un litre au moins de limon, et il en mesurera la température à l'arrivée
à la surface. Dans un limon argileux-marneux comme celui du lac
Léman, cette méthode m’a donné la température des eaux profondes
avec une approximation supérieure à J/io f^e deSr®-
Voici en effet une des expériences qui m’ont prouvé la lenteur
extrême de la pénétration de la chaleur jusqu’au centre d’une masse
de vase du lac :
Le 14 mars 1870. Je place un thermomètre au milieu d’un bidon de
fer-blanc (drague métallique) rempli par un dragage en plein lac de la
vase des grands fonds, sans aucune manoeuvre extérieure qui ait
modifié la consistance du limon. Je plonge le bidon dans un baquet
d’eau à la température moyenne de 28« (extrêmes 27« à 29«) et je
constate la vitesse du réchauffement par les lectures suivantes : la
température du limon était à 1 origine de 5.8°.
Heures Tem p éra tu re
du limon.
Heures T em p éra tu re
du limon.
111142' 00" 5.8° l l h49'50" 6.2°
46.30 5.9 50.35 6.3
48.00 6.0 51.15 6.4
.49.00 . 6.1 51.50 6.5
Pour relever la température du limon de 0.1«, il a fallu 4 </2 minutes,
durée égale à celle qui ramène une sonde de la profondeur de 225“ .
Voici en effet, d’après ma pratique, le temps que nécessite un dragage
:
Sondage à 75“ Durée de la remontée 50"
' » 90 - » !;*>"
» : 200 ; ' » ' -
» 300 »
La méthode est parfaitement suffisante pour la détermination de la
température d’un lac qui n’est pas trop profond.
B. Histoire de la bathythermométrie du Léman.
1« C’est dans le Léman que les premières études connues sur la température
profonde des eaux lacustres ont été faites; nous les devons
à l’illustre naturaliste genevois H.-B. de Saussure. ■
,-------------_____----- ÜJ.VVC11 «XA!, la LOIXipCrature
du lac devant sa campagne de Genthod, par 27“ de fond; son
thermomètre s’arrêta à 12.7«. (*)
Le 6 août 1774, Mallet et Pictet de Genève trouvèrent près de Chillón,
par 100“ de profondeur, une température de 10.8«.
En février 1779, Saussure constata devant Meillerie 5.4«, par 308“
de fond (lisez Ca 260“ ) (2) et devant Evian 5.2°, par 201“ (lisez 310“ ).
Les détails donnés par l’auteur aux §§ 32 et 42 de ses Voyages, sur
la sensibilité des thermomètres qu’il envoyait au fond du lac entou-
i és d appareils protecteurs, sont peu rassurants et laisseraient une
marge assez large aux inexactitudes. Le thermomètre variait de 2 à 4°
et plus en parcourant, dans une eau de température légèrement diffé-
rente, un trajet de six ou sept cents pieds. Les précautions décrites aux
§§ 1392 et 1393 donnent au contraire la conviction que Saussure était
arrivé à écarter au moins les principales causes d’erreur. Dix minutes
d agitation dans l’eau ne faisait plus varier son thermomètre que
de V10 de degré.
Du reste, quelle que fût la sensibilité de ses instruments, le fait que
sa dernière série d’observations était faite en février, époque à laquelle
l’uniformisation thermique est complète, et le fait que la température de
la surface de l’eau mesurée avec soin pendant les observations était à
peu près la même que celle du fond (5.6°), nous permettent d’accepter
comme bonnes, les observations de Saussure, et d’admettre qu’en
1779 le fond du lac était à 5.2«.
C’est en se fondant sur ces expériences que Saussure a formulé la
théorie de la thermique des lacs profonds qui est restée classique. Je
ne résiste pas au plaisir- de citer les propres termes du physicien genevois,
qui sera toujours un modèle de précision et de concision (3) :
« La différence de densité entre l’eau froide et l’eau chaude suffirait
pour donner en hiver à peu près la même température à une’ masse
d eau quelque profonde qu’elle pût être. Car les premiers froids qui
agissent sur la surface dé l’eau condensent les parties de cette surface,
tandis que les parties intérieures conservent encore la chaleur qu’elles
J h Ü ; t,r,aduis eû de§rés centigrades les mesures faites pa r les auteurs en degrés
de 1 echelle de Réaumur ou de Fahrenheit.
(2) Voyez l’explication que j ’ai donnée de cette erreur de Saussure, 1. 1, p. 30.
(3) [Loc. cit„.p, 338] | 49.