forts courants, on distingue
sur l’eau des remous et tourbillons plus ou moins
bien marqués.
On peut constater parfois une différence assez
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x 3 forte de température entre les eaux du courant
et celles du lac immobile dans lequel il s’avance
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; d’après mes notes, cette différence peut
aller jusqu’à un demi degré et plus.
Les courants sont, les uns superficiels, et
alors ils sont facilement apparents, les autres
profonds, et alors ils ne nous sont qu’accidentellement
révélés. Voici ce que je trouve raconté
par La Bêche dans son expédition de sondage
de \ 8d 9 (j) : « Les sondes ont été prises avec
une masse de plomb de 8 livres ; elle était
assez lourde pour résister aux courants. Ces
courants m’ont semblé rares ; et ceux que j’ai
observés étaient peu rapides, excepté dans une
sonde de 80 brasses, vis-à-vis de la pointe de
Dranses, où à la surface, on n’apercevait aucun
courant sensible ; à la profondeur de 15 brasses,
un courant emportait rapidement mon
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thermomètre à l’ouest ; et lorsque j’eus filé
10 brasses de plus de corde, j ’aperçus que le
courant emportait presqu’aussi rapidement à
l’est. Ni l’un, ni l’autre, ne durèrent longtemps,
(Fig. 103.) Six positions
des bOuées-signàux de
car en filant 12 brasses de corde de plus, le
Morges, déplacées par
thermomètre ne parut plus influencé par aucun
les courants, a repère
sur la côte de Savoie.
courant. Je questionnai souvent mes bateliers
sur ces courants; tout ce que j’en ai appris, c’est qu’ils sont très
irréguliers, et qu’ils se portent assez indifféremment vers toutes les
plages. »
Je trouve fréquemment dans mes notes l’indication de perturbations
analogues. J’ai souvent été gêné, dans mes expériences, par les courants
profonds, comme le fut jadis La Bêche.
Sachant combien les courants du lac sont irréguliers et échappent
à toute espèce de loi apparente, je leur ai voué peu d’attention. J’ai
cependant profité d’une circonstance favorable pour essayer de les
étudier un peu mieux. En juin 1891, nous avions à Morges le Tir cantonal
vaudois ; il s’agissait d’écarter les bateaux de la ligne de tir et de
marquer par des bouées les limites de la zone dangereuse. Cinq
radeaux, entr’autres, furent ancrés dans le lac, de 500 en 500 mètres,
sur une ligne droite partant du port et traversant dans la direction
d’Amphion ; le fil de métal qui les fixait au fond était assez lâche pour
leur permettre un déplacement de quelques mètres sous l’action des
courants de surface. Pendant les 15 jours où ils ont été en place, je
les ai visés du même point de la rive et j’ai dessiné sur mes notes les
figures différentes que donnaient les signaux superposés des
5 radeaux; j’ai obtenu ainsi une vingtaine de dispositions diverses,
dont je reproduis, dans la figure 103, quelques-unes des plus caractéristiques.
Une maison a, de la côte savoyarde, établissait l’alignement
général de la série.
N° 1. 22 juin 1891,17h, par un léger morget, donne l’alignement
correct des 5 signaux.
N° 2. 23 juin, 12h, léger rebat, montre un courant chassant à
gauche le 2e signal à 400m de la rive.
N° 3. 24 juin, 6h, morget, fait voir la dérive à gauche de la 3e
bouée.
N° 4. 24 juin, 18h, calme plat ; le 2me signal était chassé à
gauche, le 3me à droite.
N° 5. 26 juin, 19*1, la 3me bouée était fortement entraînée à
gauche.
N° 6. 27 juin, 17h, joran. Les 2me et 3me signaux étaient chassés
l’un et l’autre à gauche ; tandis que, dans tous les cas
précédents, le courant était étroit et ne déplaçait qu’une seule
bouée, dans ce cas il mesurait plus de 500m de large, et enveloppait
deux des radeaux de signal.