se multiplie dans nos tissus,déterminer une maladie,peut-être mortelle ;
l’on a constaté l’apparition d’épidémies de fièvre typhoïde, de choléra,
par suite de l’infection des sources d’eau potable par les déjections
d’individus atteints de ces maladies.
Quel est sous ce point de vue le danger que peut présenter l’eau
des lacs
Un lac ëst un réservoir, où aboutissent les eaux de drainage d’un
v aste bassin d’alimentation ; les égouts d’un grand nombre de villes et
villages, les eaux d’arrosage des prés et des champs, les résidus de la
vie d’une énorme population humaine et animale y arrivent directement
ou indirectement; c’est le rendez-vous de toutes les eaux du
pays, eaux souvent sales, parfois infectées. A première vue, le danger
de la propagation des maladies infectieuses paraît considérable si l’on
prend l’eau d’un lac pour l’alimentation. Il <est cependant des circonstances
fort rassurantes qui atténuent ou annulent les chances de contamination.
a. Le volume des eaux du lac dans lequel les eaux des affluents sè
diluent est énorme. Pour le lac Léman, nous l’évaluons à 89 milliards
de mètres cubes. En opposition à ce volume immense, la quantité
d’eau nécessaire pour l’alimentation d’une ville est peu considérable
Un homme consomme par jour 1.5 litre d’eau de boisson, dont une
bonne partie encore est cuite ou mélangée avec des substances désinfectantes,
alcool, etc. Les probabilités d’introduction dans l’organisme
de microbes infectieux, y arrivant par l’eau des boissons, sont infiniment
faibles.
b. Les eaux du lac ne ressemblent en rien aux bouillons de culture
dans lesquels on obtient la multiplication des organismes en question.
Les bactéries infectieuses, parasités de l’homme, ne se reproduisent
rapidement que dans des solutions Concentrées de substances organisus.
Une de leurs stations favorites est dans les ganglions lymphatiques où ils se
multiplient à l’envi ; qu’une blessure-d’un organe quelconque leur offre des conditions
favorables, ils s’y reproduisent en grand nombre et forment alors une collection
de pus. Us se nourrissent entre autres des microbes qui pénètrent dans l’économie
(phagocytisme de Metchnikoff) et, jouant alors-le rôle de commensaux
utiles, ils débarrassent l’organisme de ces parasites nuisibles. Chaque espèce animale
possède son espèce d’amibe parasité, douée d’appétit plus ou moins grand
pour les diverses espèces de microbes ; de là l’immunité relative dont jouissent
certaines espèces animales pour les diverses infections microbiennes. Toute la
biologie des leucocytes, toute la biologie des m aladies infectieuses s’expliquent facilement
par cette hypothèse, dont j ’espère pouvoir un jour démontrer la justesse.
ques maintenues à une température voisine de celle du corps humain.
Or l’eau du lac étant presque pure, et sa température étant relativement
très basse, on peut espérer que la reproduction des microbes
infectieux, germes des maladies de l’homme et des animaux y sera ou
bien nulle ou tout au moins excessivement lente. L’eau du lac ne
deviendra jamais un centre de multiplication de ces germes, un foyer de
propagation de maladies infectieuses. (Q
c. Les microbes sont des organismes figurés, ce sont de petits champignons
; ils sont recherchés et. mangés par tous les animaux qui
basent lèur alimentation sur les êtres infiniment petits. Ils ne tarderont
pas à être détruits, dans le lac lui-même, par l’intervention dé cette
faune nombreuse que nous y constatons.
Ainsi donc, les microbes infectieux qui peuvent arriver dans le lac
s’y perdent dans l’immensité de ses eaux ; ils ne s’y multiplient que
peu ou pas, et ils disparaissent bientôt, mangés qu’ils sont par les
autres organismes. Ces myriades de microbes que nous avons vu
exister dans les eaux du lac (38 par cm?') ne sont point des parasites
de l’homme où des animaux ; ce sont les microbes banaux et universellement
répandus de la fermentation, de la putréfaction des matières
organiques. Ils ne sont pas des microbes infectieux.
C’est ce qui explique la parfaite inocuité des eaux lacustres, malgré
le nombre énorme de germes qu’elles renferment.
La ville de Genève boit des eaux du lac Léman depuis l’année 1715,
soit depuis 175 ans ; sauf les épidémies de typhoïde de 1881 et 1884
sur lesquelles je vais revenir, il n’y a jamais eu trace d’infection par
les eaux alimentaires. Et cependant, le Léman est le grand réservoir
des eaux de lavage de tout le Valais, d’une partie de la Savoie, des
cantons de Vaud et de Genève; son bassin d’alimentation est de près de
8000km2 ; il y a eu parfois des épidémies de typhoïde dans les villes
riveraines et des milliards de microbes infectieux sont certainement
jetés chaque année dans le lac. Tous ces microbes parasites de l’homme,
tous ces germes de maladie disparaissent avant d’arriver à Genève, .1
C’est cependant le cas de discuter-ici attentivement les épidémies
de Genève et de Zurich. Elles ont vivement préoccupé la population.
fl) Il faut cependant avouer que, d’après les recherches modernes, cfertains
microbes pathogènes peuvent vivre assez longtemps, pendant des semaines tout
au moins, et même se multiplier dans l’eau de .source. Cornil et Babes. Les Bactéries
I, 206. Paris 1890.