11’est pas le seul à causer des seiches ; qu’il y a des seiches en
l’absence de toute décharge électrique. Ce dernier point, très important,
je le prouve en considérant l’existence de seiches en tous
temps, de seiches peut-être de faible grandeur, mais cependant parfaitement
reconnaissables en hiver, dans cette saison où les orages
sont extrêmement rares ('). Voyez à ce sujet notre tableau de la hauteur
des seiches de l’année '1891 qui donne une moyenne de 4 8 cm
pour la hauteur des seiches de Genève, dans les mois de décembre à.
février.
Ainsi donc : existence des seiches en tous temps ; exagération des
seiches en cas de vent violent ; seiches d’intensité maximale en temps
d’orage. Voilà les faits généraux d’où nous devons tirer l’explication
des seiches.
Les s e ic h e s e t l ’o ra g e .
L’orage est, comme nous l’avons dit (2), une perturbation atmosphérique
présentant comme phénomènes constituants un coup de vent,
des variations de température, des condensations aqueuses et des
décharges électriques ; l’orage peut être parfait et tous les phénomènes
secondaires y sont représentés ; l’orage peut être incomplet et
nous n’avons qu’un orage de vent, un orage de pluie ou de grêle, un
orage électrique.
Quels sont, dans ces phénomènes constituants de l’orage, ceux qui
peuvent produire les seiches ?
A. L’attraction des nuées chargées d’électricité peut soulever l’eau
à l’une des extrémités du lac (hypothèse de Bertrand, appuyée par
H.-B. de Saussure, admise aussi par mon regretté collègue, le professeur
Louis Dufour, de Lausanne, qui m’a plusieurs fois exprimé verbalement
cette opinion, acceptée aussi par M1 Ph. Plantamour dans son
étude sur les seiches du 20 février 1879 (*)) ; puis la décharge de la
foudre, supprimant subitement une partie de la force attractive, laisse
retomber l’eau. Nous ne pouvons pas, que je le sache, apprécier la
(’) V. 1.1, p. 339. Nous avons vu qu’en hiver il n ’y a que 0.4 jour à orage p a r
année moyenne.
p) T. I, p. 330.
(3) [Loc. cit. p. 63, n° 18] p. 343.
valeur effective d’une attraction de cette nature ; mais il n’y a pas
d’impossibilité à ce que les choses se passent ainsi. Nous pouvons
admettre que ces deux corps mobiles, la surface liquide du lac et le
nuage, chargés l’un et l’autre d’électricité, s’attirent réciproquement ;
qu’au moment où la foudre opère la neutralisation des électricités de
signes contraires, cette action d’attraction cessant, l’eau retombe subitement
; qu’il peut en résulter l’impulsion génératrice d’une série de
seiches. Voici ce que la théorie peut admettre.
Nous venons de voir la coïncidence frappante entre les orages et
les seiches; nous avons constaté que les grandes séries de seiches
correspondent le plus souvent avec l’éclat d’un orage sur le lac ou
dans la vallée. I l y a donc des arguments de fait qui parlent en faveur
dé cette idée. Nous avons cependant quelques remarques à indiquer :
a. Les orages électriques éclatant sur le lac ne sont pas toujours
accompagnés de fortes seiches. Â cette objection on peut répondre
que l’intensité de l’attraction électrique peut n’être pas toujours de
même valeur, ou bien qu’elle peut s’être exercée sur un point du lac
peu favorable à la mise de l’eau en état de balancement.
b. Les seiches existent aussi bien en hiver, où il. n’y a pas d’orages
électriques, qu’en été où ils sont fréquents. — Cela prouve qu en tout
cas l’oragè électrique n’est pas la cause unique des seiches.
c. En troisième lieu, je remarque que les seiches observées en
temps d’orage électrique ne présentent pas toujours le type caractéristique
qu’elles devraient avoir si la rupture de l’attraction électrique
était la cause de ces séries de seiches ; en effet, si la théorie que je
viens d’exposer était exacte, à chaque coup de foudre devrait correspondre,
une impulsion génératrice de seiches, à chaque coup de
foudre devrait commencer une série de seiches. Les seiches, simples
au premier coup de foudre, devraient par conséquent se compliquer
à chaque éclair, et toutes ces séries de seiches interférant successivement
les unes sur les autres, le tracé devrait présenter un type spécial
et caractérisé par sa complication extrême.
Or ce type de seiches ne se retrouve nullement d’une manière
constante en temps d’orage ; souvent, dès le début, l’impulsion est
simple et semble causée par une action unique et non multiple. Nous
avons vu que les seiches peuvent être irrégulières et compliquées ;
c’est quelquefois le cas au début d’une série de seiches au moment
où frappe l’orage, et cela correspondrait bien à l’hypothèse de Ber