' f
tapissées seulement d’une verdure plus modeste.
Il n’y a pas de doute qu’on ne trouvât facilement au
travers de ces agréables îles, les lieux les plus convenables
pour former des établissemens. Je remarquai
particulièrement , sur la rive de Waï-Heke , des
stations qui me parurent admirablement propres à
une semblable destination. Il est inutile de répéter
qu’ici j ’étais encore désolé d’avoir quitté ces beaux
sites sans pouvoir les explorer plus attentivement,
sans y prélever un nouveau tribut sur toutes les productions
de la nature. Mais le temps me talonnait, et
d’autres travaux nous appelaient loin de ces côtes.
Je dois dire que notre guide Makara déploya, dans
cette navigation délicate, un sang-froid , une attention
et une intelligence qui eussent vraiment fait honneur
à plus d’un pilote européen. 11 ne m’arriva pas une
fois de le trouver en défaut dans ses indications, et
c’était un spectacle aussi nouveau qu’intéressant pour
nous de voir un sauvage, un antropophage nous
tenir lieu, dans ces canaux solitaires, du pilote le plus
attentif et le plus dévoué. 11 me donna les noms des
îles et des terres voisines avec beaucoup de complaisance.
Si j ’avais été en état de mieux comprendre sa
langue, je ne doute pas queje n’eusse reçu de lui une
foule d’autres détails fort importans.
Tout en nous pilotant, il me rapporta que c’était
bien le dieu des blancs qui avait tué Houpà et les anciens
habitans de Shouraki. Quand je lui demandai
quel était ce dieu des blancs , il me désigna la montre
de l’habitacle, et ce n’était pas la première fois que des
naturels avaient à nos yeux accordé les honneurs divins
k cette machine singulière et si fort au-dessus de
la sphère intellectuelle d’un pauvre sauvage.
A trois heures du soir enfin, nous rentrâmes dans
le bassin de la baie Shouraki, un peu au sud de
l’endroit que Cook désigna sous le nom d’îles de
l’Ouest. D’une voix unanime, nous décernâmes le
nom de notre navire au beau canal que nous venions
de parcourir dans toute son étendue et d’explorer
avec tant de succès. Si on voulait l’estimer, à partir
de File Tiri-Tiri-Matangui où commencent effectivement
nos découvertes, le canal de l’Astrolabe n’aurait
pas moins de cinquante milles de long; mais en lui
donnant seulement pour origine l’île de Rangui-Tolo,
où, resserré entre deux rives très-rapprochées, il peut
offrir en tout temps les meilleui's mouillages du monde
aux navires de toutes les dimensions, à partir de ce
point, dis-je, il présente encore un développement
de près de trente milles de côtes, sans y comprendre
la branche du Waï-Tamata, dont nous n’avons pu
assigner l’étendue réelle. Il n’est pas douteux qu’un
jour ces canaux joueront le rôle le plus important dans
la navigation, lorsque la colonie de la Nouvclle-Ciilles
du Sud aura pris le développement dont elle est susceptible.
Les travaux de l’Astrolabe, jusqu’alors dédaignés
, reviendront dans la mémoire des hommes,
comme ceux de M. d’Entrecasteaux qui déjà intéressent
une colonie entière, établie sur les lieux que ce
navigateur trouva naguère complètement déserts.
A un mille au large de l’endroit où le canal de l’As-
I;
; }
1 •
\ ■
F