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 1847. 
 Mars. 
 baie Shouraki,  et joindre  à Wangari le détachement  
 de Rangui.  Dans l’affreux espoir de dévorer les corps  
 de leurs ennemis, et de s’emparer de leurs  dépouilles,  
 ils  bravaient  sur  leurs  frêles pirogues  les  dangers de  
 la mer et d’une navigation hasardeuse,  pour aller attaquer  
 des tribus que la nature avait séparées d’eux par  
 une immense barrière,  tant  il  est  vrai  que  sous tous  
 les degrés de latitude,  à tous les degrés de civilisation,  
 la  race humaine  est la même,  susceptible,  aux  deux  
 extrémités  du  diametre de la  te rre ,  des mêmes  passions  
 et  des mêmes  fureurs.  Au,même  instant  nous  
 vîmes s’élever sur les cimes du cap Wangari d’épaisses  
 fumées,  signaux  de  reconnaissance  adressés  sans  
 doute  à leurs  compagnons  d’armes  par  les  guerriers  
 de Rangui. 
 A midi précis,  nous  fîmes  une  station  à  une demi-  
 lieue  à l’ouest de  la plus méridionale des  îles Tawiti-  
 Rahi. Alors nous pûmes reconnaître que l’île du nord,  
 qui est la plus grande, était réellement divisée en deux  
 par un canal  fort resserré.  Le rocher du sud se montrait  
 alors  sous  la  forme  très-régulière  d’une  tour  
 immense,  arrondie  et  tout-à-fait  dépouillée.  Le  flot  
 qui  passait sous  notre  corvette allait expirer l’instant  
 d’après,  avec un mugissement lugubre,  sous  les flancs  
 de  cette  citadelle de  la  n a ture ,  et  chacun  de  nous  
 épiait  avec  une  inquiète  attention  si  quelque roc invisible  
 ne viendrait pas se présenter sur notre route. 
 Le vent très-faible et très-mou à l’E.  et à l’E. S. E.  
 m’empêcha  de  prolonger  la  côte  d’aussi près  que  je  
 1 eusse désiré,  de peur  de ne  pouvoir doubler  le cap 
 Rakau-Manga-Manga.  Cependant  nous  passâmes  à  
 moins  de  deux lieues de la presqu’île de Motou-Aro,  
 facile  à  reconnaître  par  un  piton  très-élevé  qui  la  
 domine à cinq milles dans l’intérieur.  Au sud de cette  
 presqu’île on voit plusieurs petites îles près du rivage,  
 et au nord  la  côte  se  redresse en  falaises élevées,  de  
 l’aspect  le  plus  triste  et  le  plus  sauvage.  Le  cap  
 lui-même  est  accompagné  de  quelques  îlots  qui  
 affectent  ordinairement la  forme  de coins  à  sommets  
 aigus, et dont l’arête verticale est tournée vers le large.  
 Le  principal  de  ces  îlots a  reçu  le nom  de K o k îk o ,  
 de l’asile qu’il offre  à certains oiseaux de mer ainsi appelés. 
 Depuis quelques jo u rs ,  la surface des eaux est jonchée  
 de  magnifiques  fucacées  dont  je  conserve  des  
 échantillons  desséchés,  et  que  je  fais  sur-le-champ  
 figurer  par mon secrétaire. 
 Dans  l’après-midi,  nous  nous  trouvions  à  huit  
 milles à l’est du  cap Rakau-Manga-Manga,  et je pouvais  
 conduire l’Astrolabe  au mouillage de la baie  des  
 Iles avec la conscience d’avoir rempli mes instructions  
 touchant  la  Nouvelle-Zélande :  mais je  me  rappelais  
 que la Coquille, en venant à ce mouillage, n’avait absolument  
 rien vu de cette côte ; je crus, en ou tre , qu’il y  
 aurait quelque mérite, et que les marins nous sauraient  
 gré  de  poursuivre jusqu’au  cap  N ord  la  reconnaissance  
 que nous  avions  entamée.  Ce  parti,  d’ailleurs,  
 nous offrait le moyen  de  lier nos  travaux  en ce point  
 avec ceux de M.  d’Entrecasteaux. Je me décidai donc  
 à  terminer  la  partie  N.  E.  d’Ika-Na-Mawi,  comme