et en tenant compte de la hauteur de la station au-dessus de l’eau, en
déduire la déviation de la verticale. Une telle observation donnerait
des résultats parfaitement exacts s’il n’y avait pas, dans l’air en contact
avec la surface de l’eau, des réfractions qui altèrent presque toujours
la direction des rayons lumineux tangents au lac. Dans le chapitre
où nous traiterons des réfractions aériennes, nous aurons à constater
l’importance de ce phénomène et sa fréquence. Il semble impossible
de rien tirer de ce genre d’observations pour la question
qui nous occupe ici.
En résumé, j’admettrai l’existence de différences de niveau, dues aux
causes constantes et persistantes de la déviation de la verticale, par
suite de l’attraction inégale des couches inégalement denses de la sur-
face de la terre; j’admettrai sur notre lac l’existence de dénivellations
constantes à causes statiques. Le niveau de l’eau-est plus distant du
centre de la terre sur les bords qu’au milieu du lac ; ces dénivellations
varient d’importance aux différents points de la côté ; ces dénivellations
échappent à l’étude des procédés hypsométriques ordinaires.
Elles sont probablement de valeur très petite et peuvent être négligées.
V. Dénivellations constantes à causes dynamiques.
Je désigne sous ce nom des dénivellations causées par des actions
mécaniques, intervenant constamment, ou assez fréquemment pour
que leur effet devienne normal et évident dans la comparaison des
moyennes.
j.eur origine n’étant pas due à l’attraction de la masse de la terré,
cet effet de dénivellation ne se produit pas dans les opérations géodé-
siques du nivellement du pays; les dénivellations des masses d’eau
dont nous parlons seront donc constatables par la comparaison d observations
faites à différents limnimètres convenablement repérés
entre eux. ' -
Il y a des différences dans le niveau moyen des différentes mers, et,
sur la même mer, dans le niveau moyen des différents ports.
Ces différences sont très faibles, elles ne dépassent guère quelques
centimètres, mais elles sont constatables. C’est ainsi qu’en utilisant les
nivellements de précision les plus récents," M. Ch. Lallemand a donné,
en 1890, le tableau des hauteurs de la mer dans 28 stations côtières de
l’Europe, rapportées au niveau moyen de Marseille C1) ; les écarts les
plus forts sont les suivants :
St-Jean de Luz, Océan atlantique,
Ostende, Manche, — 16
Travemünde, Baltique,
B ro uw e r sh a v e n , Mer du Nord,
Ancône,- Adriatique,
Toutes les autres stations ont un écart plus faible que 8 centimètres.
On peut attribuer ces différences locales dans le niveau moyen de
la mer à des causes diverses agissant ou simultanément ou isolément.
1» Aux allures de la marée. Les différentes phases de la marée, marée
montante, marée descendante, mer étale, sont assez variables d’un
port à l’autre, suivant la configuration générale des côtes ; tantôt c’est .
l’ascension de l’eau qui se fait le plus rapidement, tantôt c’est la descente;
tantôt la courbe de la marée a des sommets aigus, tantôt des
sommets mousses. Ces différences influent, on le comprend facilement,
sur le niveau moyen de la mer et peuvent le modifier sensiblement.
2° A l’effet des courants qui accumulent l’e.au à l’entrée de certains
ports ou bien l’entraînent loin des côtes.
3» A l’effet de l’eau douce versée dans la mer par lès fleuves. P a r
sa densité, plus faible que celle de l’eau salée, l’eau douce doit être
en couches plus épaisses pour faire équilibre à la pression hydrostatique
générale de la mer; là où l’eau de mer est diluée par une quantité
notable d’eau douce, le niveau de la nappe liquide doit être plus
relevé qu’ailleurs.
4° Inversement, à un excès de densité dû à une évaporation puissante
qui concentre anormalement l’eau salée.
5° A la répétition fréquente des dénivellations accidentelles produites
par le vent. Si le vent, comme nous allons bientôt le voir, peut
être cause de dénivellations temporaires, si un vent déterminé souffle
fréquemment, habituellement sur une côte, il y aura action sur la hauteur
moyenne des eaux, et le niveau moyen en sera altéré.
(*) Ch. Lallemand. Le niveau des mers en Europe, etc. (extrait de la Revue scientifique).
Paris, 1890.